RANDONNEE. Faut-il interdire les bâtons de marche à pointes sur le sentier du littoral ?

En 2010, les élus de Perros-Guirec avaient été les premiers à tirer la sonnette d’alarme. Ils accusaient les pointes en acier au bout des bâtons de marche nordique d’abîmer le sentier côtier. Depuis, d’autres maires ont pris des arrêtés pour demander aux marcheurs d’équiper leurs bâtons d’embouts en caoutchouc. Le sentier du littoral est fragile, il faut le protéger.

A l’automne dernier, le GR34 de Belle-Ile a été élu sentier préféré des français. Une immense fierté évidemment pour les îliens et puis, très vite, une inquiétude. 


"Dès le début du printemps, on a vu les randonneurs arriver en grand nombre", raconte Tibault Grollemund, maire du Palais à Belle-Ile-en-Mer. Chaussures aux pieds et bâtons de marche dans les mains, ils ont commencé à marcher… et à faire des petits trous dans le chemin. 

L’année dernière, les élus s’étaient déjà interrogés sur la nécessité de prendre des arrêtés pour limiter les impacts de ces bâtons, mais "il n’existe aucune étude qui mesure leur incidence," explique l’élu.

Et puis, cette année, face à la foule qui descend des bateaux pour aller admirer la Pointe des Poulains ou la Côte sauvage, des îliens se sont alarmés et ont commencé à dessiner des affiches pour demander aux marcheurs de mettre des embouts sur leurs bâtons. 

"Nous nous sommes dit qu’il fallait faire quelque chose, indique Tibault Grollemund. Sur l’île, le sol est schisteux, ce n’est pas du granit, il est donc très friable."

Depuis le 20 juin, les mairies de l'île ont donc décidé d'interdire les bâtons de marche à pointe sur les 83 kilomètres du GR de Belle-Ile-en-Mer. 

Un sentier fragile

"Quand on marche sur le sentier côtier, on est parfois sur un terrain fragile, des dunes, des falaises avec une végétation rase, éclaire Jean-Yves Jaouen, président du Comité du Finistère de la Fédération française de randonnée. Les pointes métalliques des bâtons de marche viennent faire des petits trous, parfois arracher des mottes de terres, déplacer des cailloux. "

"Quand 200 ou 300 personnes font chacune des petits trous, cela finit, comme dans la chanson, par faire un grand trou. A ce moment-là, l’eau s’infiltre, creuse et un morceau du sentier peut s’écrouler."

Le comité du Finistère de la FFR  demande donc aux gens de mettre des embouts en caoutchouc. "Tous les magasins de sport en commercialisent, ça ne vaut que quelques euros et cela évite bien des soucis."  

"En Bretagne, les pointes métalliques, c’est une hérésie, il n’y a pas besoin d’avoir une accroche extraordinaire, nous ne sommes pas en haute-montagne", insiste Jean-Yves Jaouen.

Les élus se mobilisent contre le "planté du bâton"

En Bretagne, Perros-Guirec dans les Côtes d’Armor a été la première à demander aux marcheurs de ne pas utiliser des bâtons de marche à pointe. C’était en 2010. 

"800 000 à 1 million de personnes empruntent chaque année le sentier de Ploumanac’h",  justifie Erven Léon, le maire de la commune. Les pointes des bâtons finissaient par se transformer en minuscules marteaux-piqueurs et abîmaient réellement le chemin. 
"Nous sommes obligés de refaire certaines portions tous les 5 à 6 ans, poursuit l’élu. Les gens comprennent que c’est un patrimoine important à protéger." 

A Crozon, dans le Finistère, le maire a alerté sur les risques pour le sentier côtier. Dans le Pays des Abers, on invite les randonneurs à poser leurs bâtons le temps de la balade. 

Le GR 34, ne doit pas être victime de son succès

"Il y a aujourd’hui  9 millions de marcheurs par an sur le GR 34, ça fait du monde, commente Didier Olivry, le délégué régional du Conservatoire du Littoral. La difficulté, c’est que le GR chemine dans des zones qui sont déjà fragiles, soumises à l’érosion, dans des endroits qui affrontent le vent, parfois la pluie, continue Didier Olivry. Et sur les sentiers, la loi littorale nous oblige à utiliser un matériel altérable, de la terre, de la pierre qui se déstructure très rapidement. "

"Certains élus ont pris des arrêtés, il faudra peut-être aller plus loin et éviter les bâtons pointus sur tout le sentier. Le Cap Fréhel, la Pointe du Raz reçoivent respectivement 1 000 000 et 800 000 visiteurs. Dans ces sites-là, les embouts pourraient être rapidement obligatoires, mais il ne semble pas incongru que ce soit, à terme, le cas pour tout le GR."

"Il faudra peut-être sensibiliser les fabricants et les magasins qui vendent ce type de matériel à équiper directement les bâtons de ces protections," propose Didier Olivry. 

"Par chance, souligne le délégué régional du Conservatoire du Littoral, on a affaire à un public sensible à ces questions d’environnement. Ils comprennent vite que dans les milieux naturels, il est préférable de mettre un embout en caoutchouc pour que les générations futures aient, elles aussi, la chance de pouvoir se promener sur les sentiers. "

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