Paris gagné pour Christian Le Squer, l'un des deux seuls chefs à accéder cette année à la récompense suprême de la gastronomie. Quinze mois après son arrivée au restaurant du George V, à Paris, il vient de décrocher la troisième étoile au guide Michelin. Portrait d'un toqué inspiré par sa région.
Gratinée à l'oignon, bar au lait ribot figurent parmi ses plats-signatures. Au "Cinq", le restaurant gastronomique du George V à Paris, le chef Christian Le Squer compose une "cuisine typiquement française" mais toute en modernité. Un choix qui vient de lui rapporter, pour la deuxième fois, une troisième étoile.
Une équipe soudée, le chef et sa brigade peuvent enfin fêter la nouvelle après le service! #3etoiles #Guidemichelin pic.twitter.com/Ka0Ff9eox0
— Le Cinq Restaurant (@LeCinqParis) 1 Février 2016
Avec ses 3 étoiles, il récidive
Car cette récompense n'est pas une première pour ce Breton de 53 ans. Il a déjà obtenu et conservé trois étoiles pendant douze ans quand il était chez Ledoyen, dans une grande discrétion.En arrivant à la tête des cuisines du Cinq, fin octobre 2014, où il a succédé à Eric Briffard, sa mission était clairement énoncée: ramener au palace parisien de l'avenue George V les trois étoiles perdues en 2007.
Discret, il a appris à se montrer
Mission accomplie, un an après avoir obtenue une deuxième étoile. "Ça me fait énormément plaisir! C'est la récompense de douze mois de travail acharné, d'une remise en question sur tous les plats que je pouvais faire avant", a commenté le chef auprès de l'AFP, également auréolé de cinq toques par le guide Gault et Millau.Au George V, palace parisien de la chaîne Four Seasons, détenue par le prince saoudien Al-Walid ben Talal, ce discret s'est converti à la médiatisation, entouré par une solide équipe de communicants.
"Avant, je ne savais pas faire savoir. Or, c'est très important !"
Il est désormais très présent sur les réseaux sociaux, où il compte plusieurs dizaines de milliers d'abonnés.
"Ma cuisine est comme un tailleur Chanel que l'on porte sur un jean", proclame-t-il sur son compte.
Né dans le Morbihan, Christian Le Squer a fait ses classes dans de prestigieuses adresses parisiennes comme Le Divellec (dont le grand-père était originaire de l'Ile-aux-moines dans le Morbihan), Lucas Carton ou Taillevent, avant de prendre les cuisines du café de la Paix, le restaurant du Grand Hôtel, place de l'Opéra, où il a décroché sa première étoile en 1996, la deuxième en 1998.
En 1999, il succède à Ghislaine Arabien au Pavillon Ledoyen, où en 2002, son travail est récompensé par trois étoiles en Michelin.
Un parfumeur
Au Cinq, restaurant de palace à la nombreuse clientèle internationale, pas de saveurs exotiques. "Je fais une cuisine typiquement française avec des vraies saveurs, avec des sauces", explique ce chef, à la tête d'une brigade de trente personnes en cuisine. Autant officient dans la salle de cinquante couverts au style classique et chaises médaillon Louis XVI.Avec lui, la traditionnelle gratinée à l'oignon se transporte dans le XXIème siècle, métamorphosée en billes qui éclatent en bouche. "Cela rappelle la gratinée qu'on peut manger avec des copains à 4-5 heures du matin après une soirée parisienne", explique-t-il.
Seule entorse au caractère français de la carte, un boeuf Wagyu japonais.
La cuisine de la mer est très présente chez ce Breton, qui cuisine la Saint-Jacques à cru avec quenelle d'oursin pour un bien nommé "concentré iodé".
"C'est toute mon enfance, quand je prenais le bateau à Quiberon pour aller à Belle-Ile, les narines remplies d'air iodé, marin. C'est cela que j'essaie de signer dans mes assiettes", raconte Christian Le Squer qui convoque aussi ses souvenirs d'enfance dans son bar de ligne au caviar poché au lait ribot.
"C'est une grande fierté et un hommage pour ma Bretagne", a confié le chef à France 3, en marge de la cérémonie organisée ce lundi matin par le Guide Michelin. "Je suis un ambassadeur de ma région à Paris". Quant à envisager un retour en Bretagne....
Ecoutez la réponse de Christian Le Squer à France 3:
"Je suis comme un parfumeur, j'essaie de faire des compositions. et à chaque bouchée, j'essaie d'obtenir une longueur en bouche", poursuit le chef, dont la cuisine s'accompagne des plus grands vins sélectionnés par le sommelier Eric Beaumard.
"Equilibre entre la finesse et la gourmandise"
José Silva, directeur général de l'hôtel, qui a fait venir Christian Le Squer, explique apprécier "l'équilibre entre la finesse et la gourmandise" de la cuisine du Morbihannais."Il a retiré de son répertoire certaines assiettes un peu assises dans le passé, a gardé les très grandes, qui le définissent, et recomposé un peu de modernité autour", souligne ce passionné de gastronomie, dont l'hôtel compte deux autres restaurants.
"C'est un homme qui se projette toujours dans l'avenir", commente encore José Silva. "Il a un côté gamin et curieux et la force d'un homme de 25 ans!"'