"Pouvoir à nouveau se regarder dans le miroir", elle imagine des dessous pour aider les malades à vivre

Yasmine Tatibouet n’a pas de mots pour décrire cette sensation du ciel qui vous tombe sur la tête. Elle tente, tempête ? Tsunami ? Elle avait 28 ans quand on lui a diagnostiqué la maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. On lui a alors installé une poche sur le ventre pour recueillir ses selles. Un choc terrible qu’elle a surmonté en imaginant des sous-vêtements pour elle et toutes les personnes stomisées.

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Elle s’appelle Yasmine, comme la princesse des Mille et Une nuits. Mais elle a très vite compris que la vie n’était pas un conte de fées.

À 28 ans, juste après la naissance de son fils, les médecins lui ont annoncé qu’elle souffrait de la maladie de Crohn. Elle a vécu sa première stomie. Une déviation chirurgicale avec l’installation d’une poche pour recueillir les selles ou les urines, dans le but de remplacer un organe défaillant. Il lui a fallu apprendre à vivre avec cette espèce de sac 24h sur 24 sur son ventre.

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reportage de S. Breton; T. Bouilly et N. Jacob ©France 3 Bretagne

 

"Au début, je ne voulais même plus me regarder, soupire Yasmine. Mon ventre, c’était vraiment une partie de moi que je détestais."

Et puis, il a fallu faire avec. Elle a eu une deuxième stomie à 35 ans, une définitive à 45.

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Un bandeau pour porter et dissimuler la poche

À sa sortie de l’hôpital, avec sa mère couturière, Yasmine a essayé de confectionner un bandeau pour mieux vivre avec cette poche. "On a d’abord peur qu’elle glisse, qu’elle se décolle, qu’elle tombe, qu’il y ait un problème, et puis on s’inquiète aussi du regard des gens qui peuvent l’apercevoir en fonction de nos mouvements."

La jeune femme a imaginé un bandeau en lycra. Comme une large ceinture avec une poche pour glisser la stomie. Elle est ainsi maintenue, "c’est rassurant, et on ne la sent plus. On peut recommencer à sortir, retourner travailler, vivre une vie normale ou presque !"

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100 000 personnes concernées en France

Comme elle, en France, à cause de la maladie de Crohn ou d’un cancer, 100 000 personnes vivent avec une stomie.

Très vite, Yasmine s’est dit que ses bandeaux pouvaient être utiles à d’autres. Elle a quitté son emploi de fonctionnaire et crée sa petite entreprise de sous-vêtements adaptés, Inti'med.

En 2019, elle a gagné le prix Coup de cœur du jury d’Étonnants créateurs.

Des bandeaux, des ceintures ou encore des boxers, elle a dessiné toute une gamme de produits pour les personnes stomisées.

Ce jour-là, elle doit justement se rendre dans l’atelier de couture de Dinan qui confectionne ses dessous. Le tissu file sous les doigts et les machines de Betty et de Françoise, les deux couturières. Elles sont très touchées et très émues de participer ainsi à l’amélioration de la vie des malades. "On sait qu’ils vivent des moments très durs, donc on est là pour essayer de leur apporter le meilleur !" soulignent-elles.

Les dessous chics

Les bandeaux noirs ou chair constituent l’essentiel des ventes de Yasmine, mais tant qu’à faire des bandeaux, elle voulait aussi qu’ils soient beaux, et si possible un peu sexy. Elle a donc imaginé des modèles avec un peu de dentelle ici, quelques strass là, une fine ganse noire.

Des femmes m’ont écrit pour me dire qu’elles pouvaient enfin à nouveau se regarder dans le miroir.

Yasmine Tatibouet, fondatrice Inti'med

"En tant que femme, j’avais besoin de me sentir jolie, confie-t-elle. Cela m’a redonné confiance en moi. Des femmes m’ont écrit pour me dire qu’elles pouvaient enfin à nouveau se regarder dans le miroir."

"Et puis, un jour, poursuit-elle, il y a une dame qui m’a commandé des bandeaux à dentelle. Elle avait un rendez-vous avec un monsieur et ne voulait pas apparaître avec sa poche sur le ventre. Les yeux de Yasmine se mettent à briller. J’ai appris, il n’y a pas longtemps, qu’ils allaient se marier".  

"Merci d’exister !"

Depuis le lancement de sa collection qu’elle commercialise sur son site internet Inti’med, toutes les semaines, Yasmine reçoit des messages de ses clients.

"Merci d’exister, grâce à vous, j'ai pu retrouver confiance". "Grâce à vous, j’ai repris le sport", "j’ai pu retourner au restaurant". Et ce courrier qui lui fait encore une fois monter les larmes aux yeux : "merci, pour la première fois, j'ai pu aller à la plage avec mes petits-enfants…"

L’histoire avait commencé comme un cauchemar, mais Yasmine a fait de son malheur une force.  "Parfois, avoue-t-elle, j’ai l’impression de vivre un rêve !"

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