23 novembre 1944, le même jour que la libération de Strasbourg, les Américains sont dans la vallée de la bruche. Deux jours plus tard, le 25 novembre, ils libèrent Schirmeck et un bataillon décide de se rendre à Natzweiler. À 800 mètres d'altitude, les soldats découvrent le camp de concentration construit par des détenus depuis 1942.
Construit à partir de 1942 par 300 détenus transférés depuis le camp de concentration de Sachsenhausen, le camp de Natzweiler était évidemment visible du ciel, mais les soldats n'ont réellement découvert l'ampleur des horreurs perpétrées lors de leur arrivée sur les lieux, le 25 novembre 1944.
"C'est la première fois que les Américains découvraient un camp de concentration à l'ouest. Ils ont découvert le camp, ne l'ont pas libéré, car il n'y avait plus personne" raconte Alphonse Troestler, président d'honneur de la société d'histoire de Molsheim et environs. La plupart des détenus ont été évacués dès le mois de septembre et le dernier convoi est parti le 22 novembre. Un camp avec 14 baraquements totalement vide donc lorsque les Américains sont arrivés. Plus de 6.000 ont ainsi été transportés vers des annexes du camp souche.
"Tous les détenus à gauche du Rhin ont été évacués dans ces annexes qui existaient déjà avant septembre 1944. D'autres ont été construites. Les responsables du camp, eux, se sont installés
à Guttenbach et à Binau dans la vallée du Neckar" explique Robert Steegmann, historien et président du conseil scientifique du Centre européen du résistant déporté.
Premier film et photos réalisés le 2 décembre 1944
Pour pouvoir témoigner, les Américains ont filmé et photographié ce qu'ils ont vu. Des documents sur lesquels le monde entier découvre les baraquements, mais aussi la prison, le four crématoire et la chambre à gaz érigée par les SS dans l'ancienne salle de bal de ce qui était une auberge avant la guerre. Devant le four, Robert Steegmann raconte : " tous les détenus morts ici et autour, ont été incinérés ici. Il devait rester aucune trace de ces gens. Les cendres, elles, ont été conservées. Les familles allemandes pouvaient les récupérer moyennant finances. Les détenus français, eux, étaient enfouis dans un trou ou dispersés dans le jardin du commandant."
Dans la chambre à gaz, ce sont 86 juifs et juives qui ont été exterminés pour la science. Oui, pour la science. Pour les expériences du professeur Hirt. Un plan d'extermination du peuple juif par les nazis. Et malgré la découverte macabre du camp, son histoire ne sera pas close. Après le 25 novembre 1944, des milliers de déportés continueront à vivre l'enfer dans les annexes du Struthof jusqu'en mai 1945.
Une période inhumaine qui, aujourd'hui plus que jamais, doit être transmise. Accueil des scolaires, recherches historiques et archéologiques sont ainsi au cœur des préoccupations du centre européen du résistant déporté. Sur la totalité du camp et ses annexes, 52.000 déportés ont été internés durant la guerre. 22.000 détenus y sont décédés.