Territoriales 2021 en Corse : comment les réseaux sociaux sont devenus un outil de campagne électorale indispensable

La campagne des élections territoriales prévues les 20 et 27 juin en Corse s'organise sur le terrain mais aussi et plus que jamais en ligne. Les réseaux sociaux sont devenus un outil indispensable dont les dix listes se sont emparées, à des échelles différentes. 

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Dix listes et autant de comptes Twitter, Facebook, Instagram. Ou presque. A un mois des élections territoriales en Corse, la campagne se joue sur le terrain mais également sur les réseaux sociaux. 

Et pour cause. La crise du Covid-19 impose des règles sanitaires strictes bannissant pour l'instant les rassemblements de plus de 10 personnes. Oubliés les meetings, réunions publiques et autres rendez-vous dans les permanences. 

Les têtes de listes en sont toutes conscientes : il faut miser sur le digital. Mais si certains l'ont déjà intégré depuis longtemps, d'autres tâtonnent encore. Et tout le monde ne bénéficie pas de la même audience. 

David contre Goliath

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Quand Gilles Simeoni, tête de liste "Fà Populu Inseme", totalise près de 58.000 abonnés sur Facebook, d'autres ne dépassent pas le millier, à l'image d'Agnès Simonpietri de la liste Ecologia Sulidaria ou de Michel Stefani, tête de liste PCF "Campà Megliu in Corsica"

Il y a les têtes d'affiche, personnages bien installés dans le paysage politique corse, et ceux moins connus, dont la notoriété numérique est nécessairement moindre ou du moins, en construction. Ainsi, pour Sébastien Quenot, directeur des relations presse de Jean-Guy Talamoni pour la liste "Fà Nazione", cette campagne sur les réseaux sociaux "est un peu biaisée".

Fort de cette notoriété, le président du conseil exécutif de Corse Gilles Simeoni fait toutefois campagne via sa page personnelle, sur laquelle n'est pas inscrite sa fonction actuelle. 

Du côté de la liste d'Agnès Simonpietri, la campagne se joue davantage sur la page d'Ecologia Sulidaria. La tête de liste n'a pas à ce jour de Twitter personnel ni de page publique sur Facebook. La liste de Michel Stefani a quant à elle lancé son site internet il y a quelques jours. 

Les réseaux sociaux comme relai 

Si tous les candidats ne partent pas à armes égales en terme d'audience, les réseaux sociaux restent un canal de diffusion privilégié pour chaque liste. 

Du côté de l'équipe de campagne de Laurent Marcangeli, tête de liste "Un Soffiu novu", le fait n'est pas nouveau mais prend d'avantage de place cette année : "C'était déjà indispensable pour toucher un maximum de public lors des précédents scrutins"

"Le coeur du dispositif, c’est le site internet ou tout est répertorié et alimenté très régulièrement. Les réseaux sociaux nous servent surtout à décliner le projet, à relayer. C'est un canal de diffusion avec une audience intéressante", explique Sylvia Hugon, chargée de la communication de la campagne de Laurent Marcangeli. 

"Les réseaux permettent de sonder les réactions, à la fois de nos militants mais pas que, explique-t-elle. On tient compte des réactions, des commentaires. Cela nous permet d’avoir un ressenti général".

Chez les écologistes, le site internet est également au coeur de la campagne, alimenté quotidiennement par "du contenu de fond, des articles, des tribunes, des témoignages de personnes qui nous ont rejoint, des ambassadeurs, des gens qui s'investissent au quotidien".

Les réseaux permettent de partager ces articles et de rallier éventuellement des sympathisants. "Suite au partage, des gens nous ont rejoints", témoigne Leslie Pellegri, directrice de campagne de la liste Ecologia Sulidaria.

"C'est un moyen de toucher l'électorat de façon ciblée via des thématiques, des vidéos, des interviews", ajoute-t-on du côté de Gilles Simeoni.

Pour l'équipe de campagne de Jean-Charles Orsucci, tête de liste "Corse, terre de progrès" soutenue par LREM, les réseaux sociaux occupent une place incontournable : "On a investi sur une stratégie offensive qui va monter en puissance jusqu'au scrutin. On mise sur tous les canaux sociaux pour toucher la cible la plus large possible".

Près de la moitié du budget de la campagne de Jean-Charles Orsucci est consacrée à la communication numérique. Le candidat mise également sur la mobilisation des internautes qui le suivent. "On demande à notre team d'être actifs et proactifs", explique son équipe. 

Les formats vidéo live privilégiés

Outre les articles de presse partagés, et autres publications écrites, les listes utilisent les réseaux sociaux pour diffuser des vidéos, en live ou en différé.

Citons par exemple la présentation de la liste de Jean-Guy Talamoni en live sur Facebook, ou encore le prochain débat culture qui est prévu début juin sur le Facebook d'Ecologia Sulidaria.

La communication de Laurent Marcangeli privilégie la vidéo pour "recréer un lien de proximité" et partage notamment des reportages des divers déplacements du candidat.

Enfin, le réseau social peut permettre de répondre "à des attaques ou incohérences", évoque Filippo de Carlo, de la liste de Jean-Antoine Giacomi "Forza Nova", qui se qualifie de souverainiste et chasse sur les terres de la droite extrême. 

Facebook, Twitter... Instagram ? 

Si Facebook et Twitter sont les deux réseaux sociaux les plus utilisés par les candidats aux prochaines élections territoriales, Instagram est également privilégié par certains. Gilles Simeoni a notamment créé mi-mai son compte personnel. Il se présente dans sa biographie sous les deux casquettes : président du conseil exécutif et candidat aux territoriales. Cinq jours et trois publications plus tard, il atteint déjà 500 abonnés. 

L'équipe de Laurent Marcangeli a misé sur un Instagram personnel, celui du candidat et non celui de la campagne. "Il y a ce côté personnel que l'on trouve intéressant"

Chez les écologistes, certains membres de l'équipe, les plus jeunes, ont commencé à faire des sondages et des stories. 

D'autres, à l'inverse, n'ont pas ou pas encore investi le terrain d'Instagram, dont l'audience est pourtant plus jeune que celle de Facebook et Twitter. C'est par exemple le cas de la liste de François Filoni, "Les nôtres avant les autres", soutenue par le Rassemblement National. 

Quant à Snapchat et TikTok, ils ne semblent pas faire partie des outils privilégiés pour cette campagne 2.0.

Un impact à relativiser 

Bien qu'ils jouent un rôle important dans cette campagne atypique, les réseaux sociaux ne remplacent pas les autres moyens de communication. "On fait quand même du print, relativise Sylvia Hugon de l'équipe de Laurent Marcangeli. On ne peut pas s’en priver car on a certaines catégories de population qui n’ont pas envie ni accès au digital". Sans oublier le contact humain, mis à mal ces derniers temps en raison de la crise sanitaire. La campagne de terrain est certes amoindrie mais n'a pas dit son dernier mot.

"Les réseaux ne remplacent pas le contact physique, note Michel Stefani. Cela complète. De notre côté, on mise aussi sur une campagne de proximité.

"Notre tête de liste est attendue dans tous nos villages", affirme-t-on du côté de la liste "Fà populu inseme" de Gilles Simeoni. "Les réseaux sociaux font partie d’une stratégie mais il ne faut pas tomber dans la surenchère. Ne pas inonder les réseaux de messages qui deviendraient illisibles et contre productifs".

Qui dit réseaux sociaux dit également exposition aux commentaires et aux critiques. Filippo de Carlo, président de Forza Nova, s'y est accoutumé : "Il faut savoir accepter de se faire lyncher parfois. Au début, je n’en dormais pas la nuit.  Mais avec le recul, ça ne me touche plus. Je le prends avec dérision"

"Il faut relativiser l'impact des réseaux. C'est un indicateur mais ce n'est pas forcément là que tout se joue, estime Sébastien Quenot. C’est un point d’appui, ça reste limité. Les grands candidats ont une forte audience par rapport aux autres". 

Pour lui, la "bataille" des réseaux sociaux se joue davantage entre les candidats nationalistes que face aux autres. Car contrairement aux dernières élections, quatre listes nationalistes sont présentées.

Les réseaux sociaux vont-ils permettre de convaincre des abstentionnistes ? La question reste entière. "Je ne suis pas certain que l'on touche les personnes qui sont  hors du champ politique", estime-t-il. A cela s'ajoute la question de la couverture du réseau 4G et 5G, inégale en Corse. 

"Notre regret, glisse-t-on du côté de l'équipe de com de Jean-Charles Orsucci, c'est que le vote électronique n’ait pas pu être mis en place. Il aurait été un parfait complément de la stratégie des réseaux sociaux".

 

 

 

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