"On est devant une bombe économique à retardement" selon Harold Huwart, vice-président de la région Centre-Val de Loire 

Harold Huwart*, vice-président du conseil régional Centre-Val de Loire, délégué au développement économique, constate que 15 à 20% des entreprises se disent en situation critique, malgré les aides économiques. Il pointe aussi l’attitude de certaines banques qui refusent des prêts.

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Comment jugez-vous la situation actuelle pour les entreprises ?

La situation est paradoxale. D’énormes moyens ont été mis en place avec le chômage partiel, le report de charges et les aides en trésorerie pour soutenir et maintenir en vie les entreprises. Le confinement est une nécessité sanitaire mais la crise est reportée. Aujourd’hui on est vraiment devant une bombe  économique à retardement. Son ampleur risque d’être d’autant plus forte que la reprise de l’activité sera lente.

Donc aujourd’hui, la priorité doit être de permettre la reprise de l’activité économique même a minima. Sinon beaucoup d’entreprises n’y survivront pas.

L’association DEV'UP Centre-Val de Loire qui accompagne les entreprises régionales en appelle toutes les semaines plus de 1500. Et chaque semaine, entre 15 et 20 % des chefs d’entreprises nous disent être dans une situation critique en matière économique et de trésorerie, et s’interroger sur la pérennité de leur activité.

Or, elles ont aujourd’hui de vraies difficultés à avoir accès au prêt garanti par l’Etat auprès de leurs banques. Ce n’est pas acceptable objectivement.

Que reprochez-vous aux banques ?

Il y a un pacte initial : les banques distribuent le prêt garanti par l’Etat. Il faut rappeler que ce prêt est garanti à 90% par l’Etat donc les banques ne prennent aucun risque ou très peu. C’est une distribution qui doit être quasi automatique, et je pèse mes mots. Les banques jouent globalement le jeu. Mais ce pacte n’est qu’imparfaitement respecté pour des entreprises dont la trésorerie est fragile, dites en difficulté. Il y a toujours 15% de refus par les banques et il faut de nombreux allers-retours y compris auprès de la Banque de France pour essayer de trouver des solutions. Aujourd’hui pour la région Centre-Val de Loire, il y a 129 dossiers sur le bureau du médiateur du crédit.

En fait, un certain nombre de banquiers disent qu’il ne faut pas aider ces entreprises qui étaient déjà fragiles avant la crise du Covid-19. Je n’accepte pas ce discours-là. Les entreprises dont la trésorerie était fragile avant le confinement ont, dans un certain nombre de cas, investi en 2017-2018, ce n’est pas une raison pour les enterrer aujourd’hui.

Rien que les entreprises notées 6 à la Banque de France (c’est-à-dire juste avant celles notées 7 et 8 qui sont généralement en redressement judiciaire), elles représentent en Centre-Val de Loire 3 milliards € de chiffre d’affaires et 1.200 entreprises, dont 300 PME, c’est-à-dire beaucoup d’emplois.

Mais il y a une bonne nouvelle : ce mardi après-midi, les banques viennent de s'engager à réexaminer l'ensemble des refus rapidement pour ces entreprises en difficulté, et pour celles en sortie de redressement judiciaire.

Pour aider les petites entreprises de la région, vous avez créé un fonds baptisé Renaissance. A quoi va-t-il servir ?

Aujourd’hui, vous avez beaucoup d’entreprises qui arrivent à avoir des prêts en trésorerie mais qui ont beaucoup plus de mal à avoir des prêts en investissement. Or, la reprise économique va nécessiter des investissements : il va falloir acheter des masques, acheter des équipements de protection, reconstituer les stocks.

Là, ce type de prêt n’est pas garanti par l’Etat et les banques sont beaucoup plus frileuses. C’est pour cela que notre Fonds Renaissance est axé sur la trésorerie et les investissements nécessaires au redémarrage.
La région Centre-Val de Loire crée un fonds Renaissance publié par france3centre
L’idée est de cibler les entreprises :
  • de moins de 20 salariés
  • qui n’ont pas eu accès au fonds d’indemnisation ou pour lesquelles celui-ci ne suffit pas
  • qui n’ont pas accès au prêt garanti par l'Etat car elles ne sont pas assez grosses.
L’idée, c’est d’apporter 8 à 10 millions d’euros et de sauver 1000 entreprises qui ont peu de trésorerie et ont donc peu accès aux prêts bancaires.

La clé aujourd’hui, c’est de permettre le plus rapidement possible la reprise de l’activité économique. C’est un enjeu crucial pour le pays. Plus la reprise économique sera lente, plus on aura la certitude d’avoir des centaines de milliers de chômeurs à la fin de l’année.

*Harold Huwart brigue par ailleurs le fauteuil de maire à Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir).
 
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