Depuis la mi-mars, le démantèlement des bateaux de pêche a démarré à Brest. Le chantier Navaleo doit déconstruire une quinzaine de navires dans le cadre du plan d'accompagnement individuel (PAI), lié au Brexit. Sur les 90 navires retenus dans le plan de sortie de flotte, la moitié provient des ports bretons.
Ils ont quitté mi-mars le Guilvinec, leur port d'attache, après 39 et 32 ans de service. C'est le dernier voyage du Bara Brenn et du Bara Dous, deux chalutiers de l'armement bigouden. Cap sur Brest.
Le plan de casse a vidé les ports de pêche de Cornouaille et rempli les bassins du port de commerce.
La profession a manifesté ces dernières semaines. Les temps sont durs pour les pêcheurs qui subissent le démantèlement de leur outil de travail, avec le plan d'accompagnement individuel (PAIB), lié au Brexit. La moitié des bateaux retenue dans le plan de sortie de flotte sont bretons. Et l'impact est notamment important pour le Finistère, avec la casse de 25 chalutiers pour la Cornouaille, mais encore de fileyeurs et de caseyeurs.
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"C'est la fin d'une histoire"
Quelques semaines plus tard, ce sont ainsi deux caseyeurs de Roscoff qui font route pour rejoindre le chantier brestois Navaleo spécialisé dans la déconstruction. À bord du Kreiz ar Mor, le patron Yannick Calvez en a gros sur le cœur. "En 30 ans de carrière, j'ai vu un peu de tout, le bon comme le meilleur. On va essayer de garder que les bons souvenirs, mais c’est triste" déplore-t-il. "C'est vraiment douloureux, parce que j'aurais préféré le voir continuer à naviguer, mais comme il n'y avait personne pour reprendre derrière, on n'avait pas d'autres choix, que de le détruire. C'est triste, c'est la fin d'une histoire, la fin d'une époque. Maintenant, il ne restera plus que deux caseyeurs hauturiers sur les dix qu’il y avait avant !"
Le bateau de Yannick Calvez pêchait en Manche le crabe et le tourteau, comme ceux de Patrick et Thierry. Accompagnés de leurs épouses, ils sont venus dire au revoir à leur compagnon de route tout juste entrés dans la forme de radoub.
750 000 euros d'indemnité
Les patrons toucheront 750 000 euros du plan de casse avec lesquels ils régleront les fournisseurs et les indemnités des équipages.
Une opportunité à saisir, surtout quand la ressource manque. "Pour nous, c'est bien, on ne va pas dire, remarque Patrick Folloroux, patron du caseyeur 'Ile de Sieck'. Beaucoup de gens disent que c'est pas bien, mais nous ça nous arrange parce qu'il n'y a plus de crabe. Et du coup, c'est dur de trouver les matelots, parce que les salaires ne suivent pas comme pour les fileyeurs. Du coup pour trouver des gars, c'était compliqué. Et puis à 53 ans, à deux ans de la retraite, et avec un bateau de 1986, donc pas tout neuf non plus, c'est un choix de raison, c'est comme ça !"
Valorisation du métal de ces bateaux
Dans la cale sèche, les premiers coups de pelleteuse seront donnés la semaine prochaine, ce mardi 2 mai. 36 000 euros, c'est le coût de la démolition pour un caseyeur en bois à la charge des patrons pêcheurs. Un peu moins pour les chalutiers en acier dont la coque est mieux valorisée. "Ce sont des bateaux qui pèsent en moyenne 150 tonnes, explique Émile Ferrand, pour le chantier. Vous allez trouver une grosse centaine de tonnes de métaux ferreux et non ferreux, de l'acier, de l'aluminium... L'acier va être rechargé par bateau ici sur le quai du port de Brest pour repartir dans des fonderies dans le nord de la France."
Une façon pour les bateaux de renaitre de leurs cendres, quand les marins tentent de garder le cap. Yannick Calvez confie ainsi n'avoir gardé que la barre du Kreiz ar Mor, avec les photos et les souvenirs, dit-il.