Témoignage. Il gravit le Kilimandjaro sans aide médicale pour mieux comprendre son diabète

Publié le Mis à jour le Écrit par Marine Rondonnier

À 25 ans, après avoir parcouru 800 kms au Danemark à vélo, le Blésois Terry Bauet, atteint de diabète de type 1 vient de gravir le Kilimandjaro. Son objectif : collecter des informations sur l'évolution de son diabète pendant un effort physique intense et dans des conditions extrêmes.

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Le pancréas de Terry Bauet ne fonctionne plus. Son diabète de type 1 a été diagnostiqué alors que le jeune blésois avait 8 ans. "Les grosses contraintes sont les crises d'hyperglycémie et d'hypoglycémie. Je les régule avec une pompe à insuline".

Le diabète est contraignant mais ne l'empêche pas de pratiquer le badminton dès l'âge de 9 ans. Depuis, il n'a jamais arrêté. Sportif de haut niveau, le Blésois était classé 89 ème joueur français en 2023. 

"Le diabète me posait tellement de contraintes que je n'arrivais plus à progresser sur le plan sportif. Il fallait que je comprenne mieux mon diabète pour avancer".

Alors il se lance de nouveaux défis. 800 kilomètres à vélo en six jours au Danemark l'an dernier avec deux amis... Et cet été, le Kilimandjaro sans assistance médicale, à 5895 mètres d'altitude. 

Le Kilimandjaro pour comprendre son diabète 

L'éducateur sportif fait un parallèle entre cette ascension et la vie de diabétique qui doit continuellement s'adapter aux activités de tous les jours, aux horaires de travail qui varient, aux repas différents, aux efforts sportifs. 

Il choisit ce défi parce que l'ascension du Kilimandjaro démarre dans une forêt tropicale en milieu humide et se termine avec de la neige à des températures négatives. "L'idée était de voir comment le corps allait s'adapter à l'altitude, au temps de sommeil réduit, aux températures qui chutent et qui remontent et aux différents climats. Il fallait que je trouve un challenge pour comprendre comment le corps d'un diabétique s'adapte."

Se préparer à la fatigue continue 

À Blois, Terry Bauet n'a pas pu se préparer à l'altitude alors il a travaillé sur la fatigue. Je savais que j'allais accumuler de la fatigue les premiers jours et cette fatigue que vous avez les premiers jours, plus vous l'économisez, plus vous allez avoir de l'énergie pour le dernier jour du sommet."

Alors il court beaucoup. Tous les lundis entre 15 à 17 kilomètres. Fatigué, il continue tous les jours à courir. 70 kilomètres par semaine. 

"L'idée était de s'entraîner sous fatigue tout le temps pour voir comment le diabète réagissait à la fatigue continue et voir comment mon corps pouvait encaisser l'effort sur un certain temps". 

Deux semaines avant le grand départ, il se met au repos. Il part le samedi 20 juillet 2024, arrive en Tanzanie le dimanche 21 juillet. Le lundi 22 juillet, à 10h15, il s'engage dans l'ascension du Kilimandjaro avec pour seule assistance la présence obligatoire d'un guide. 

S'il est habitué aux efforts intenses, il n'a jamais marché aussi longtemps, en altitude avec un tel dénivelé. 

Trois étapes en un jour 

Les trois premiers jours de l'ascension se passent bien. Il gère bien l'insuline, l'effort, l'endurance. Puis arrive l'ultime journée. 

"Jusqu'à 4600 mètres d'altitude ça a été. C'est vraiment la toute dernière après-midi qui a été difficile."

Surtout que Terry se permet un challenge dans le challenge.

Le dernier jour, il réalise trois étapes dans la même journée.  Le programme standard prévoit de marcher de nuit pour arriver au sommet au lever du soleil. Mais pas lui...Le jeudi matin, il fait deux étapes d'un coup. "J'allais assez vite et je n'avais pas de symptômes de haute altitude."

En arrivant à midi, il lance au guide sur le ton de la blague : "Et si on faisait le sommet cet après-midi ? Il m'a dit que c'était possible. Au pire, si je n'y arrivais pas, on recommencerait le lendemain."

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À 25 ans, le Blésois Terry Bauet, atteint de diabète de type 1 vient de gravir le Kilimandjaro sans assistance médicale. Son guide filme son arrivée au sommet. ©Terry Bauet-DR

Mais il fallait arriver avant le coucher du soleil histoire qu'il ne fasse pas nuit en arrivant là-haut. La décision est prise en dix minutes. Terry vide son sac. Il ne garde que les choses les plus légères et essentielles. "Je n'avais que des petits gants et pas de pompe à insuline de rechange. Juste de la nourriture et de l'eau." 

Là, il va vivre les 4h45 les plus longues de sa vie.

Les six derniers kilomètres en hyperglycémie 

 "De 4 600 mètres au sommet à 5895 mètres, c'était vraiment super super super dur. Mon médecin m'avait prévenu. L'altitude avec le stress, l'adrénaline et le manque d'oxygène, le corps est en hyperglycémie. Ça n'a pas loupé. J'ai été en hyperglycémie pendant plusieurs heures". 

Les symptômes varient selon les diabétiques. Terry, lui, a très soif et s'énerve très facilement. "C'est comme si j'étais sous pression pendant des heures. Mais il fallait que je canalise ça pour continuer de monter."

Il a tenu comme ça pendant les six derniers kilomètres... soit 4h45. "À plat ce n'est rien mais avec 1300 mètres de dénivelé, c'est énorme".

Il ne cherche plus à comprendre, il monte mètre après mètre en gardant les yeux rivés sur les pieds de son guide. "La gestion du diabète et de l'effort physique a été vraiment très difficile mais je ne regrette pas de l'avoir fait". 

C'est dans cet état d'hyperglycémie qu'il arrive au sommet après quatre jours d'ascension le jeudi 25 juillet à 17h55 au coucher du soleil. "Quand on est là-haut, au-dessus des nuages, on se dit qu'on a réussi. Je ne pensais pas que j'allais pleurer mais si, j'ai pleuré." 

Collecter des données heure par heure

Pendant qu'il gravit le toit de l'Afrique, il note tout dans son petit carnet. "Quand je prenais un médicament pour des maux de tête, ce que je mangeais, combien d'insuline je prenais, combien de temps je dormais, combien de litres je buvais. J'ai tout recensé heure par heure". 

L'objectif : relier ces informations aux différentes courbes glycémiques enregistrées dans son téléphone via les capteurs qu'il avait sur les bras. L'objectif est de mettre en relation les informations recensées et les effets sur les courbes de glycémie.

Ces informations, il va les transmettre à son médecin qui l'a encouragé dans cette aventure. En tant qu'éducateur sportif mais aussi de bénévole dans des associations, il pourra aussi partager son expérience avec d'autres diabétiques pour qu'ils adaptent mieux leur vie et leur pratique sportive à leur diabète. 

Une semaine après son retour en France, Terry Bauet commence à peine à réaliser ce qu'il vient de faire. Il sent que son corps a besoin de se régénérer. L'altitude l'a fortement marqué. Mais il pense déjà à son prochain défi : réaliser un Iron man dans deux ans." C'est mon moteur : je ne l'ai jamais fait alors pourquoi pas le tenter. " 

Avant cela, un nouveau challenge l'attend. Il deviendra papa en novembre prochain. 

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