Le ministère des finances vient d'annoncer la fin progressive des avantages fiscaux sur les carburants dont bénéficient certaines professions comme les transporteurs routiers ou les agriculteurs (gazole non routier), alors que la France engage le virage de la transition énergétique. Ils seront supprimés progressivement d'ici 2030, avec un accompagnement pour permettre à ces professions d'opérer cette bascule.
Lors de la grand-messe organisée à Bercy sur les finances publiques, le gouvernement a fixé à 2030 la disparition des principaux tarifs réduits sur le carburant. Les secteurs visés (BTP, transport routier, agriculture) seront "accompagnés".
Des mesures de compensation
Cette niche représente 1,1 milliard d'euros pour le secteur du BTP, tandis que celle sur le gazole non routier pour le secteur agricole coûte 1,35 milliard par an à l'Etat. Le ministre de l'Economie a insisté sur le fait que le gouvernement « accompagnera » les secteurs en question, « avec des mesures de compensation pour les aider à opérer leur transition ».
« J'ai rencontré les fédérations du secteur des transports routiers, du bâtiment et de l'agriculture qui sont prêtes à s'engager dans cette démarche en vue du prochain projet de loi de finances», a assuré Bruno Le Maire. Les professionnels, eux, estiment que le dur des négociations va commencer.
C'est aussi la position de François Beaudoin, Président de la FNTR de Bretagne, à la tête d'une entreprise de transport à Saint-Armel dans le Morbihan. Car entre les années Covid et la crise énergétique de l'année 2022, le secteur est à la peine.
Le carburant est le 3ème coût de nos entreprises après les salaires et les véhicules.
François Beaudoin, Président de la FNTR de Bretagne
"Dans notre secteur, les marges se calculent en centimes chaque jour, donc les augmentations de prix du carburant vont mettre à mal nos sociétés", explique le chef d'entreprise." Nous comprenons cette mesure mais pas sa méthodologie. Il n'y a pas eu de concertation et le milileu craint la concurrence européenne face à cette mesure franco-française. "
Obligation de décarbonner
En évoquant le cadre de la Loi climat et résilience dans laquelle s'incrit la fin des avantages du gazole non routier, le transporteur ne s'oppose pas à l'obligation de décarbonner. Mais il appelle à des solutions viables pour l'avenir. Le gaz, l'électrique, les biocarburants pour les camions, Oourquoi pas, mais il faut les adopter en fonction des usages et trouver des alternatives crédibles économiquement et techniquement pour la profession, précise-t-il.
Au volant de son tracteur dans son exploitation à Guipel, en Ille-et-Vilaine, Claude Raffray n'a pas le sourire face à ces annonces. Il pense à son fils qui vient de s'installer, qui travaille douze heures par jour entre deux traites pour un salaire de 1.400 euros par mois.
Sur une ferme, sans tracteur, gros poste de carburant, on ne fait rien. On en a besoin pour l'alimentation des animaux, pour la manutention. L'été, pour la saison du maïs, on consomme 5OOO litres.
Claude RaffrayEleveur à Guipel, en Ille-et-Vilaine
Devant ses factures, il fait aussi le point : "les produits pétroliers, c'est 2/3 de taxes. Si on n'est plus soutenus, tout sera répercuté sur nos charges." Sans compter le prix des prestations lorsqu'il faut faire appel à des entreprises de travaux agricoles pour les moissons et certains travaux des champs, qui elles aussi, répercuteront la hausse du prix du gazole.
Avec Séverine Breton