Une consultation publique sur la survie des abeilles, pour quoi faire?

Le ministère de l'Agriculture et celui de la Transition écologique lancent une consultation sur un plan "pollinisateurs" pour freiner le déclin des insectes qui pollinisent 70% des cultures agricoles. Associations environnementales et syndicats agricoles affutent leurs arguments.

Un « coup d’épée dans l’eau » pour les associations de défense de l'envionnement, des « contraintes supplémentaires » pour les représentants agricoles.

La première version du plan « pollinisateurs », présentée le 11 juin 2021 aux organisations d'apiculteurs et aux syndicats agricoles, est encore loin de susciter l’adhésion. Les uns dénoncent un manque d’ambition qui ne permettra pas d’enrayer le déclin massif des insectes pollinisateurs (abeilles domestiques et sauvages, bourdons, papillons, mouches...), les autres s’inquiètent d’une distorsion de concurrence par rapport aux agriculteurs des autres pays européens.

Les études scientifiques établissent que la mortalité dans les colonies d'abeilles oscille désormais entre 20% et 30%, alors qu'elle était de 5 à 10 % en moyenne dans les années 1980. De son côté, la ministre de la transition écologique rappelle qu'il y a urgence à agir, y compris pour sauvegarder l'agriculture.

70% des cultures dépendent de la pollinisation et les études montrent que 40 % de la valeur économique agricole est directement liée au niveau de pollinisation.

Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique

D'après une étude publiée en 2012, l’intervention des insectes pollinisateurs influence en effet la qualité nutritionnelle de certaines productions. Plus les grains de pollen déposés sur les pistils des fleurs sont nombreux, plus ces dernières peuvent sélectionner les meilleurs gamètes, et développer des fruits gros et riches en nutriments.


Un plan comprenant un projet d'arrêté sur les épandages de pesticides

Le plan "pollinisateurs", qui s'appliquera sur la période 2021-2026, est soumis à consultation publique depuis le 21 juin et jusqu'au 20 juillet 2021.

Il comprend six axes, dont certains restent à préciser, comme "l'intégration des actions favorables aux pollinisateurs dans les secteurs d'activité tels que agriculture, forêt, aménagement urbain, industries, infrastructures de transport." Un autre axe relève pour l'instant de la déclaration d'intention comme "la préservation du bon état de santé des abeilles".

Mais deux points pourraient avoir un effet tangible.


Des plages horaires pour épandre, en soirée

L'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) proposait qu'en période de floraison des cultures, ce qui signifie approximativement d'avril à juillet, il ne soit possible d'épandre des pesticides qu'avant le lever du soleil ou après son coucher, c'est-à-dire de nuit, quand les insectes ne butinent pas, leur activité étant liée à la luminosité. Mais la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) a obtenu gain de cause: les horaires pour épandre sont ramenées à tôt le matin ou en soirée, mais de jour.

"Le projet d’arrêté prévoit une plage horaire pour les traitements s’étendant de deux heures avant le coucher du soleil à trois heures après le coucher du soleil (article 3). Cette période peut être adaptée en cas d’impasse technique, en particulier pour les traitements contre les insectes à cycle diurne et les traitements fongicides curatifs (article 5) Ces situations doivent être tracées et justifiées par les agriculteurs."  [Certains fongicides supposent en effet une forte luminosité pour tuer les champignons sur la culture, NDLR]

Du côté de la FNSEA, on fait remarquer que si l'agriculteur exploite plusieurs cultures différentes, la période concernée par un horaire imposé pour épandre peut s'étaler sur plusieurs mois, chaque culture ayant une période de floraison différente. A quoi les associations environnementales répondent que pour les moissons, les agriculteurs travaillent souvent de nuit.


Evaluer les effets sur les abeilles de tous les pesticides 

Autre nouveauté proposée dans le plan, à la page 64 :  tous les pesticides devront être évalués, dans les risques qu'ils font courir aux pollinisateurs, pas seulement les insecticides mais aussi les fongicides et les herbicides. Problème: le délai accordé pour étudier les effets toxiques des pesticides sur les insectes pollinisateurs paraît long, jusqu'à 4 ans. Dans l'intervalle, ces produits pourront continuer à être utilisés. Néanmoins, soulignent les agriculteurs, ce sont plusieurs centaines de références de fongicides et d'herbicides qui devront être passées en revue par les autorités.

Reste à savoir si les citoyens et consommateurs participeront à la consultation publique, en prenant le temps de rédiger un avis sur le plan "pollinisateur". Après le maintien du glyphosate, dont l'interdiction était annoncée, et la réintroduction en 2021 d'un insecticide néonicotinoïde interdit trois ans plus tôt parce qu'il exterminait les abeilles, la volonté politique d'avancer dans ce domaine est mise en doute.

 

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