A l'institut de recherche sur la biologie de l'insecte de Tours, des scientifiques ont prouvé que le glyphosate affecte aussi le développement des moustiques. Cette étude, publiée dans une prestigieuse revue internationale, a de quoi nous inquiéter. Reportage.
L'étude de Fernando Mordi Guerrieri a été publiée en 2018 dans la prestigieuse revue "Journal of experimental biology".
Le neurobiologiste a prouvé que les effets du pesticide ne se limitaient pas, comme l'affirmaient ses fabricants, aux seule végétaux. Le glyphosate affecte le développement du moustique.
"Quand on élève une larve de moustique avec une dose de glyphosate équivalente à ce qu'on peut trouver de manière résiduelle sur le terrain, on voit que la larve de moustique n'a plus sa capacité d'apprentissage."
Comment savoir si un moustique est affecté dans son développement?
Dans son laboratoire de l'Irbi ( Institut de recherche sur la biologie de l'insecte) de Tours, Fernado Guerrieri a reconstitué l'espace naturelle de développement d'une larve de moustique. Elles évoluent dans l'eau avec un mécanisme qui leur fait de l'ombre. Comme une feuille qui passerait au-dessus d'elles." Les larves de moustique sont des animaux aquatiques qui ont besoin d'être accrochés à la surface de l'eau pour respirer de l'air mais quand il y a un objet qui bouge au-dessus de la surface, qui projette une ombre, les larves ont la réponse innée de plonger pour éviter le danger potentiel. Mais l'animal ne peut pas rester en apnée longtemps sous l'eau. C'est donc important pour l'animal d'apprendre à reconnaître les vrais dangers. Quand l'objet non dangereux comme une feuille projette plusieurs fois son ombre à la surface, la larve apprend qu'il n'y a pas de danger et arrête de plonger. Ce comportement est modifié en présence de glyphosate", explique le neurobiologiste.
Qu'est ce que cette étude nous dit ?
Cette étude révèle que contrairement à ce que disent les fabricants depuis les années 70, cet herbicide n'agit pas que sur les plantes. On sait déjà qu'il a un effet neurotoxique sur les abeilles qui, exposées au glyphosate ne retrouvent pas leur chemin. On savait aussi qu'il agissait sur le développement des embryons des grenouilles. Cette étude apporte une preuve de plus que le pesticide le plus utilisé a un effet sur le développement des animaux. " Il prouve les effets nocifs du glyphosate sur les animaux. Sur les petits animaux, les effets se voient en quelques jours, sur les grands animaux comme nous, ça se verra à plus long terme. Il nous faudra faire des études cliniques et d'observation sur le terrain chez les humains, pour voir quelles sont les conséquences sur notre santé. Il ne faudra pas juste changer la molécule pour une molécule équivalente mais changer la façon de traiter l'environnement pour préserver la biodiversité. "Le neurobiologiste en appelle au gouvernement : " Je pense que les autorités et ceux qui prennent les décisions devraient notamment faire attention aux études scientifiques, nous les faisons en tant qu'agent du service public dans l'intérêt des citoyens, plutôt que de suivre des recommandations faites par des corporations aux intérêts particuliers".
Reportage de Luc Pérot, François Xavier Mauffrey et Gilles Engels :