L'État propose d'indemniser la famille d'Yvan Colonna au titre du préjudice qu'elle a subi à la suite de l'assassinat du détenu insulaire en mars dernier à la centrale d'Arles. La somme globale avoisine les 250.000 euros.
L'État a proposé une indemnisation aux membres de la famille d'Yvan Colonna.
Une somme globale avoisinant les 250.000 euros leur a été soumise afin de réparer le préjudice subi à la suite de l'agression mortelle du détenu corse à la centrale d'Arles en mars dernier. Une décision qui met, pour l'instant, un terme aux poursuites engagées contre l'administration.
"Il est rare que l'administration reconnaisse aussi facilement sa responsabilité, souligne Maître Patrice Spinosi, avocat de la famille d'Yvan Colonna. Cette action devant le juge administratif avait vocation à obtenir réparation et à obtenir l'affirmation que l'État était bien responsable juridiquement de la mort d'Yvan Colonna. Cette responsabilité est aujourd'hui actée par l'État lui-même du fait de cette proposition."
Celle-ci fait suite à une action en responsabilité contre l'État déposée le 6 avril dernier par Me Patrice Spinosi devant le tribunal administratif de Marseille. Dans sa requête, l'avocat avait notamment soulevé que l'agression dont a été victime Yvan Colonna était en lien avec des failles et des dysfonctionnements administratifs. Fin juillet, le rapport de l'enquête interne de l'Inspection générale de la justice (IGJ) avait pointé plusieurs manquements de la part du personnel de la centrale d'Arles.
"Comme c'est la norme, explique Maître Spinosi, l'administration a été au courant de notre recours et, plutôt que d'aller à une condamnation devant le tribunal administratif, elle a fait une proposition d'indemnisation avec un certain nombre de sommes qu'elle a proposées de verser plutôt qu'elles ne soient imposées par le tribunal."
En effet, depuis une loi de 2009, l’État est systématiquement "tenu de réparer le dommage résultant du décès d’une personne détenue causé par des violences commises au sein d’un établissement pénitentiaire par une autre personne détenue".
8 requérants, 8 propositions
Cette proposition d'indemnisation n'est pas unique. En effet, elle est faite à chacun des membres de la famille du détenu corse condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac.
Les requérants sont au nombre de huit : les parents d'Yvan Colonna, son frère, sa sœur, ses deux enfants, ainsi que son épouse. "Une action a également été déposée au nom d'Yvan Colonna lui-même, précise l'avocat de la famille. Elle est aujourd'hui portée par ses ayants droit, à savoir ses deux enfants et sa femme."
Au total, la somme globale concernant ces huit propositions avoisine les 250.000 euros. "Cette offre d'indemnisation est globalement supérieure aux tarifs habituellement donnés par les juges administratifs, estime Patrice Spinosi. Il est certain qu'elle répond à ce que l'on pourrait espérer avoir. Donc, il appartiendra à chacun de se décider en considération de cette proposition."
Désormais, chaque membre de la famille est libre d'accepter ou pas la somme qui lui a été proposée.
"Il y aura selon la volonté des uns et des autres une poursuite de la procédure devant le tribunal administratif ou une acceptation de l'indemnisation proposée par l'État, détaille Me Spinosi. Désormais, les différentes demandes sont examinées par les membres de la famille. Certains veulent accepter, d'autres sont encore hésitants. Reste à savoir s'il y aura plus à gagner à poursuivre devant le tribunal administratif et c'est la réflexion qui est actuellement en cours. Les choses vont se mettre en place dans le semaines à venir."
D'autres procédures en cours
Si cette proposition d'indemnisation met pour l'instant un terme aux poursuites administratives engagées contre l'État, elle n'annule cependant pas toutes les autres procédures en cours concernant l'assassinat d'Yvan Colonna.
"Il faut bien comprendre que cette procédure administrative est uniquement une procédure en responsabilité contre l'État concernant les dommages subis par les membres de la famille, souligne Me Spinosi. Cette action vise à indemniser leurs dommages mais ne retire absolument pas les autres actions qui sont actuellement pendantes."
Pour rappel, la famille Colonna s'est constituée partie civile dans le cadre de l'instruction diligentée contre l'assassin présumé d'Yvan Colonna. "Cette procédure a vocation à faire la lumière sur les circonstances de ce crime, précise Maître Spinosi. Evidemment, la famille attend aussi beaucoup des différentes commissions parlementaires qui sont en cours et qui devraient permettre d'avoir plus d'informations sur ce qui s'est exactement passé à la centrale d'Arles."
Enquête parlementaire
Ce mercredi 9 novembre, la commission des lois de l'Assemblée nationale s'est d'ailleurs réunie pour désigner un rapporteur sur la recevabilité de la proposition du député Jean-Félix Acquaviva et d'autres parlementaires. Celle-ci concerne "la création d'une commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l'administration pénitentiaire et de l'appareil judiciaire" ayant conduit à l'assassinat du détenu corse.
C'est Caroline Abadie, députée de la 8e circonscription de l'Isère et présidente du groupe d'études Prisons et conditions carcérales à l'Assemblée nationale, qui a été nommée.
La recevabilité de la commission d'enquête sera quant à elle examinée le 23 novembre prochain.