Les murs parlent à Rennes. Pour alerter sur la situation des enfants qui dorment à la rue, ou dans des conditions indignes, un collectif de parents d’élèves colle des affiches dans la ville. Le but : interpeller les passants et les pouvoirs publics.
“Ce n’est pas normal que nous soyons obligés de faire cela”. Il est 23h, dans le froid et le vent, Madeleine* recouvre un mur de son quartier de Rennes avec un collage : "À Rennes des enfants dorment à la rue". Sur cette affiche à taille réelle, deux enfants de dos avec leur cartable demandent un logement.
Cette maman d’élève d’une école de Rennes fait partie du collectif des parents d’élèves de Rennes qui se mobilise pour les enfants à la rue. Cette nuit du mercredi 16 novembre, une quarantaine de parents sont dehors et recouvrent les murs de la ville du même collage. Le but : alerter le grand public et les autorités sur le sort de ces 86 enfants qui passent la nuit sans un vrai toit dans la capitale bretonne.
70 affiches placardées à Rennes
“Je suis révoltée par le fait que des enfants dorment à la rue” s’emporte la jeune femme. Ces enfants grandissent dans des conditions déplorables, tous les jours nous parents d’élèves faisons de notre mieux pour les aider eux et leurs parents, mais c’est le rôle des politiques”.
Avec émotion et colère elle poursuit “Je me mobilise pour que les politiques prennent leurs responsabilités, qu’il fasse leur boulot”.
Afin que le message soit entendu, le collectif s’est organisé. Une quarantaine de parents d’élèves de Rennes s'est donné rendez-vous pour coller ce message en faveur des enfants à la rue. Le résultat de leur action : 70 affiches placardées sur les murs de la ville.
“On s’est dit qu’il fallait en mettre partout”
Membre du collectif “Elèves protégé.es Rennes”, Anaïs est en première ligne sur la protection des mineurs à la rue. “Un street artiste a fait ce collage, nous nous sommes dit qu’il fallait en mettre partout”.
Pour la militante, cette opération est menée pour dénoncer le manque de solution des pouvoirs publics sur la situation de ces familles. "Nous avons été reçus par différents élus, mais à ce jour la situation n'a pas changé.”
86 enfants à la rue à Rennes
Cette action se passe dans un climat tendu entre les parents d’élèves et les pouvoir publics. La mairie de Rennes rappelle qu’elle compense à hauteur de 950 hébergements par jour en faveur des personnes en situation d’urgence.
L’élu à la solidarité, David Travers, affirme que cette mission de protection des personnes vulnérables est celle de l’Etat et pas celle de la ville. Dans un contexte budgétaire contraint, la métropole ne souhaite pas augmenter son budget sur cette problématique et renvoie la préfecture à ses responsabilités.
Le 20 novembre, dans 3 jours, sera célébré le 33e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant. La fondation Abbé Pierre rappelle qu’à Rennes 86 enfants dorment à la rue, et que trois écoles primaires accueillent dans leurs locaux des familles la nuit.
Pour permettre à une cinquantaine de personnes de ne plus dormir dans des tentes, un gymnase a été ouvert, le 7 novembre, dans le centre-ville de Rennes. Plus de dix enfants y dorment avec leurs parents.
“Il faut aider ces familles”
Le résultat de l’opération fait parler à l’heure de la rentrée des classes. “C’est scandaleux que des enfants dorment dehors, encore plus en cette période hivernale” dénonce Charlotte, mère d’élève à l’école de la Poterie à Rennes. “C’est une action parmi d’autres, il faut soutenir ces familles. Je trouve bien ces collages. Il faut dénoncer le manque d’action politique, c’est inacceptable.”
Si l’action est soutenue par le plus grand nombre, certaines réserves se font entendre. “C’est bien de faire ces collages, mais il faudrait surtout cibler les lieux fréquentés par les gens qui ont le pouvoir” nuance Yohann, père d’élève dans la même école du nord de la ville.
“Ça me fait mal au cœur, mon garçon est dans la même classe de CP qu’un enfant concerné” témoigne Marie Benvenuti. "Tout le monde n’a pas les moyens financier et logistique de pouvoir aider ces enfants et familles. L’action de sensibilisation est importante.”
Pour continuer à se faire entendre, le collectif des parents d’élèves annonce préparer un campement devant la préfecture pour ce mois de novembre.
Madeleine* : prénom d’emprunt