Engins agricoles, ateliers, cloches, coqs... Les nuisances de voisinage au coeur d'une loi pour "ceux qui travaillent"

La députée du Morbihan Nicole Le Peih défend ce lundi 4 décembre 2023 une proposition de loi en matière de "troubles anormaux du voisinage". En ville comme à la campagne, des habitants se plaignent d'activités, qui souvent existaient avant leur arrivée. Faut-il pourtant une loi qui se veut "une prime à l'activité" pour défendre les uns contre les autres ? Explications.

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Qui ne s'est pas offusqué, ou n'a même ri, à la lecture d'articles faisant état de plaintes déposées en mairie ou même en justice pour que l'on fasse taire un coq au lever du jour ou que l'on interdise les tracteurs sur les routes à la sortie des champs pour cause de terre sur la chaussée. Des histoires de voisinage auxquelles les maires ruraux ont à répondre et qui "empoisonnent parfois la vie des élus" comme le précise Dominique Cap, maire de Plougastel et président de l'association des maires du Finistère.

L'antériorité avant tout

Pour l'élu, le nombre de plaintes pour ce qui est désigné sous l'appellation de "troubles anormaux de voisinages" ne cesse d'augmenter. Une hausse remarquée depuis la sortie de la crise liée au Covid avec son lot d'urbains venus s'installer à la campagne.  

Et de nous citer le cas d'une personne venue habiter à la campagne dans sa commune de Plougastel avec sa fille handicapée. Riverain, qui au détour d'une rencontre avec des habitants, l'avait interpellé sur le fait que les tracteurs de la ferme à côté de chez lui salissaient la route, ce qui l'empêchait de promener sa fille en fauteuil roulant, et donc "qu'il fallait faire quelque chose". Requête à laquelle le maire s'était empressé de répondre "vous saviez avant d'acheter que vous alliez habiter à côté d'une ferme. Que vous gueuliez, car un trottoir dans la commune n'est pas du tout adapté au passage d'un fauteuil roulant, je comprendrai, mais là, je ne ferai rien". 

L'antériorité doit avant tout prévaloir. Je ne donnerai jamais fait et cause à ceux qui ne prennent pas en compte l'antériorité.

Dominique Cap,

maire de Plougastel et président de l'association des maires du Finistère

Pour l'élu, il n'y a pas de doute sur le fait que l'antériorité doit prévaloir dans ce type de plainte. Il faut prendre en considération le fait que ces désagréments pour certains ne sont que les contraintes de la vie quotidienne auxquelles sont soumis les habitants de la campagne.

"Le bon sens" selon le ministre de la Justice

Un avis que partage Éric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice. Ce vendredi 1er décembre, le garde des Sceaux était à Pleucadeuc, aux côtés de la députée du Morbihan Nicole Le Peih, pour échanger avec les syndicats d’agriculteurs et la rapporteure du texte au sujet de la proposition de loi sur les troubles anormaux de voisinage.

Ce vendredi 1er décembre, le garde des Sceaux s'est rendu à Pleucadeuc dans le Morbihan pour échanger avec les syndicats d’agriculteurs au sujet de la proposition de loi sur les troubles anormaux de voisinage. © G. Le Morvan - FTV

En effet, une proposition de loi "visant à préserver les activités traditionnelles et usages locaux des actions en justice de voisins sensibles aux bruits et aux odeurs" doit passer prochainement devant l'Assemblée nationale, portée par Nicole Le Peih, députée renaissance de la troisième circonscription du Morbihan.

On marche sur la tête.

Eric Dupont Moretti,

ministre de la Justice

Devant cette proposition de loi attendue par le monde rural, Eric Dupont Moretti a souligné "un texte de bon sens, de concorde, qui consacre le bien vivre ensemble." Un texte qui a pour ambition de protéger "ceux qui travaillent" selon le ministre qui n'hésite pas à dire que "l'on marche sur la tête" lorsqu'on lui relate le cas "de gens qui ont été incommodés et qui ont fait un procès parce qu'on entendait le bruit des moissonneuses-batteuses la nuit", ajoutant "je ne sais pas comment on fait pour manger du pain si on ne peut pas couper le blé".

Un des objectifs de ce texte est d'exonérer de responsabilité en cas d’activité préexistante : "N’excèdent pas les inconvénients normaux de voisinage les activités professionnelles, agricoles, artisanales et culturelles qui procèdent de pratiques locales régulières et suffisamment durables" précise un des articles du projet de loi.

Pour le ministre, "l'idée du texte est que ceux qui viennent s'installer dans la ruralité ne peuvent pas exiger que les paysans changent de mode de vie. Par exemple, si vous venez vous installer près d'une ferme et que vous êtes incommodé par l'odeur des vaches, eh bien ! , tant pis et tant pis pour vous parce que l'on travaille dans cette ferme depuis longtemps et on travaillait ici avant que vous veniez vous installer".

Une proposition de loi applicable aussi en zone urbaine

Cette proposition de loi avait été annoncée lors du salon de l’agriculture par Éric Dupond-Moretti, répondant ainsi à une demande des syndicats agricoles.

"C'est une loi que nous attendons pour mettre un peu de sérénité dans le monde agricole. Une loi qui va peut-être permettre d'atténuer ces problèmes de voisinage avec ces nouveaux arrivants en campagne qui ne comprennent pas ces modes de vie et l'activité agricole en soi. Cette activité qui peut générer des désagréments est là avant l'arrivée des nouveaux arrivants et a besoin de fonctionner de cette façon. Aux nouveaux arrivants d'essayer de comprendre et de s'intéresser à cette activité avant de venir s'installer" a réagi Marie-Andrée Luherne, présidente de la FDSEA du Morbihan.

Seuls "2 ou 3 %" des plaintes en justice sur ce type de différents sont en zone rurale. Pour autant, comme l'a précisé le ministre et la députée Nicole Peih, le texte concerne également les zones urbaines. Selon le garde des Sceaux, "si vous achetez un appartement au-dessus d'un magasin qui génère des nuisances sonores, tant pis, car ce que nous voulons, c'est une prime à ceux qui travaillent. Vous aviez connaissance des nuisances et vous acceptez donc ceux qui travaillent et un certain nombre de désagréments". 

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Difficile de savoir combien de plaintes en justice sont déposées pour des conflits de "troubles anormaux de voisinage", les syndicats agricoles parlant de plusieurs centaines de cas, les citoyens devenant de plus en plus procéduriers dans "ce monde post-Covid à l'individualisme forcené" comme le qualifie Dominique Cap.

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