À quelques jours de Noël, les jouets sont de saison et le "seconde main", bien dans l'air du temps. Ces jouets là sont destinés à Emmaüs, réparés par de jeunes patients du centre de postcure Hovia, à Saint-Avé dans le Morbihan. Une structure qui accueille de jeunes adultes sortant d'établissements de santé mentale, pour les amener peu à peu vers le monde professionnel ou associatif.
Très consciencieusement, Noa reconstitue un puzzle, il vérifie si toutes les pièces sont bien là, "C'est apaisant, ça ne demande pas trop d'effort physique", apprécie le jeune homme, entré au centre il y a quatre mois. "Déjà avant de faire le puzzle, je vérifie son état, celui de la boîte" ajoute-t-il. Dans les étagères, des jeux de société, quantité de Lego, ou encore des rangées de Playmobil. Dans cet atelier, les jouets arrivent d’Emmaüs Vannes chaque semaine et y retournent une fois réparés.
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Cet atelier "Rénov' Jouets" est ouvert tous les après-midi du lundi au jeudi, pour les patients, sous le regard bienveillant d'Anne-Laure, ergothérapeute et de Nathalie Gousset, éducatrice spécialisée. "Ça permet vraiment de travailler différents points, indique la professionnelle, notamment la concentration au niveau des capacités cognitives, l'attention, la mémorisation, la capacité de travail. C'est savoir s'organiser, prendre des initiatives et aussi la relation avec les autres patients dans l'atelier."
"Avant de venir dans ce centre, je ne me sentais pas très utile"
Dans le centre depuis près de trois ans, Davy, compte avec application les pièces d'un puzzle, qui en compte mille et confie que "cet atelier m'apporte beaucoup de réconfort. Parce qu'avant de venir dans ce centre, je ne me sentais pas très utile. Et le fait de savoir que je le fais pour une bonne cause, comme Emmaüs, ça réchauffe le cœur" ajoute-t-il. Le trentenaire prépare sa sortie, prévue dans quelques mois, "C'est mon premier pas vers une vie autour du bénévolat. Ce que je n'aurais jamais envisagé sans venir ici" assure-t-il encore.
"Le fait de venir ici, c'est pour un retour à une vie active, travailler sur l'autonomie, faire un pas vers le travail, mais à basse fréquence, sans objectif de rentabilité, poursuit encore Davy, très clairvoyant. Le but, c'est de bien faire et d'être heureux du résultat." Ce sont pour les patients des séjours de transition, avec une prise en charge très individualisée, insiste Karine Auffret-Williams, psychologue, "travailler sur la construction d'un projet individuel avec des mises en situation qui vont nous aider et surtout les patients à se déterminer sur leur projet d'avenir."
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De multiples ateliers, premiers pas vers l'extérieur
Cet atelier Renov’ jouets, comme celui pour l'entretien des espaces verts, ou le sport et la musique sont des activités de ce centre Hovia, basé à saint-Avé, dans le Morbihan, dit de post cure psychiatrique, qui accueille une trentaine de jeunes patients sortant d’établissement de santé mentale. "J'y ai trouvé beaucoup d'aide, avec aussi des exercices qui peuvent me rapprocher du milieu professionnel, rapporte ainsi Constantin et du coup, je me suis senti directement à ma place, ça m'a beaucoup plu." Le jeune homme de 25 ans, après un parcours d'hospitalisation en services de psychiatrie, est arrivé au centre depuis trois semaines, en journée seulement.
Ce centre de réhabilitation psychosociale et de réadaptation professionnelle, offre un hébergement, du lundi au vendredi, à quelques patients, mais d'autres n'y viennent qu'à la journée, certains peuvent même disposer d'un appartement en ville, pour une transition vers le monde extérieur.
"Se reconstruire après la rupture créée par la maladie"
"Un centre de réhabilitation psychosociale, va travailler sur comment se reconstruire après un moment de rupture dans la vie, avec l'émergence de la maladie, explique le docteur Michel Jacq, le psychiatre du centre de Saint-Avé. Ça va être de travailler sur l'ensemble des champs de la vie de la personne. Celui du lien avec les autres, la capacité à retrouver des échanges, une sociabilité, un intérêt pour l'autre, sachant que la maladie amène beaucoup de repli, de doute sur soi-même.
Et puis ça va être de travailler aussi sur un projet de vie, avec une dimension qui peut être professionnelle, ou de l'investissement associatif ou culturel, et plus généralement travailler sur la connaissance de la maladie, c'est un élément important (...) Ça signifie de devenir un élément moteur dans la dynamique du soin."
"Ça aide beaucoup à se sentir bien, comme dans un cocon"
"Il y a aussi le côté cocon avec le psychiatre, la psychologue, les infirmières, ergothérapeute, éducatrices, toutes ces personnes qui sont derrière nous, qui nous portent, relève Davy de son côté. Franchement, on a beaucoup d'échanges avec le personnel, ça aide beaucoup à se sentir bien, comme dans un cocon, très protégé. Le but, c'est de nous armer, récupérer des défenses pour revenir à la vie active."
Une étape transitoire, de quelques mois à quelques années, sécurisante, comme le dit Davy, pour réapprendre, petit à petit, à vivre en société, à pouvoir affronter le monde et à retrouver une autonomie et le goût à la vie.