La guerre en Ukraine se ressent jusque dans les champs de Grégory Bapst. Le jeune paysan meunier, installé à Plobsheim dans le Bas-Rhin, voit ses ventes de farine bio augmenter de 10 à 20% et il va semer plus de céréales pour les prochaines récoltes.
En 2018, à 39 ans, Grégory Bapst a changé de vie pour devenir paysan et meunier. Aujourd'hui, il est en plein semis dans les champs qu'il loue à Plobsheim, dans le Bas-Rhin, et la demande pour ses farines a augmenté de 10 à 15 %.
Il n'a évidemment pas pu prévoir ce qui allait se passer en Ukraine, mais comme son entreprise se développait bien, il a décidé d'acquérir un deuxième moulin, puis tout récemment, un troisième.
"C'est le hasard de la demande, d'avant la guerre déjà, qui m'a fait investir dans un troisième moulin." Mais ça tombe bien, car aujourd'hui la farine en provenance d'Ukraine manque dans les rayons de nos supermarchés.
Un 3ème moulin qui tombe à pic
Chacun des trois moulins aura une fonction spécifique et permettra de moudre les grains pour différents types de farine, allant du T65 à 130 en passant par le T80 (T65 étant la plus épaisse et 130 la plus fine).
Ses clients sont des particuliers, des pâtissiers, des restaurateurs qui font leur pain eux-mêmes, "mais 70 % de mes farines partent chez des boulangers pour des pains spéciaux."
Parmi les céréales cultivées par Grégory, de l'épeautre, du seigle, du blé dur, comme le "miracle d'Osiris" retrouvé dans des tombeaux de pharaons, du Khorasan ou Kamut, cultivé à l'origine sur les plateaux iraniens et afghans.
Ces blés disparus au début du XXe siècle sont devenus sa spécialité et font son succès auprès de la clientèle, que ce soit dans sa boutique à la ferme, ou dans la dizaine de points de vente qu'il a mis en place durant les dernières années.
Semer plus pour mieux répondre à la demande
Il y a deux périodes de semis pour les céréales. Une au printemps et une en automne. "Pour la récolte de juillet de cette année, j'ai semé en automne dernier, je ne peux donc plus rien changer et, pour la première fois, je serai peut-être en rupture juste avant la récolte, mais dès juillet j'aurai de nouveau les volumes nécessaires."
Pour les semis de ce printemps, qui se font du 10 avril à mi-mai, Grégory a encore les moyens de réagir. Et là-aussi, son côté naturellement prévoyant a bien fait les choses.
"J'en fais toujours plus, car on n'est jamais à l'abri des conditions climatiques et sur le bio, les rendements sont plus aléatoires. Ce surplus qu'il vend habituellement à des négociateurs ou à des coopératives représente entre 8 et 10 % et peut très bien devenir farine si la demande s'en fait sentir.
"Comme j'ai investi dans un nouveau moulin, j'ai prévu de produire plus. Avec des associés nous démarrons la culture de légumes secs, comme les lentilles, les pois chiches et du quinoa. A partir des pois chiches et des lentilles corail, je pourrai faire de la farine pour mes clients allergiques, comme je leur propose déjà de la farine de sarrasin, non allergisante."
A la question, pourrait-il augmenter la surface de ses cultures de céréales, si la demande augmentait encore ? Le jeune paysan meunier est catégorique : "Moi je suis principalement locataire et je ne peux plus cultiver certaines terres que j'avais jusqu'à présent près de chez moi à Plobsheim. Les terres agricoles disponibles deviennent de plus en plus rares dans l'Eurométropole, car la pression foncière y est forte."
Grégory Bapst est donc d'autant plus heureux d'avoir trouvé de nouvelles terres à louer et à cultiver à Rosheim. Avec le manque de farine en provenance d'Ukraine, la demande de sa farine bio made in Alsace pourrait bien encore augmenter.