La délibération du Syvadec en vue du financement du centre de tri de Monte fait l'objet d'un recours devant la justice administrative. L'action a été engagée par l'Office de l'Environnement. De plus, l'implantation du centre doit être réétudiée en raison de la présence sur le site d'une infrastructure appartenant à l'Office d'Équipement Hydraulique.
Il pourrait bien s'agir d'un nouveau rebondissement dans l'épineuse problématique du traitement des déchets en Corse : la délibération concernant le financement du futur centre de tri de Monte est-elle légale ?
Prochainement, le tribunal administratif de Bastia pourrait avoir à se prononcer sur cette question.
Dans une lettre - que France 3 Corse a pu consulter -, le Syvadec, qui porte le projet du centre, a proposé à l'Office de l'Environnement de la Corse (OEC) de retirer son recours au tribunal administratif dans le cadre d'un protocole transactionnel.
Pour rappel, l'OEC est en charge de la mise en œuvre du plan territorial de prévention et de gestion des déchets (PTPGD). Présenté en février 2021 à l'Assemblée de Corse, ce document est notamment contesté par plusieurs associations qui demandent son retrait. Reporté à plusieurs reprises, le vote du plan n'a pas encore été soumis aux conseillers territoriaux. La date de l'examen du texte dans l'hémicycle du cours Grandval n'est pas encore fixée.
Déplacement de canalisation
Ces derniers mois, Gilles Simeoni s'est opposé au projet de Monte, évoquant notamment des "conséquences financières désastreuses pour les contribuables" et "une trajectoire budgétaire insoutenable pour les intercommunalités".
En août dernier, le président de l'exécutif avait envoyé au Syvadec un recours gracieux afin de solliciter le retrait de la délibération prévoyant le financement du centre de tri. Faute d'avoir obtenu ledit retrait, ce recours gracieux s'est donc désormais transformé en recours devant la justice administrative.
Le reportage de Marie-France Giuliani, Paul Salort et Typhaine Urtizverea :
À Monte, le maire de la commune ne semble pas inquiet par cette action en justice introduite par l'Office de l'Environnement. Selon Jean-François Mattei, cela n'aura pas d'incidence sur le calendrier des travaux.
"Le permis de construire va être déposé la semaine prochaine", indique l'édile, également vice-président du Syvadec.
Cependant, sur le terrain choisi pour accueillir le centre, quelques embûches subsistent. Notamment une canalisation appartenant à l'Office d'Équipement hydraulique de Corse (OEHC).
Installée entre mars 2022 et janvier 2023 sur cette parcelle classée espace stratégique agricole (ESA), cette infrastructure ne pourra plus être déplacée.
"À un moment donné, ils ont mis une ventouse et au lieu de la déplacer de deux mètres, ils l'ont déplacée de cinq, explique Jean-François Mattei. On est donc obligé de faire riper le centre de tri. Il faut le déplacer vers le nord. Après, la parcelle fait cinq hectares ; c'est juste qu'il a fallu prévoir un plan B."
Ce déplacement de la structure induit un surcoût que le Syvadec a chiffré à 1,7 million d'euros.
Surcoût
Concernant cette ancienne canalisation, l'Office d'Équipement Hydraulique (OEHC) dit avoir respecté l'emplacement et les autorisations prévues depuis 2020. En effet, cette infrastructure a été déplacée en vue du déploiement du réseau ferroviaire entre Casamozza et Vescovato.
"L'ancien tracé de la canalisation de l'Office se trouvait sous l'emprise des Chemins de Fer de la Corse, explique Ange De Cicco, directeur de l'OEHC. Pour la sécurité des biens et des personnes, la canalisation ne pouvait pas rester à cet endroit-là ; elle a été déplacée avec l'ensemble des intervenants. Les propriétaires du terrain étaient informés que nous avions fait une demande auprès des services de l'État pour avoir une servitude d'utilité publique qui définit l'emplacement de cette canalisation. À ce titre, on a un arrêté préfectoral de décembre 2020 qui vient le consolider."
L'État et le Syvadec s'attendent à prendre en charge le surcoût engendré par la présence de cette nouvelle canalisation.
Désormais, le projet du centre de tri s'élève à 70 millions d'euros.
Conséquences : les contributions des communes adhérentes au Syvadec pourraient de nouveau augmenter. La Collectivité de Corse envisage une aide. Pour l'heure, tout cela est en cours de transaction.
Au cœur de celle-ci, il y a surtout la sempiternelle question du coût du traitement des déchets. Faute de filière de tri implantée en Corse, le transport maritime vers le continent, ainsi que les phases préalables de conditionnement pèsent lourdement sur les factures des intercommunalités adhérentes au Syvadec.
Actuellement, le Syvadec le reconnaît dans sa lettre envoyée à l'OEC, "les surcoûts de flux de tri liés à l'insularité induisent notamment un coût de traitement des emballages 2,2 fois plus élevé que les ordures ménagères résiduelles". En clair, cela coûte deux fois plus cher de trier que d'enfouir...