Six hommes comparaissent devant la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine à la suite du décès de Dorian Guémené en 2018, roué de coups à la sortie d'une discothèque. Son ami Kévin qui se trouvait avec lui cette nuit-là, a livré son témoignage
Le procès des agresseurs présumés de Dorian Guémené se déroule devant la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine pendant dix jours. Cinq hommes comparaissent pour homicide volontaire, un autre pour destruction de preuves. Le 7 juillet 2018, Dorian âgé de 24 ans et son ami Kévin Huruguen se rendent en discothèque à l'Espace, à Rennes. A leur sortie au petit matin, ils sont violemment agressés. Dorian ne survit pas à ses blessures.
Un jeune homme qui se fait beaucoup de reproches
Ce mercredi, Kévin a livré son témoignage. Il est arrivé à l'audience parmi les derniers, le visage blanc et fermé. Pendant plus d'une heure, il donne sa version des faits avec des phrases courtes, parfois seulement des mots. Ce soir-là, il convainc Dorian de sortir alors que lui voulait rentrer après leur service au bar le Kenland, où ils travaillaient tous les deux. Les deux amis étaient aussi colocataires depuis plus d'un an. "On était toujours ensemble".
Je suis arrivé très très stressé au procès. J'ai dit la vérité. Je veux juste savoir qui a porté les derniers coups à côté de l'Espace. On voit que les derniers coups ont été fatals. Qu'ils assument leurs actes.
Il raconte qu'à la sortie de la boîte de nuit, un groupe d'hommes s'acharne d'abord sur Dorian et puis sur lui-même. Il tombe à terre, prend des coups. Il rampe en reculant, jusqu' à l'intérieur de la discothèque pour demander de l'aide. C'est finalement lui qui retrouve son ami, inanimé, baignant dans son sang, "défiguré". "Je me rappelle lui avoir mis des claques en lui disant 'réveille-toi' !". "J'hurle de partout".
Il conteste la version de deux accusés qui leur aurait demandé un verre d'eau et qui aurait eu pour seule réponse une gifle venant de sa part. "On ne donne pas une tarte quand quelqu'un demande de l’eau." Il ne se souvient pas d'une telle altercation. "Cela n'a jamais existé".
Les mots se bloquent à un moment, l'émotion l'étreint. Il pleure, se touche les yeux. "J'ai toujours cette image dans la tête, de Dorian quand je le retrouve décédé, que je le vois en face de moi par terre, en sang, le visage enfoncé", explique-t-il lors de la suspension d'audience. "J'ai perdu mon meilleur ami. C'est dur de s'en remettre".
Depuis le début des débats, la personnalité des accusés a été examinées mais aussi celles de Dorian et son ami. Des témoignages ont rapporté des comportements agressifs des deux garçons lorsqu'ils sont alcoolisés, des bagarres. Les avocats de la défense le questionnent là-dessus. Kévin répond : "Cela nous est arrivés de défendre quand il y avait une injustice sur des personnes en difficultés. On était là pour défendre ces personnes là, sans méchanceté".
On est dans l'hypothèse d'un Kévin qui présente ce qu'on appelle un syndrome du survivant. Je crois qu'il aura définitivement la culpabilité d'avoir emmené son copain en soirée alors que son copain n'en avait pas très envie et peut-être d'être vivant alors que son ami est mort et pas lui.
A l'issue du récit de Kévin, l'avocat de la famille de Dorian rappelle : "Nos efforts communs, collectifs à l'audience c'est aussi de convaincre les gens qui sont victimes, qu'ils sont purement des victimes, qu'ils n'ont rien à se reprocher. Les seules personnes à condamner se trouvent dans le box, celles qui ont sauvagement agressé l'un puis l'autre sans aucune justification, sans aucune légitimité au point d'enlever la vie. On peut entre jeunes s'accrocher en discothèque mais pas fracasser quelqu'un au sol en se désintéressant de son sort".
Ce mercredi, les six accusés vont être entendus sur les faits. Le verdict est prévu le 22 octobre.