Des institutions moins compliquées et moins coûteuses, pour une région plus forte : les partisans de la fusion des collectivités alsaciennes affichent des objectifs ambitieux, mais le projet compte aussi des détracteurs.
Quelle forme prendrait la collectivité unique?
Elle naîtrait de la fusion du conseil général du Haut-Rhin, de celui du Bas-Rhin et du conseil régional. Cette évolution ne menace pas a priori les départements en tant que circonscriptions ni leurs préfectures. Le siège officiel de la collectivité unique serait à Strasbourg, mais dans l'état actuel du projet elle serait administrée par une assemblée délibérante siégeant à Strasbourg et par un conseil exécutif à Colmar.L'édifice institutionnel serait complété par des "conférences départementales" consultatives et des "conseils de territoire de vie". Il réunirait les budgets actuels des trois collectivités, soit un total de quelque 2,7 milliards d'euros.
Quels sont les objectifs?
Il s'agit à la fois de simplifier le millefeuille administratif actuel, de réaliser des économies et de redynamiser la plus petite des régions françaises face à ses puissantes voisines allemandes et suisses. Dans des domaines comme les transports ferroviaires ou les équipements scolaires, où les compétences sont aujourd'hui éclatées, la fusion permettra plus de cohérence, assurent ses promoteurs, qui mettent aussi en avant la possibilité d'avoir une surface financière plus importante pour financer des projets.Les économies qui découleraient des mutualisations ne sont pas précisément chiffrées, mais les partisans du projet estiment par exemple que les dépenses de communication ou celles relatives au parc automobile baisseraient de 10 à 20%.
Quelles seraient les compétences de la nouvelle collectivité ?
Elle exercerait tout d'abord celles actuellement dévolues aux trois entités. Pourraient s'y ajouter ensuite de nouvelles compétences transférées par l'Etat, si ce dernier l'accepte, dans des domaines allant de la coopération transfrontalière à l'éducation, en passant par le logement. La collectivité unique a vocation selon ses promoteurs à disposer d'une capacité réglementaire pour "adapter l'action publique aux spécificités de l'Alsace", région frontalière, en matière par exemple de droit du travail ou de formation. Elle demanderait aussi à pouvoir négocier des accords internationaux avec des régions voisines.Que deviendraient les élus et agents actuels des collectivités?
Il y a actuellement 122 élus (47 au Conseil régional, 75 dans les deux conseils généraux). La fusion doit permettre une diminution de 10 à 20% de ce nombre selon le projet. Les nouveaux élus de l'Assemblée d'Alsace le seraient pour partie dans le cadre de cantons, au scrutin majoritaire, et pour l'autre à la proportionnelle, dans le cadre de la région.Aucun des 8.000 agents des trois collectivités actuelles ne serait licencié, mais des réorganisations de services en doublon pourraient avoir lieu progressivement par non-remplacement de départs à la retraite (200 par an prévus). Ce point suscite l'inquiétude des syndicats.
Qui est pour, qui est contre ?
La droite, largement majoritaire en Alsace, est la principale promotrice de la fusion, ce qui n'empêche pas des positions dissidentes. Les élus écologistes sont eux aussi de fervents soutiens du projet. Les socialistes alsaciens sont favorables à l'idée de la fusion, mais hostiles au projet négocié par les présidents UMP des trois collectivités actuelles, qualifié d'usine à gaz. Résultat: des positions en ordre dispersé, avec notamment la fédération PS du Haut-Rhin qui fait campagne pour le oui et celle du Bas-Rhin pour le non...Le Front de Gauche est clairement contre, voyant dans les pouvoirs accrus d'une nouvelle collectivité les germes d'un éclatement de la République. A l'extrême droite, le chef de file du FN alsacien était favorable à la fusion, mais s'est aligné sur la position nationale du parti hostile à ce "début de détricotage de la France".
Le parti régionaliste Alsace d'abord milite en revanche pour la fusion.Il y a aussi eu des prises de position hostiles des syndicats, notamment FO et CGT. Ils voient d'un mauvais oeil le fait que la nouvelle collectivité puisse avoir des compétences réglementaires en matière de droit du travail, craignant des différences de traitement entre salariés. La FSU craint de son côté une "régionalisation du service public de l'Education nationale".