À peine adoptée ce 18 novembre, la loi contre la maltraitance animale divise. Certaines associations de protection animale voient le verre à moitié plein quand d’autres regrette le manque d’ambition du texte.
"On est hyper heureux que cette loi soit définitivement passée au Parlement, c’est historique !" Alexandra Morette, la présidente de l'association Code animal, ne tarit pas d'éloges sur le texte dont elle voit l'adoption comme l'aboutissement d'une "longue bataille". "C'est la première fois que la France s’empare réellement du sujet, et impose des interdictions de certaines pratiques."
En effet, la loi visant à lutter contre la maltraitance animale a été adoptée définitivement au Parlement ce 18 novembre 2021. Depuis le renforcement des sanctions en cas de cruauté et de sévices jusqu'à l'interdiction des delphinariums en 2026, en passant par l'interdiction des élevages pour la fourrure, des animaux sauvages pour les cirques itinérants ou encore le renforcement des contrôles pour l’acquisition d’animaux de compagnie, les mesures sont multiples.
C'est l'œil du tigre, c'est le frisson du combat
Pourtant, d'autres associations estiment qu'il n'y a pas lieu de faire cocorico. "Cette loi est bien, bien maigre", déplore notamment Muriel Arnal, présidente de One Voice. "Ce n’est pas assez. On pouvait attendre mieux quand on voit les avancées de nos voisins européens." Et de citer comme exemple l'interdiction des animaux sauvages dans les seuls cirques itinérants, là où nombre de pays européens ont mises en œuvres des interdictions strictes dans tous les cirques. C'est le cas notamment en Belgique, en Angleterre, en Autriche ou encore en Bulgarie, où les animaux sauvages sont purement et simplement interdits dans les cirques.
"On ne peut pas parler de loi de protection animale quand certains cirques peuvent continuer d’exploiter des animaux sauvages !" s'insurge Murien Arnal. "Des tigres et des lions vont rester aux mains de dresseurs qui vont se sédentariser, certains le font déjà." Alors "dire que c'est une grande avancée : non. C'est un premier pas." Sur le front des élevages d'animaux pour leur fourrure, la victoire a aussi un goût amer : "La seule satisfaction est l’arrêt de tous les élevages d’animaux pour en récolter la fourrure et non uniquement les élevages de visons. C’est bien car c’est symbolique au pays de la mode mais, dans les faits, il ne restait plus qu’un seul élevage en France." Enfin, il y a la frustration causée par ce qu'elle perçoit comme un manque de concertation entre le législateur et les associations.
Fais comme l'oiseau
"Tout ce qui a été promis a bien été mis dans la loi, avec plus ou moins de consistance", tempère pour sa part Alexandra Morette, qui salue par exemple la création d'une "liste positive", qui permettra un encadrement plus strict des animaux sauvages détenus par les particuliers. Cette liste établit les espèces animales sauvages dont le maintien en captivité par des particuliers et des professionnels ne met pas en danger leur bien-être, et vise à réguler le juteux marché des espèces sauvages. Mais là encore, les incertitudes persistent. "On ne sait pas exactement sur quels critères vont se positionner les législateurs pour savoir quelle espèce est sur la liste positive et laquelle ne l’est pas", explique Alexandra Morette, qui promet que Code animal va suivre l'évolution du texte de près. Le prochain combat sera maintenant de s'assurer que les pouvoirs publics "font appliquer la loi", et de continuer à faire évoluer la législation : "On aimerait remettre en question la captivité des animaux sauvages dans les zoos, notamment pour les spectacles."
"Combien de temps allons-nous devoir encore lutter ?" déplore Muriel Arnal. "Notre équipe juridique a étudié le texte et, sincèrement, on a peur pour la suite." Mais pour aller au-delà d'une loi que ses militants voient comme de tièdes résolutions parlementaires, One Voice affirme compter "plutôt sur les citoyens que sur la classe politique". "Si les deux tiers des cirques ont arrêté d'exploiter les animaux sauvages", explique-t-elle, ce n'est pas pour obéir à une contrainte juridique, mais tout simplement "parce que les gens n'y vont plus".