En raison de la baisse démographique, le gouvernement prévoit de supprimer 1500 postes dans l’Education nationale en France à la rentrée prochaine, dont 83 en Alsace. Une décision qui met en colère parents d’élèves et syndicats enseignants.
Ce n’est pas une surprise. Gravée dans le marbre du projet de loi de finances 2023 depuis plusieurs semaines, la suppression de postes d’enseignants doit permettre à l’Education nationale de répondre à l’érosion du nombre d’élèves, induite par une baisse démographique marquée. En chiffres, la mesure se traduira par environ 1500 effectifs en moins dans l’Hexagone. L’Alsace ne fait pas partie des régions les plus impactées mais elle en perdra 83, dont 43 dans le secondaire.
Lors de son audition au Sénat en novembre 2022, le ministre de l’Education nationale Pap Ndiaye, avait planté le décor. "Après une baisse de 300 000 élèves ces cinq dernières années, nous prévoyons une baisse de 500 000 élèves sur la période 2022-2027".
"La baisse des effectifs se poursuivrait dans les années à venir à la fois dans le niveau préélémentaire et dans le niveau élémentaire, que ce soit dans le secteur public ou privé sous contrat", prédit de son côté la Direction de l’évaluation de la prospective et de la performance, le service statistique de l’Education nationale.
"Ça ne va pas dans le bon sens"
Lionel Boyon, délégué de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) du Bas-Rhin.
Un constat qui aurait pu conduire à une casse encore plus lourde. "Répercuter complètement cette baisse sur le nombre d'enseignants reviendrait à supprimer 5 000 postes", avait encore affirmé Pap Ndiaye. Finalement, il y en aura moins, mais il y en aura quand même.
"On profite d’une soi-disant baisse démographique dans les écoles pour continuer à supprimer des postes. Alors que justement c’était l’occasion d’alléger les classes surchargées", réagit Lionel Boyon, délégué de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) du Bas-Rhin.
"Ça nous inquiète forcément, à l’heure où l’on parle de problème d’inclusion scolaire, de classes surchargées. Ce n’est pas un signe d’investissement, or on en a besoin", avance de son côté Valérie Poyet, secrétaire départementale de la FSU du Haut-Rhin.
Moins d’élèves par classe…
Si supprimer des enseignants reviendra inévitablement à fermer des classes, le gouvernement se veut rassurant. "Je réaffirme que la baisse des effectifs d'enseignants tiendra compte des enjeux liés à la ruralité, en conformité avec l'engagement du Président de la République. Aucune fermeture d'école n'interviendra sans l'accord des maires", avait tenté de rassurer Pap Ndiaye devant les sénateurs. Concernant le nombre d’élèves par classe, il "continuera de baisser".
"Je n’y crois pas du tout. Il va continuer à manquer des profs de maths, des profs d’allemand, c’est une catastrophe en Alsace. On aurait mieux fait de s’occuper de ça plutôt que de retirer des postes d’une façon purement arithmétique et budgétaire", tempête froidement Lionel Boyon. "On a tendance à faire la comparaison avec l’hôpital public. Avec l’éducation, ce sont les parents pauvres. On court à la catastrophe".
… et un taux d’encadrement en hausse
Selon les projections, le taux d’encadrement passera de 5,76 enseignants pour 100 élèves à 5,84 dans le Haut-Rhin et de 5,52 à 5,53 dans le Bas-Rhin.
"Pas énorme" comme évolution, balaye Valérie Poyet. "Dans les faits, ça se verra peu". Plutôt que dans tailler dans la masse salariale, elle, milite pour un "renforcement des dispositifs" sur lesquels l’école tire déjà la langue, notamment les RASED, les réseaux d’aides spécialisés aux élèves en difficultés.
"Ça redonne cette idée qu’on ne veut pas investir sur l’avenir, avec en plus des collègues qui s’inquiètent. Qu’est-ce que ce gouvernement souhaite pour l’école publique ?"
Une chose est sûre, ces suppressions d’effectifs risquent d’accentuer encore un peu plus les tensions existantes dans certaines académies, avec parfois des actions de protestation poussées à l’absurde pour mieux illustrer l’inquiétude qui y règne.
Début mai, les parents de l'école maternelle de Hilsenheim, dans le Bas-Rhin, avaient passé une petite annonce sur le Bon coin pour trouver 2,5 élèves, afin de maintenir ouverte une classe de maternelle.