Petit-fils et fils de figures du journalisme, Gilles Martin-Chauffier est aujourd'hui rédacteur en chef de Paris Match. Mais il est aussi un romancier reconnu et primé. Il publie cette année son 13ème roman qui nous entraîne dans l'Antiquité romaine. Rencontre avec la Cabine de pages sur l'île aux Moines, cette île du Golfe du Morbihan où sa famille a ses attaches depuis le XIXème siècle.
L'île aux Moines, c’est votre repère d’écriture?
Non, mais c'est là que j'ai découvert la littérature, en lisant. C'est là que je passais mes vacances en lisant énormément. J'écris un peu, il m'est arrivé d'écrire des papiers pour le journal, mais en fait sur l'île aux moines, maintenant, il y a toujours ma famille, mes enfants, mes petits-enfants, un peu trop de folie, ce n'est pas là que je me replierai pour écrire!
C’est loin d’ici que se déroule votre dernier roman, Le Dernier Tribun publié chez Grasset… Loin dans le temps et dans l’espace, puisque vous nous entraînez dans l’Antiquité à Rome. Premier siècle avant JC, Rome est alors la capitale du monde, du temps de César et du triumvirat. Pourquoi cette époque vous fascine-t-elle?
J'ai toujours adoré l'histoire et dans les périodes de l'histoire, l'histoire romaine m'a particulièrement séduite, enthousiasmée. J'ai dû voir au moins dix fois Ben Hur, j'ai souvent offert à des copains, "Mémoires d'Hadrien", j'ai lu des tas de livres, Quo Vadis. L'histoire romaine me fascinait et en particulier à cette époque. C'est l'an 700 de la gloire de Rome (NDR:1er siècle avant JC) Rome est toute puissante, elle n'est pas encore entrée en décadence, elle n'a pas d'ennemi. La ville n'a jamais été aussi belle et cela me plaisait d'avoir un personnage qui se promène dans Rome à ce moment là.
Ce livre, ce sont les mémoires du philosophe grec Metaxas. Il revient notamment sur cette mission qui lui a été confiée par un tribun de la plèbe Clodius : devenir sa plume et rédiger des discours contre Cicéron. L’occasion de découvrir à travers son regard Rome et ses excès de l’époque, mais aussi toute une République à l’agonie. Comment avez vous inventé ce personnage de Métaxas qui déambule parmi tant de figures historiques ?
L'idée, c'est qu'il fallait que ce personnage vienne de l'extérieur, de l'étranger. Comme ça, il pouvait se promener dans Rome et la décrire, comme ce n'est pas sa ville.
Je voulais montrer les propriétés merveilleuses, les habitations où se logeaient les étrangers, je voulais montrer les jeux du cirque, et en même temps je voulais avoir un personnage qui raconte car on est au moment du conflit entre Pompée et César qui va faire exploser la République Romaine.
Pompée a quelqu'un qui le défend, c'est Cicéron et César a un champion, le tribun de la Plèbe, Clodius. Metaxas est le meilleur ami de Clodius, c'est un type très brillant, très drôle et plein de réparties qui vient écrire les discours de Clodius pour qu'ils soient à la hauteur de ceux de Cicéron.
Dans ce livre, il y a énormément d’aphorismes, de formules chocs qui résonnent aujourd’hui… un exemple parmi beaucoup: "A ton médecin, tu dis la vérité. A tes juges ou à tes électeurs, tu dis ce qu’ils ont envie d’entendre". Dans quelle mesure ces pages d’histoire éclairent-elles notre présent?
Ce qui est intéressant dans la chute de la République romaine, c'est que les raisons de sa chute sont très proches de la crise politique française actuelle. En réalité, les gens qui détiennent le pouvoir veulent en plus détenir la morale. C'est exactement ce qu'on a aujourd'hui. Vous avez des gens qui sont au pouvoir et leurs adversaires, ils les traitent de populistes, de lies de la société. Ce cadre entre la démocratie réelle et la démocratie formelle a fait chuter la République romaine et c'est exactement ce à quoi on assiste aujourd'hui.
Les pauvres ne souffrent pas seulement de leur manque de richesses. Ce qui les heurte c’est le manque de respect. Ils n’en peuvent plus de cette caste malveillante qui les vole et se drape dans la morale républicaine.
Gilles Martin-ChauffierLe dernier tribun
C'est exactement le discours de Clodius et c'est exactement le discours des gilets jaunes. C'est pour cela que j'ai dit que cette période de l'histoire est très très proche de la nôtre.
Cicéron défend les forts contre les faibles. Crois-moi, son fameux cœur a les poches profondes.
Gilles Martin-ChauffierLe dernier tribun
Châteaux de sable, la rubrique des jeunes lecteurs
Contes de princes et chevaliers de la rennaise Evelyne Brisou Pellen publié chez Beluga Coop Breizh
Ils vous feront peur ou déclencheront vos rires…Vous rencontrerez par exemple le prince Trouille Les Pétoches, ou celui du pays des cerises sans noyau…
Un univers de fantaisie qui vous emmènera du Château de Josselin aux landes de Roch Tredudon… bref un voyage dans l’imaginaire breton.
Dans la collection «La table ronde» de l’éditeur finistérien Locus Solus, deux nouveaux titres à découvrir sous la plume d’Anne Ferrier avec les illustrations sublimes de Christelle Le Guen.
Perceval, l’enfance d’un rêveur et Lancelot, l’enfance d’un chevalier. Des récits qui revisitent avec humour et poésie les fameuses légendes du Roi Arthur. C’est à lire dès la fin de la maternelle…
La carte postale du libraire
Amélie Valsangiacomo du Café-librairie Gwennili du Faou (29) nous conseille la lecture de "L'oiseau sur la pierre écarlate" de Sonia Schubert (Editions des Terres du couchant).
"L'histoire d'un petit village de montagne qui connait le changement climatique. Suite à différentes catastrophes, l'ensemble de la population est parti sauf un homme qui garde l'ensemble des secrets de ce village. il a tapi au fond de lui le sens de la montagne, le goût de la montagne. c'est un récit très beau de nature sauvage, de mystères, de secrets et aussi de ce changement que l'on connaît tous petit à petit aujourd'hui. C'est une écriture très fluide, très poétique et qui sert énormément le récit et l'intrigue."
Le livre fétiche de Gilles Martin-Chauffier
Gilles Martin-Chauffier a choisi de nous présenter le livre écrit pas sa grand-mère résistante Simone Martin-Chauffier "A bientôt quand même" (Calmann Lévy).
"C'est le livre qu' a écrit ma grand-mère après la guerre. C'était une grande résistante qui a été dans le premier réseau de résistance en France qui était le réseau du Musée de l'Homme. Ensuite, elle s'est installée à Lyon où mon grand-père était journaliste et dans sa maison à Collonges-au-Mont-d'or, elle a reçu absolument tous les chefs de la résistance. Le dernier déjeuner de Jean Moulin avant son arrestation, c'état la veille, c'était chez elle...Ce livre-là raconte absolument la sympathie entre les résistants, c'était des gens jeunes qui toute leur vie sont restés une bande de copains."
Le rendez-vous de "Livre et lecture en Bretagne"
Ne manquez pas la 5ème édition du festival «La houle des mots, un village en poésie» à Saint-Jacut-de-la-mer dans les Côtes d’Armor. Le thème cette année, Archipel. Au programme, lectures, conférences, musique et arts plastiques. Un très beau rendez-vous!