Le député du Loiret Richard Ramos présentait ce matin sa proposition de loi visant à interdire certains nitrites dans la charcuterie, jugées cancérigènes. Le gouvernement s'en remet aux décisions de l'Anses.
"Ça a été pour nous une belle victoire. Il est important de protéger les français dans des périodes où la démocratie est mis en cause". Ce texte, c'est aussi une tentative pour Richard Ramos, député de la sixième circonscription du Loiret (MoDem), de réconcilier les citoyens avec les urnes en se montrant à leur écoute. Ce mercredi 26 janvier, il a défendu, en commission des Affaires économiques, sa proposition de loi relative à la consommation des produits de charcuterie contenant des additifs nitrés. Son but : les interdire par étapes d'ici à 2025.
Conférence de presse à l'@AssembleeNat sur ma proposition de loi interdisant les nitrites dans la charcuterie. Je continue le combat avec Yuka, @laliguecancer, @foodwatch_fr et mes collègues @B_BessotBallot, @MicheleCrouzet, @VillaniCedric et @PrudhommeLoic #stopnitrites #sante pic.twitter.com/UY5M9WuvUF
— Richard Ramos (@_richardramos) January 18, 2022
Le texte a fait l'unanimité à l'Assemblée nationale puisque "soutenu par des élus de tout bord politique" selon les dires de l'élu. Il sera présenté lors de la niche du groupe en séance dans l'hémicycle (séance mensuelle où des députés peuvent déposer des propositions de loi), le 3 février prochain. A noter qu'avant de prendre une quelconque décision, le gouvernement reste dans l'attente du rapport de l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sur les réels risques que représentent ces nitrites. Rapport qui devait déjà paraître en juillet dernier...
"On regrette certaines incertitudes quant au texte final"
Pourtant, "les preuves scientifiques sont là" selon Emmanuel Ricard, délégué prévention et promotion des dépistages de la Ligue contre le cancer. Il estime que ces nitrites, qui au contact de la viande deviennent des nitrosamines, ce qui donne sa couleur rose au jambon par exemple, seraient à l'origine de 4 000 cancers par an, à la fois du côlon et de l'estomac.
"C'est avéré historiquement que ces conservateurs évitent à la viande de pourrir ou d'être infectée, mais aujourd'hui il y a des processus de fabrication à la fois dans l'abattage, le conditionnement de la viande et la chaine du froid qui font que la donne n'est plus la même". Il redoute désormais que l'interdiction se transforme "en simple baisse de dosage". "On salue le fait que le projet de loi n'ait pas été retoqué, mais on regrette certaines incertitudes quant au texte final". Après consultation, l'article adopté laisse en effet entrevoir un léger flou.
S'il s'en remettra lui aussi aux conclusions de l'Anses, il en va de même pour Fabien Castanier, le délégué général de la fédération professionnelle représentative des industries charcutières, traiteurs et transformatrices de viandes (FICT). "Nous saluons la décision de sagesse du gouvernement d'attendre l'avis de l'ANSES. On entend cette attente des consommateurs de plus de naturalité et les professionnels se sont imposés des seuils inférieurs à la réglementation européenne (100mg par kilos en France contre 150mg fixé par l'ENSA, ndlr)".
Selon lui, les effets des nitrites suspectés par l'OMS, comme quoi la charcuterie serait cancérogène, "n'ont pas été retrouvés avec ces faibles quantités". Qui plus est, le pari parait difficilement tenable pour les PME du secteur. "Le savoir-faire, c'est conserver la viande et éviter le développement des bactéries. Sans nitrite, le produit devient plus fragile et tout le monde n'a pas les moyens d'avoir une salle blanche. Il faudra accompagner la filière dans cette transition".
Une problématique sur la table depuis...2019 !
En 2019 déjà, Richard Ramos proposait, dans le cadre de l'examen du projet de budget de la Sécu, une taxe sur le jambon contenant des nitrites, qui devait s'élever à 10 centimes d'euro par kilo, payée par les industriels. Une proposition qui avait finalement été retoquée en séance publique après des débats houleux sur le poids des lobbies agroalimentaires.
La même année, l'association de consommateur Foodwatch, en partenariat avec l'application Yuka et La Ligue contre le cancer, lançait une pétition en ligne pour réclamer la fin de l'ajout de nitrites dans la charcuterie. "On a récolté plus de 300 000 signatures" constate Camille Dorioz, responsable de campagne de Foodwatch France. "Ça montre qu'il y a une vraie volonté de la part des Français d'avoir une nourriture avec moins d'additifs". A ce jour, 76% de la charcuterie mise sur le marché dans la grande distribution contiendrait des nitrates ou des nitrites.