Le secrétaire d'État à la Mer, Hervé Berville, a confirmé l'arrêt du soutien financier octroyé aux pêcheurs pour l'achat du gazole. Elles prendront fin le 15 octobre. Les pêcheurs bretons s’y attendaient, mais le coup est rude. Bientôt, disent-ils, "ça ne vaudra plus le coup d’aller en mer !"
"On s’y attendait, mais la question maintenant c’est qu’est ce qui va se passer ? Qu’est-ce qu’on va faire ?" s’inquiète David Le Quintrec, du mouvement des "Pêcheurs en colère".
Dans un entretien accordé à Ouest-France et TV Rennes, le secrétaire d'État à la mer, Hervé Berville a annoncé que les aides au gazole pour les bateaux prendraient fin, comme prévu le 15 octobre. "Comme dans d'autres secteurs, elles s'arrêteront car il faut revenir à une forme de normalité, tout en accompagnant nos pêcheurs."
"C’est un scandale", tonne Olivier Le Nézet, le président du comité national des pêches. "On a une filière qui est en train de crever et on lui coupe les aides !"
Fin des aides le 15 octobre
Les entreprises de pêche touchent actuellement une aide de 20 centimes par litre de gazole, plafonnée par entreprise. Le coût du gazole représente environ 40% du chiffre d'affaires.
"Aujourd’hui, le gazole à Lorient est à 95 centimes. Un chalutier est rentable avec un carburant à 50 centimes… sans aides, ça devient impossible de prendre la mer", résume d'une phrase Olivier Le Nézet.
"C’est pas bon, c’est pas bon, répète Thomas Goulet, pêcheur à Doëlan. Ceux qui font deux tonnes de gazole, à un euro le litre, ça fait 2 000 euros par jour. A la fin du mois, c’est énorme. Les équipages ne vont plus rien gagner. Je connais déjà des marins qui touchent à peine 300 ou 400 euros par mois ! Ça craint !"
Une décision "irresponsable"
"On avait été très clairs, avec le Président de la République et la Première ministre au Salon de l'agriculture, poursuit le secrétaire d'État à la mer. Il fallait qu'il y ait une prise de relais par les acteurs privés. Car depuis le début de l'année, nous aidons la filière à s'organiser ; à la fin, c'est de l'argent du contribuable français."
Ce gars-là, ce n’est pas un ministre. Je ne le considère plus comme un Breton parce qu’il nous a trahis.
Olivier Le Nézet, Comité national des pêches
"C’est irresponsable de sa part. Je suis outré, scandalisé", s’énerve Olivier Le Nézet. "Ce gars-là, ce n’est pas un ministre. Je ne le considère plus comme un breton parce qu’il nous a trahis. Il sera le fossoyeur de la pêche."
Le président du comité des pêches rappelle qu’en trente ans, on a perdu la moitié de la flotte.
"15 jours en mer payés une poignée de main, ce n'est pas possible"
"Le problème, c’est que le prix du poisson ne bouge pas, explique David Le Quintrec. Sur certaines espèces, comme la roussette ou le merlu, les prix n’ont pas augmenté depuis 30 ans."
"Nous avons eu des réunions avec les GMS (grandes et moyennes surfaces). Elles devaient nous aider avec la Pêche française, mais en fait, elles préfèrent aller acheter des poissons moins chers ailleurs. Tout le monde s’en fout !"
Une entreprise qui ne dégage pas d’économies, c’est une entreprise morte !
David Le Quintrec, Mouvement des Pêcheurs en colère
"Dans quelques semaines, plus personne ne pourra se permettre d’aller en mer. Ça sert à quoi si on ne dégage même plus de revenus. Sur certains bateaux déjà, les mecs ils font une quinzaine et à la fin ils sont payés d’une poignée de mains… Une entreprise qui ne dégage pas de revenus, c'est une entreprise morte."
Le marin confie qu’il est las d’aller en mer pour payer, payer, payer. "On doit payer les crédits, les fournisseurs, mais il y a des matins où on n’a plus envie. Là, la fin des aides sur le gazole, c’est le pompon !"
75 millions d'euros d'aide
"Nous avons atteint un montant qui est de 75 millions d'aide au carburant, justifie Hervé Berville, nous ne pouvons pas prolonger ces aides car le régime européen qui permettait ces aides s'arrête cette année. Ce n'est pas à l'État de se substituer tout le temps à la responsabilité de tous les acteurs de la filière".
Si la pêche tombe, derrière, il y a tout le mareyage qui s’arrête, les ports, les transporteurs, les poissonniers… derrière nous, il y a des dizaines et des dizaines de milliers d’emplois."
Olivier Le Nezet, président du Comité national des pêches
"J’en appelle au Président de la République, aux députés européens. Il faut soutenir la filière le temps qu’il faudra, lance Olivier Le Nézet. Et il prévient," si la pêche tombe, derrière, il y a tout le mareyage qui s’arrête, les ports, les transporteurs, les poissonniers… derrière nous, il y a des dizaines et des dizaines de milliers d’emplois."
Cette semaine, les Assises de la pêche et des produits de la mer se tiendront à Nice les 21 et 22 septembre. "Oui, oui, on va y aller", annoncent les pêcheurs. "Le secrétaire d’Etat, on va lui réserver un bel accueil !"