Réforme territoriale : feu vert en conseil des ministres, la balle au Sénat

Sitôt examinée mercredi en Conseil des ministres, la réforme territoriale, qui bouscule l'architecture de la République, a pris le chemin du Sénat où l'attend l'opposition conjuguée de l'UMP et d'une partie de la gauche.

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Seul suspens qui demeurait encore, la date des prochaines élections régionales a finalement été fixée à décembre 2015, comme les élections départementales, a annoncé le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll. Cela leur permettra d'avoir pour cadre les régions redécoupées. La veille encore, c'est le mois de novembre qui tenait la corde. Ce sera la première fois depuis l'élection présidentielle de 1965 que les Français voteront à un scrutin national en décembre.

Le Conseil des ministres a examiné en fait deux projets de loi, l'un sur les compétences des collectivités, l'autre sur la nouvelle carte régionale et le report des élections. Sans surprise, le nombre des régions serait ramené à 14 en France métropolitaine, au lieu de 22 actuellement. Lors du débat parlementaire, le gouvernement pourrait accepter "un nombre inférieur", mais "en aucun cas" un nombre plus élevé, selon André Vallini, secrétaire d'État à la Réforme territoriale. 

Le même jour, Jacques Auxiette, président des Pays de la Loire, a réaffirmé "la volonté de l'ensemble des acteurs" de sa région de voir "fusionner Bretagne et Pays de la Loire". Par ailleurs, le projet de loi sur le redécoupage satisfait l'exigence posée par François Hollande qu'il y ait "moins d'élus" dans les régions. Leur nombre est plafonné à 150 par conseil régional, ce qui impliquera une réduction dans certaines assemblées élues fin 2015, comme l'Ile-de-France (208 conseillers régionaux actuellement). Cette disposition suscite d'ores et déjà des critiques. Devant le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve qui présentait le projet en commission à la Haute assemblée, le sénateur du Val d'Oise Alain Richard a parlé d'une "représentation très disparate" introduisant "une rupture d'égalité" entre régions. Le texte viendra en séance tout début juillet.

Le député UMP Hervé Gaymard a évoqué un redécoupage "en dépit du bon sens et de l'Histoire" et une réforme qui "tue la proximité qu'attendent pourtant les Français, sans que cela ne produise aucune économie". 

A la hussarde

Vive hostilité aussi des Radicaux de gauche, dont le chef à l'Assemblée, Roger-Gérard Schwartzenberg, a accusé le gouvernement d'"avancer à la hâte, voire à la hussarde", et des sénateurs communistes, qui réclament "la constitution d'une commission spéciale". Réaction plus modérée chez les centristes de l'UDI, dont le gouvernement pourrait avoir besoin pour trouver une majorité: ils ont posé plusieurs conditions pour que "cette réforme nécessaire" soit "utile". Elle doit notamment "concerner l'Etat tout autant que les collectivités territoriales", selon leurs députés. La réforme fait reposer l'organisation territoriale sur deux piliers: les régions et les intercommunalités.

La clause de compétence générale, permettant d'agir dans quasiment tous les domaines et qu'avait rétablie la loi Mapam de janvier 2014, est supprimée pour les régions et les départements. Les premières deviennent les véritables patrons du développement économique sur les territoires. Elles héritent de l'entretien des routes et des collèges, ainsi que des transports scolaires et interurbains, autant de tâches aujourd'hui remplies par les conseils généraux des départements. "La loi de finances" leur donnera les moyens de ces nouvelles missions, selon un communiqué officiel. Les conseils généraux sont explicitement appelés par la réforme à disparaître "à l'horizon 2020", sous réserve d'une révision de la Constitution, indispensable pour les supprimer. D'ici là, les départements conservent leurs compétences sociales. A la fois ville et département, Paris garde la gestion des collèges. Quant aux intercommunalités, elles seront, comme les régions, agrandies et devront compter au 1er janvier 2017 (sauf dérogations, notamment en montagne) 20.000 habitants au moins, quatre fois plus qu'actuellement.

Selon le texte du projet de loi, les préfets auront de larges pouvoirs dans ce domaine, tout comme pour réduire, y compris par la dissolution, le nombre de syndicats mixtes (eau, assainissement, énergie principalement), égal à plusieurs milliers. Au moment où les concours de l'Etat diminuent, un mécanisme fortement incitatif de regroupement des communes est prévu: les intercommunalités exerçant six au moins des onze compétences auxquelles elles peuvent prétendre auront droit à une Dotation globale de fonctionnement (DGF) "bonifiée". L'accès aux services publics, notamment en milieu rural, est censé devoir s'améliorer avec l'établissement dans chaque département d'un "schéma" en ce sens.
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