Témoignages. "L'une des journées les plus longues de ma vie" : jusqu'à 20h de voyage pour rentrer, la galère des passagers d'un vol EasyJet Lisbonne - Bastia

Publié le Écrit par Axelle Bouschon

La compagnie aérienne low-cost EasyJet inaugure cette année une nouvelle liaison aérienne directe entre Bastia et Lisbonne. Problème : en raison d'un mouvement de grève, les vols prévus samedi 1er avril ont été annulés de dernière minute, engendrant de nombreuses difficultés pour les passagers corses bloqués au Portugal.

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Une fin de séjour dont ils se seraient volontiers passé. Fin décembre dernier, Chloé et ses amis apprennent avec joie l'annonce d'une nouvelle ligne directe Bastia-Lisbonne, assurée par la compagnie EasyJet, à raison de deux vols par semaine, et opérante de la fin du mois de mars à celle du mois d'octobre prochain.

Ravis de pouvoir découvrir le Portugal, pays qu'ils n'avaient jamais eu l'occasion de visiter, la bande de copains réserve aussitôt ses places sur le vol inaugural, le 29 mars au départ de l'aéroport Bastia-Poretta, pour un retour annoncé le 1er avril dans la matinée. 

Un petit retard d'une heure quarante mis à part - "nous étions censés partir à 11h05 et nous avons décollé vers 12h40" -, l'aller se déroule sans accroc, et les amis profitent de leur voyage dans la ville blanche. Une agréable parenthèse qui se conclut malheureusement bien amèrement : leur vol retour est annulé.

Nous avions tous l'application EasyJet sur nos téléphones, et aucune perturbation ne nous avait été indiquée la veille.

"Nous devions décoller à 5h55. Nous avons donc quitté notre Airbnb à 4h15 pour être sûrs d'être en avance. Nous avions tous l'application EasyJet sur nos téléphones, et aucune perturbation ne nous avait été indiquée la veille." Une fois arrivé, ils découvrent que leur vol est retardé d'une heure. Le groupe prend son mal en patience, et se rend jusqu'à la porte d'embarquement, en compagnie des autres passagers du vol - 90 personnes au total -.

"Et c'est là qu'on apprend par SMS que ce ne sera pas finalement un simple retard, mais que notre vol est tout simplement annulé", soupire Chloé. En cause, apprend-elle : une grève des personnels de cabine de la compagnie aérienne, dénonçant leurs conditions de travail.

Pas de personnels, peu d'informations

Cette grève, Chloé et ses amis en avaient bien entendu parler la veille de leur départ pour Lisbonne. "On avait reçu le mardi sur l'application EasyJet un message nous indiquant qu'un mouvement de grève était annoncé du 1er au 3 avril, et que cela pouvait affecter certains vols en partance et à destination du Portugal."

"Mais quand nous avons demandé au personnel avant de partir si ça allait aller, ils nous ont indiqué que très souvent, EasyJet "casse" la grève en faisant appel à du personnel et des pilotes d'autres pays, comme d'Espagne ou d'Italie, et qu'il ne devrait donc pas y avoir de problèmes, poursuit-elle. Nous n'étions donc pas trop inquiets."

Les passagers du Lisbonne-Bastia tentent alors d'obtenir des renseignements auprès de membres de la compagnie aérienne sur les solutions alternatives qui peuvent leur être proposées. Et se trouvent confrontés à une nouvelle difficulté : "Il n'y avait personne de présent, juste une femme qui était toute seule, et nous a tous distribué un papier anglais où il était indiqué que nous devions regarder la marche à suivre sur l'application d'EasyJet."

Mauvaise surprise là encore : le prochain vol direct disponible de la compagnie ne décolle pas avant le 5 avril, soit quatre jours plus tard. "Avec le travail, et nos occupations respectives planifiées, ce n'était tout simplement pas envisageable. Cela, plus les coûts supplémentaires", souffle Chloé.

Un billet 4,5x plus cher que l'aller-retour réservé

La jeune femme et ses amis décident donc de chercher par leurs propres moyens une solution de retour. Seule façon de retrouver la Corse le samedi même : un vol Air France avec correspondance à Paris. Coût du billet retour par personne : près de 850 euros. Soit plus de 4,5 fois plus cher que le prix de l'aller-retour qui devait être assuré par EasyJet, pour lequel ils avaient chacun déboursé autour de 180 euros.

La facture est salée, mais faute de meilleure solution, et faute d'avoir réussi à joindre le service client d'EasyJet, "ce sont des répondeurs automatiques, on ne peut jamais parler à quelqu'un de réel", s'agace Chloé, les amis prennent leurs billets de dernière minute et se précipitent pour prendre leur nouveau vol. "Heureusement, nous avons vite réagi, le vol se trouvait dans le même terminal, et il partait en retard. Faute de quoi nous l'aurions aussi loupé."

En tout et pour tout, nous avons fait plus de 20h de voyage, contre les 2h40 de trajet prévues, pour rentrer à Bastia.

Le calvaire n'est pas pour autant terminé pour le groupe : débarqué à l'aéroport Charles de Gaulle, il se rend ensuite à celui d'Orly, et récupère enfin sa correspondance vers Bastia. Heure finale d'arrivée : 20h45 environ. Soit plus de 11h après l'heure indiquée sur tout premier billet d'avion, 9h30.

"Ce qui fait qu'en tout et pour tout, nous avons fait plus de 20h de voyage, contre les 2h40 de trajet prévues, pour rentrer à Bastia. C'était l'une des journées les plus longues de ma vie. À ce prix, et vu le temps que nous y avons passé, j'aurais mieux fait de traverser l'Atlantique", ironise la jeune femme.

Quatre nuits supplémentaires réservées

Tous les autres passagers du vol n'ont pas choisi la même option que Chloé et ses amis. Partie avec son compagnon, Marie-Jo a elle fait le choix de rester sur place, à Lisbonne, jusqu'au 5 avril. À leurs frais.

Si une fois leurs billets modifiés, l'application EasyJet leur a bien proposé une nuit d'hôtel remboursée pour les passagers lésés, "c'était à l'hôtel de l'aéroport, et cela ne nous donnait pas vraiment envie. On ne sait pas vraiment si les autres nuits derrière auraient été remboursées, mais on a préféré dans tous les cas retourner en centre-ville pour regarder si nous pouvions facilement nous reloger."

Le couple parvient à louer un appartement, à raison de 300 euros pour quatre nuits supplémentaires. "Je n'avais pas d'obligations, donc ce n'était pas vraiment un souci pour moi. Mais mon compagnon, lui, a dû téléphoner à son lieu de travail pour demander à rallonger ses congés."

On voyait des personnes âgées qui ne savent pas forcément bien manier internet qui cherchaient des comptoirs AirFrance, qui ne savaient pas trop comment faire.

Si Marie-Jo et son compagnon s'accommodent finalement "plutôt bien" de la situation, "le matin même, nous étions quand même assez énervés d'être livrés ainsi à nous-même, en ayant peu dormi, et sans informations claires", certains passagers ont pu avoir de plus grandes difficultés.

"On voyait des personnes âgées qui ne savent pas forcément bien manier Internet qui cherchaient des comptoirs AirFrance, qui ne savaient pas trop comment faire, se souvient Chloé. Pour eux, je pense que ça a été plus compliqué encore."

"Au final, nous étions tous si désabusés que tous les passagers se sont dispersés dans tous les coins de l'aéroport. Il n'y a pas eu de solution collective qui a été décidée", raconte Marie-Jo.

L'indemnisation en question

Ni Chloé et ses amis, ni Marie-Jo et son compagnon n'ont aujourd'hui l'assurance de pouvoir être remboursés des frais supplémentaires qu'ils ont été contraints d'avancer. 

"J'ai regardé un peu la législation, mais cela reste assez flou pour le moment", admet Chloé. Le site d'EasyJet indique bien la possibilité de remboursement en cas d'annulation d'un vol, ainsi que l'indemnisation du réacheminement "dans des conditions de transport comparables à l'aéroport de destination finale dans les meilleurs délais".

Un droit à dédommagement cependant soumis à plusieurs conditions, qui peut de fait être retoqué, indique la compagnie aérienne, si cette annulation découle de "circonstances extraordinaires qui ne peuvent être évitées même si toutes les mesures raisonnables ont été prises. Ces circonstances peuvent inclure (mais sans s’y limiter) le contrôle du trafic aérien, la météo, les troubles civils, les alertes terroristes et les alertes de sécurité, les grèves et les défaillances imprévues pouvant affecter la sécurité des vols."

"On va faire au mieux pour se faire rembourser", insiste Chloé. Marie-Jo et son compagnon comptent eux aussi apporter la facture de leur logement pour ces journées supplémentaires, en espérant être indemnisés.

EasyJet, c'est fini pour moi. Maintenant je partirais avec AirCorsica, et puis c'est tout.

Remboursement et indemnisations ou non, Chloé est toutefois d'ores et déjà catégorique : "EasyJet, c'est fini pour moi. Maintenant je partirai avec AirCorsica, et puis c'est tout. Ce 1er avril était l'une des journées les plus longues de ma vie, ça en paraissait presque irréel. Je conseillerai aux gens qui vont partir derrière nous avec cette compagnie de vraiment se méfier."

    Contacté, le service client d'Easyjet n'a à cette heure pas pu être joint.

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