Le Conseil d’État se donne encore quelques jours pour arbitrer le bras de fer qui oppose la filière CBD au gouvernement français. Une filière qui réclame la suspension d’un arrêté qui, depuis le 31 décembre dernier, interdit la vente des fleurs et feuilles d’un chanvre CBD, reconnu comme étant non-psychotrope.
Si les choses restent en l’état, les 1800 boutiques qui ont fleuri en quelques mois sur le territoire français seront peut-être contraintes d’abaisser définitivement le rideau de fer.
Car la vente de fleurs et feuilles représente jusqu’à 70 % de leur chiffre d’affaires. D’où les recours engagés par la profession devant le conseil d’État qui a auditionné ce jour, les acteurs d’un dossier qui sera, par ailleurs, jugé sur le fond dans quelques mois.
Pointer les incohérences
"On a un arrêté entaché d'une incohérence fondamentale puisqu'il interdit la fleur et la feuille alors qu'il autorise la fleur pour qu'on fabrique des extraits de chanvre !" ont plaidé les avocats de la filière CBD devant le Conseil d'État.
Les avocats de la filière ont multiplié les attaques contre un texte qui se drape d’un argumentaire parfois fragile.
"Le gouvernement met en place un motif de santé publique. Ce qu'on est en train de vous dire c'est : "Le jus de pomme ça va, la pomme c'est stupéfiant" ont-ils ajouté.
La justice européenne comme ultime recours
Dans son échoppe de Pléneuf-Val-André, Guillaume Carton à la tête de neuf boutiques en Bretagne, se demande quelle sera l’issue de cette procédure. "Le droit européen est en notre faveur… si l’arrêté n’est pas suspendu, il faudra encore une fois poursuivre l’État devant la Cour européenne de justice… qui nous a déjà donné raison".
Un commerçant qui a connu par le passé l’épreuve des perquisitions et de la garde à vue pour avoir fait commerce de produits parfaitement légaux. "La stratégie est simple… le but c’est de décourager tous ceux qui ont ouvert des commerces ces derniers mois. Combien auront l’énergie de s’opposer, d’engager une procédure face à un État régulièrement condamné pour ces manquements à la réglementation communautaire".
Un marché convoité
"Le marché du CBD ne peut pas échapper plus longtemps au contrôle de l’État", commente cet autre revendeur, qui préfère conserver l’anonymat. "C’est une évidence, le CBD ne posera plus de problème de santé publique le jour où l’État pourra le taxer comme il le fait pour le tabac et l’alcool… et puis de grands laboratoires ont déjà annoncé leur ambition de développer le cannabis thérapeutique et sont prêts à investir massivement. Les petits indépendants que nous sommes sont sans doute appelés à disparaître".
Pas une drogue pour le Conseil constitutionnel
Le Conseil d’État se donne donc encore quelques jours pour rendre sa décision. Il y a quelques jours les sages du Conseil Constitutionnel n’avaient pas donné suite aux requêtes de la profession, mais avaient cependant considéré que le CBD ne pouvait pas être assimilé à une drogue. Un argument supplémentaire brandit ce matin avant la clôture des débats.