PORTRAIT. "J'aime les auteurs, et les victimes", Catherine Sorita-Minard la nouvelle procureure de Tours

Catherine Sorita-Minard prend la suite de Grégoire Dulin, à la tête du parquet de Tours. Elle raconte son parcours, pendant lequel elle a notamment travaillé pour l'antiterrorisme.

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"Je n'aime pas le terme de vocation, c'est un choix réfléchi", Catherine Sorita-Minard fait partie de ceux qui pensent leurs décisions. Pourtant, c'est un peu "par hasard" qu'elle découvre le rôle de procureur, qu'elle ne connaissait pas en arrivant à l'école de la magistrature.

De stages en expériences, c'est finalement une opportunité de parquetière qui s'ouvre à elle. C'est ainsi qu'elle devient substitute du procureur d'Evry."J'ai adoré" se souvient-elle. Il aurait pu en être autrement, "le métier de juge d'instance me plaisait beaucoup, c'est aussi la justice du quotidien".

Magistrate du parquet et humanité

Plusieurs dizaines d'années plus tard, si elle aime toujours autant se lever pour requérir, c'est justement parce qu'elle estime sa fonction particulièrement humaine.

Il faut aimer tout le monde, les auteurs et les victimes. Aimer nos partenaires aussi. Je souhaite participer à mon petit niveau à restaurer un lien de confiance.

Catherine Sorita-Minard, procureure de Tours

Après plusieurs parquets nationaux, Catherine Sorita-Minard arrive de Colmart pour prendre la suite de Grégoire Dulin, à la tête du parquet de Tours. En poste depuis fin juin, c'est le 6 septembre 2023 qu'elle a officiellement été installée en audience protocolaire.

Retour en région Centre-Val de Loire

"Je ne suis pas du tout déçue ni blasée" affirme-t-elle. "J’arrive avec beaucoup énergie et suis encore en phase de rencontres. J’entends plein de choses. Il faut que je prenne la mesure des problématiques et spécificités de ce territoire."

La quinquagénaire est de retour dans sa région natale. C'est bien le Centre-Val de Loire qui l'a vu naître, en 1969, en Eure-et-Loir.

C'est là-bas qu'elle se construit, jusqu'aux études supérieures. Pour cela, elle rejoint la capitale. Après l'école de la magistrature, elle entre donc au parquet d'Evry en tant que substitute du procureur. Se succèdent ensuite Nanterre et Paris.

Le pôle financier (avant la naissance du Parquet National Financier, NDLR), l'amène notamment à travailler sur les emplois fictifs de la mairie de Paris.

Finances, cybercriminalité et antiterrorisme

En 2008, elle intègre la section antiterroriste. Catherine Sorita-Minard voit alors passer diverses formes de terrorisme : "L’islamisme radical, mais aussi le PKK en Turquie, l'ETA qui avait une zone de repli au Pays basque en France, et le terrorisme Corse."

C'est ensuite à Colmart qu'elle devient procureure de la république pour la première fois, puis elle prend ses fonctions à Tours à l'été 2023.

Mon souhait a toujours été de rester généraliste. J’apprécie d’être dans un tribunal pour être en proximité avec les problématiques quotidiennes de la population.

Catherine Sorita-Minard, procureure de Tours

Parmi ses chevaux de bataille, les violences intrafamiliales et conjugales, "il y a encore beaucoup de choses à faire" reconnaît-elle avant de poursuivre : "Dans le couple, il faut une égalité et le respect".

Environnement et violences faites aux femmes

Les questions environnementales sont aussi au centre de ses préoccupations, "c’est notre avenir et l’avenir de nos enfants". Tours est en effet devenu "pôle régional environnement", ce qui devrait amener la juridiction à traiter plus de dossiers en lien avec ces problématiques, "il me tient à cœur de pouvoir être efficace avec les moyens qu’on nous donne".

Une considération qui fait écho au jugement de cinq jeunes militants du collectif "Dernière Rénovation", par le tribunal correctionnel, après avoir recouvert la façade de la préfecture de Tours de peinture orange.

Ils ont chacun écopé de 1 000 euros d'amende, et avaient plaidé la nécessité de leur action face à un immobilisme du gouvernement français sur les questions climatiques. Leur cœur de cible : la rénovation des habitats énergivores.

"Ma légitimité c’est la loi" affirme la quinquagénaire, qui se pose contre toute action illégale : "Évidemment, le souhait de préserver l’environnement, c'est noble mais les actions doivent s’inscrire dans les limites de la loi."

Rentrée difficile au tribunal de Tours

Au tribunal de Tours, la rentrée 2023 a été synonyme de grands changements de têtes dans les effectifs. Deux substitutes sont parties, ainsi que deux juges, présidentes, qui ne seront pas remplacées.

Les bras manquent, alors l'annonce du ministère de la justice, d'un plan de recrutement de magistrats, greffiers et attachés de justice est une bonne chose, aux yeux de Catherine Sorita-Minard, "mais on aurait besoin de plus" prévient-elle.

"Il y a une grande attente des citoyens de la justice", et dans le même temps, une large méconnaissance du rôle de chacun dans l'institution à ses yeux. "On nous demande (procureurs et substituts, NDLR) d’être présents sur de plus en plus de sujets. Nos missions augmentent, le recours à la plainte augmente aussi. Il faut que nos effectifs évoluent en conséquence".

La magistrate du parquet de rappeler "notre cœur de métier, c'est quand même direction enquête et réquisitions d'audience". C'est d'ailleurs là que les citoyens pourront la voir le plus souvent : dans une salle d'audience, debout, en train de demander une peine au nom de la société.

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