Hommages, fêtes, commémorations : c’est toujours du plus bel effet visuel, des ballons qui s’élèvent en grappes monochromes ou multicolores dans un ciel bleu. Mais où finissent ces ballons? Arrivés en altitude, ils éclatent, et deviennent des déchets parfois mortels.
N’est-ce pas merveilleux de voir danser au gré du vent, le ballon lâché par la menotte de notre chérubin? N’a-t-elle pas déjà un peu le goût de l’aventure cette baudruche, avec son message au bout d’un fil, envoyé via les airs à un destinataire inconnu? Et ces nuages de ballons qui s’élèvent lors nos cérémonies de recueillement, d’hommage et de fêtes, ne sont-ils pas des symboles qui nous tiennent à cœur?
Oui sans aucun doute, mais il y a un hic. Car ces ballons, arrivés en altitude, éclatent en mille morceaux et retombent au sol dans les forêts qu’ils survolent, les champs, les prairies et bien évidemment aussi dans les mers et les océans. Une catastrophe pour la faune domestique et sauvage, car à ce stade, les jolis ballons sont devenus des déchets en plastique. Parfois mortels. Alors au risque de gâcher un peu notre plaisir et ceux de nos enfants, voici quelques conséquences générées par ces lâchers de ballons.
Les animaux victimes
Comme les sacs en plastique, les ballons dégonflés ou éclatés en morceaux plus ou moins grands, sont des déchets en plastique. Dispersés dans la nature, ils peuvent être ingérés par des animaux domestiques et des animaux marins. Parmi ces derniers, les tortues, les oiseaux et les baleines sont les principales victimes de cette pollution. Sans aller jusqu’en bord de mer ou loin dans les océans, les vaches de nos campagnes, qui broutent dans les prairies, les ingèrent également.Raynald Moratin, chargé de mission de l'Office des données naturalistes du Grand Est (Odonat), explique : "Comme tous les éléments plastiques rejetés dans la nature, les déchets de ballons créent une pollution supplémentaire qui impacte les sols et les eaux, voire le cas échéant des individus de certaines espèces animales, capables de les ingurgiter ou d’être tuées par ces débris, par étouffement par exemple. Ces ballons, du fait de leur mode de propagation par les airs, sont capables de toucher des zones habituellement épargnées par les pollutions plastiques courantes. Alors même si la pollution par ballons gonflables est relative, au regard des milliers de tonnes de plastiques polluants que nous rejetons dans le monde, cette pollution semble largement évitable, car on est loin d’un besoin essentiel à notre mode de consommation."
Il existe des campagnes de réintroduction de certaines espèces animales menacées, comme récemment la cistude d’Europe en Alsace, une tortue. Ce serait dommage de contribuer à leur perte en dispersant nos déchets plastiques.
Le site ballonsblow consacre une galerie photos aux animaux blessés ou morts à cause de ballons gonflables et de leurs attaches.
Décisions préfectorales et législation
En France, certaines préfectures règlementent les lâchers de ballons. Ce n'est pas le cas dans le Bas-Rhin, mais le départenment rappelle toutefois les textes de lois concernant la pollution par déchets. L’article L541-2 du code de l’environnement indique que: "Tout producteur ou détenteur de déchets est responsable de la gestion de ces déchets jusqu'à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers."
L’organisateur des lâchers de ballons est donc considéré comme producteur de déchets et il est tenu d’en organiser la gestion. Le code de l’environnement (article L541-46) prévoit des sanctions pénales à l’encontre des personnes qui "abandonnent, déposent ou font déposer ou abandonnent des déchets dans la nature sans autorisation du propriétaire du lieu". Dans le Haut-Rhin, il faut faire une déclaration de lâcher de ballons. Avant de procéder à des lâchers, il est donc recommandé de vérifier les arrêtés de sa préfecture.
Sur le site du ministère de la Transition écologique et solidaire, on apprend que "selon le programme des Nations unies pour l’environnement (Unep), les ballons sont dans le top 10 des déchets récréatifs retrouvés sur le littoral." Il publie même une fiche relative aux lâchers de ballons de baudruche et de petits ballons à air chaud ou de lanternes volantes, sur laquelle il précise "Bien qu’il existe des ballons portant la mention "100 % biodégradable", il faut savoir que le terme biodégradable n’a aucun caractère normatif ou réglementaire. De plus, cette dégradation ne s’effectue que dans des conditions spécifiques au bout d’un temps déterminé."
Des risques aussi pour... l’aviation
Les risques auxquels on pense moins sont ceux encourus par l'aviation. Il existe pour cela une interdiction de survol des zones aéroportuaires. Cela vaut pour les drônes, les lanternes volantes et les ballons gonflables. "Les ballons gonflables ne constituent pas un risque énorme, mais les aéroports préfèrent limiter tout risque", explique un superviseur de l’aéroport de Strasbourg-Entzheim. Clairement les ballons ne vont pas peser lourds contre une carlingue d'avion, mais il s'agit de "minimiser leurs risques d’interférences avec les systèmes radar et les aéronefs, notamment leurs moteurs dans le cas des lanternes volantes. Lorsque les lanternes volantes retombent, elles peuvent constituer des débris sur les pistes."
D'où ces recommandations du législateur :
- Les ballons de baudruche ou lanternes volantes ne sont pas attachés entre eux.
- L’enveloppe des ballons de baudruche ou lanternes volantes est constituée de matériaux non métalliques, de façon à ne pas être réfléchissants pour les radars.
Utiliser ces tonnes de déchets plastiques comme carburant
D'ici un an, en 2020, Le Plastic Odyssey, un navire de 30 à 35 mètres, de Plastic Odyssey Expedition à Concarneau a décidé d'agir. Il prendra le large en 2020 pour une expédition de trois ans afin de remplir trois objectifs: mieux comprendre l'impact de la pollution plastique et définir des solutions potentielles, démontrer la valeur des déchets plastiques en les utilisant directement comme ressources pour alimenter les moteurs du navire et pour fabriquer des objets lors des ateliers à chaque escale.Nous voilà prévenus. A une époque où nous avons déjà quelques bons réflexes pour protéger l’environnement, ne plus lâcher de ballons pourrait constituer un nouveau geste, aussi petit soit-il, en faveur de notre planète et de ses habitants.