Pour certaines, c'était une première loin de la Polynésie française : une tournée en Alsace et au Luxembourg pour la sélection féminine de football de Tahiti en vue de préparer les mondiaux 2023, une équipe nationale emmenée par l'Alsacienne Stéphanie Spielmann.
Nous les retrouvons à Eckbolsheim dans un club de football en salle. Les filles de la sélection de football de Tahiti emplissent les locaux bétonnés de leurs rires et de leur joie de jouer balle au pied.
Une gageure, quand on sait qu'à Tahiti, il y a encore 10 ans, la pratique du football en club n'était plus accessible aux filles. "J'ai eu un coup de coeur pour cette île de la Polynésie française et je me suis dit que j'allais essayer de développer le foot féminin là-bas", nous explique Stéphanie Spielmann, la sélectionneur de cette équipe originaire de Goxwiller dans le Bas-Rhin.
Alors en 2014, l'ex joueuse du FC Vendenheim, s'envole et pose ses valises à Tahiti. Elle prend son bâton de pèlerin et toque à la porte des clubs. Elle convainc les dirigeants de rouvrir des sections féminines, trouve des financements et huit ans plus tard, elle peut aligner une équipe nationale de 23 joueuses.
Un véritable choc thermique
Une équipe qu'il faut fédérer. Parce que si beaucoup vivent à Tahiti, certaines viennent de toute la Polynésie française, un territoire qui s'étend sur plus de 4.000 kilomètres carré. Sans compter, celles qui sont en Europe ou même en Amérique du nord. "C'est la première fois, avec ce déplacement, qu'elles se retrouvent toutes ensemble, confirme Stéphanie Spielmann, mais je suis ravie parce qu'on a trouvé un super groupe, ça n'a pas de prix", sourit la coach.
Un déplacement d'une quinzaine de jours donc dans les froides contrées alsaciennes et luxembourgeoises. Certaines filles du groupe, dont la moyenne d'âge est de 21 ans n'avaient jamais quitté la Polynésie. "Vous savez, le minimum de l'année à Tahiti, c'est 23 degrés, s'amuse Chu Hereura, défenseure de 18 ans. Alors c'est sûr qu'en arrivant ici, on a eu froid!"
Equipées de gants et de tours de cou solides, les voilà qui débarquent pour préparer la Coupe des nations de l'Océanie qui se déroule en juillet prochain en Australie et en Nouvelle-Zélande, une compétition qualificative pour les mondiaux 2023, le graal pour cette jeune équipe.
Une fierté de porter le maillot national
Trois matches de préparation, deux contre le Luxembourg et un contre Andorre. Et la fierté de porter le maillot tahitien. Notamment pour Daisy, dont l'histoire est particulièrement touchante. A 27 ans, la jeune femme joue en club, à Molsheim.
Adoptée, elle a pu renouer avec ses origines grâce au football et cette sélection. "Je ressens une immense fierté, nous précise-t-elle, les larmes dans les yeux. J'ai eu des frissons incroyables quand il a fallu chanter l'hymne tahitien toutes ensemble".
Pas d'exploit pour les joueuses de Stéphanie Spielmann face à l'équipe du Luxembourg, deux grosses défaites mais un bon nul pour finir contre Andorre, 0-0, au stade de l'Aar à Schiltigheim, mardi 22 février. "On a eu beaucoup de chance, elles ont beaucoup tiré mais pas bien cadré et puis on a super gardienne", raconte Chu dans un large sourire.
Cette gardienne, c'est Camille André, 19 ans. La jeune femme joue pour les U19 du Racing club de Strasbourg, est passée par le pôle Espoirs. Si elle peut jouer pour Tahiti, c'est parce qu'elle est née là-bas. Et même si ses parents sont repartis alors qu'elle n'avait que trois mois, la gardienne est éligible à une sélection. "C'est un honneur pour moi de représenter l'endroit d'où l'on vient. Et puis une sélection internationale c'est toujours bon à prendre", sourit-elle malicieusement.
Ce qu'elles retiendront surtout de cette quinzaine, c'est la cohésion qu'elles ont su trouver alors qu'elles évoluent ensemble pour la première fois. "C'est une belle aventure humaine et sportive confirme Stéphanie Spielmann. Elles ont montré de belles valeurs de solidarité."
Un jeu tourné vers l'attaque
Quant à leur jeu, "il est très offensif, détaille la sélectionneur, les Tahitiennes adorent toucher le ballon, elles sont à l'aise techniquement. Là où ça pêche encore c'est tactiquement et même si elles ont un gros potentiel physique, il faut aussi bosser ce domaine là."
Jouer à l'extérieur de la Polynésie, là où les filles n'ont pas de rivales, se confronter à du haut niveau pour progresser, c'était l'objectif pour cette équipe nationale qui regagne ses pénates ce samedi 26 février. Avec en ligne de mire bien sûr, une qualification historique pour les Mondiaux 2023.