Procès Schaller autour du dépistage de la maladie de Lyme : jugement le 13 novembre

Un mois de prison avec sursis, 30 000 euros d'amende et interdiction d'exercer la profession de pharmacien, ce sont les réquisitions dans l'affaire Schaller. L'affaire a été mise en délibéré au 13 novembre.

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La biologiste strasbourgeoise comparaissait ce mardi pour escroquerie à l'Assurance maladie. Elle était devenu le fer de lance dans le diagnostique de la maladie de Lyme en France mais ne respectait pas le protocole établi. La CPAM estime qu'il y a préjudice, mais le tribunal est peut-être face à un scandale de santé public.

Le compte-rendu du procès


Escrocs ou lanceurs d'alerte ? Les "rebelles" de la maladie de Lyme devant la justice (AFP)

La maladie de Lyme, une affection potentiellement invalidante transmise par les tiques, est-elle l'objet en France d'un "déni", voire d'une "omerta" ? La polémique, qui oppose depuis des années des milliers de patients en colère aux autorités sanitaires, s'est invitée mardi devant un tribunal, à Strasbourg.  Patients et médecins se sont succédé à la barre du tribunal correctionnel pour soutenir deux partisans de méthodes alternatives de détection et de traitement de cette maladie, poursuivis pour escroquerie à l'assurance maladie et exercice illégal de la pharmacie.

"Ce problème devrait être réglé par la science et non dans un tribunal. Les prévenus n'ont rien à faire ici, ils sont des lanceurs d'alerte", a déclaré à la barre Hélène Schibler, une retraitée qui dit s'être fait soigner en Allemagne après "12 ans de déni" de sa maladie en France. Considérant que les faits étaient "revendiqués", la représentante du parquet Lydia Pflug a requis un an de prison avec sursis et 30.000 euros d'amende contre les prévenus.

Le tribunal rendra ses décisions le 13 novembre


Viviane Schaller, 66 ans, docteur en pharmacie et ancienne gérante d'un laboratoire d'analyses biologiques strasbourgeois, est poursuivie pour avoir appliqué pendant des années un protocole de test non homologué par les autorités sanitaires. Elle a ainsi annoncé à des milliers de patients, dans toute la France, qu'ils étaient bel et bien porteurs de cette maladie pouvant provoquer des troubles invalidants et douloureux, notamment neurologiques, articulaires et musculaires, et ce alors que les tests "officiels" affirmaient le contraire.

Certes, la prévenue -dont le laboratoire a été fermé en 2012 sur décision préfectorale-a agi "pour défendre un combat qu'elle estime noble", mais "commettre une infraction n'était pas la bonne voie", a commenté Mme Pflug, en pointant du doigt les "bénéfices" financiers retirés. Au côté de Mme Schaller comparaissait Bernard Christophe, 65 ans, diplômé en pharmacie, mais non inscrit à l'ordre des pharmaciens, poursuivi pour avoir fabriqué et commercialisé un remède à base d'huiles essentielles contre la maladie de Lyme, baptisé "Tic Tox". L'accusation affirme que ce produit est assimilable à un médicament, diffusé hors cadre réglementaire, mais l'intéressé s'en défend, évoquant un simple "complément alimentaire". 

Le 'dogme' d'une maladie rare

L'assurance maladie, partie civile, affirme que le détournement de la procédure officielle par Mme Schaller a conduit à plus de 200.000 euros de remboursements indus. Le tribunal s'était déjà penché sur cette controverse en septembre 2012. A l'issue de l'audience, le parquet avait déjà requis les mêmes peines. Mais la décision n'avait jamais été rendue, dans l'attente d'un supplément d'information. A l'époque, deux spécialistes du Centre national de référence de la maladie de  Lyme, les Pr Benoît Jaulhac et Daniel Christmann, étaient venus à la barre soutenir la validité des protocoles officiels.

Mardi, en revanche, le tribunal a entendu plusieurs médecins cités par la défense, qui soutiennent la thèse opposée.  "Il y a en France une sous-estimation dramatique de cette maladie", a commenté le Pr Christian Perronne, spécialiste des maladies infectieuses à l'hôpital universitaire Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine) et membre du Haut conseil de la santé publique. Les tests de détection "ont été calibrés il y a 30 ans de manière à ce que cette affection soit rare (...) et on n'est jamais revenu sur ce dogme", a-t-il déploré. 

"Des milliers de malades vivent un enfer, car ils sont bafoués, confrontés à un déni, à une omerta", a témoigné Judith Albertat, présidente de l'association "Lyme sans frontières", qui se bat pour une nouvelle approche de la maladie. "Les gens sont ballottés de médecin en médecin pendant des années. D'où un coût phénoménal pour la sécurité sociale", a-t-elle ajouté.

Pour l'une des avocates de la défense, Me Catherine Faivre, "dans ce dossier, il n'y a aucune plainte de malade". "On reproche aux prévenus de faux diagnostics qui auraient conduit les patients à ne pas se soigner, mais c'est exactement le contraire!" a-t-elle souligné, avant de plaider la relaxe.
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