Le premier film de l'Alsacien Benjamin Steinmann, In Memoriam, sera projeté ce vendredi 28 septembre, à la Saline, à Soultz-sous-Forêts (Bas-Rhin). L'histoire d'un incorporé de force qui fait le choix de déserter. Un sujet délicat auquel il s'est intéressé dès l'adolescence.
Jamais le jeune garçon de 12 ans qu'il était alors n'imaginait que du scénario élaboré avec ses mots d'ado sortirait, dix-sept ans plus tard, un film. "Je ne pensais pas du tout y arriver. C'est un rêve qui se réalise. Je suis très impatient, excité à l'idée de voir mon film projeté dans une vraie salle de cinéma". A la veille de cette grande première, Benjamin Steinmann, 29 ans, est surtout pressé de se confronter à la réaction du public, voir si son histoire, qu'il a voulu aussi proche de la réalité que possible, est crédible.
Montrer le désarroi de ces hommes, incapables de justifier leurs uniformes
L'histoire, c'est celle d'André Balzinger, un personnage de fiction, mais qui pourrait être celle de nombreux Alsaciens : un Malgré-Nous qui déserte le front russe pour rejoindre la Résistance en France. Un lâche pour les Allemands, un ennemi pour les Russes, c'est le "désarroi de ces hommes, leur incapacité à justifier leur uniforme" que le jeune réalisateur cherche à montrer.
L'écriture comme refuge
Une part de l'histoire alsacienne qui l'avait déjà interpellé lorsque, collégien, il avait travaillé sur l'incorporation, sur la base des témoignages de ses grands-parents notamment. A cette période, l'adolescent se trouve privé de l'usage de ses jambes, à cause d'une maladie des hanches. "Pendant deux ans, j'ai été en chaise roulante, immobilisé, loin de toutes les activités des garçons de mon âge". Il se tourne alors vers le cinéma, à haute dose. Et peu à peu vers l'écriture. "Des petits dialogues d'abord, et puis des scénarios de plus en plus élaborés, jusqu'à 200 ou 300 pages."
Une fiction, aussi proche que possible du documentaire
Il y a trois ans, il ressort celui-ci après être tombé sur une photo de Malgré-Nous sous-titrée "Sans patrie". Le thème le heurte, à nouveau, il décide alors de passer le cap de la réalisation d'un film. Infographiste de métier, il y passe tout son temps libre. Pour faire des recherches d'abord, recueillir des témoignages. "C'était très important pour moi que ma fiction s'inscrive dans l'histoire réelle. Pour des raisons de budget, impossible de réaliser un vrai documentaire, avec des archives... Mais je voulais m'en approcher par la fiction". 25 jours de tournage, 400 heures de montage
Et puis, il faut tourner. Dix-sept de ses proches s'improvisent acteurs. Les costumes et accessoires sont prêtés par l'association des reconstituteurs de Weitbruch et le musée de l'Abri de Hatten. Le décor planté dans les forêts d'Outre-Forêt, près de Wissembourg, en Forêt Noire côté allemand, et au Col du Linge également, haut lieu de la Première Guerre mondiale, au-dessus de Munster.25 jours pour mettre des heures de rushes en boîte, entre février 2017 et mars 2018. Puis près de 400 heures de montage. Pour aboutir à 1h32 d'un film qui affrontera donc l'avis du public une première fois le 28 septembre, puis le 16 octobre, à la Saline, la salle de spectacle de Soultz-sous-Forêts. A quelques kilomètres de son village d'enfance d'Hunspach, où a démarré cette aventure cinématographie. Histoire de boucler la boucle.