Emmanuel Macron arrive en tête à Strasbourg au second tour de l'élection présidentielle. Le président sortant y totalise 77,65 % des voix contre 22,35 % pour Marine Le Pen. Un score en légère baisse par rapport à 2017. L'abstention, elle, est en nette progression, atteignant 30,25 %. Décryptage.
Avec seulement 74,14 % de votants dimanche 24 avril, l'Alsace a enregistré son plus faible taux de participation au second tour d'une élection présidentielle depuis plus de 50 ans. Sa capitale n'échappe pas au mouvement de recul démocratique. Elle en est même le fer de lance.
L'abstention à Strasbourg a, en effet, atteint pour ce second tour 30,25% (contre 25,88% en 2017). En clair, un électeur sur trois n'est pas allé voter.
Un vote barrage qui a ses limites
Si Emmanuel Macron a fait un bon score (77,65%) contre la candidate RN (22.35%) à Strasbourg, il n'a tout de même pas su mobiliser tous les électeurs de Jean-Luc Mélenchon ou de la gauche en général qui s'étaient déplacés au premier tour.
Le vote barrage a fonctionné certes mais pas dans les quartiers populaires qui, ne se reconnaissant dans aucun des deux candidats, se sont massivement abstenus
Il faut dire que lors du premier tour du 10 avril 2022, la capitale alsacienne s'était démarquée du reste de l'Alsace en propulsant Jean-Luc Mélenchon à la première place (35,48%) devant Emmanuel Macron (30.19%). L'incertitude des électeurs insoumis pouvait déjà laisser planer le doute sur l'avance qu'aurait le président sortant au second tour.
Philippe Breton, directeur de l'Observatoire de la vie politique en Alsace, confirme: "L'abstention à Strasbourg entre le premier et le second tour a augmenté de 5 points, le vote blanc a lui aussi beaucoup augmenté. Au deuxième tour, 35% des électeurs n'a pas voté pour l'un ou l'autre des candidats. Un chiffre très important."
Au deuxième tour, 35% des électeurs n'a pas voté pour l'un ou l'autre des candidats.
Philippe Breton, directeur de l'Observatoire de la vie politique en Alsace
Une fois cela dit, il faut regarder dans le détail. Ainsi par exemple dans le 6e canton strasbourgeois (Neuhof, Meinau, Plaine des bouchers) : l'abstention y a atteint près de 34%. Dans le 3e canton (Cronenbourg, Hautepierre, Poteries) c'est encore pire : 40%.
"Ceux qui votent traditionnellement à droite ont maintenu un taux de participation disons normal. Les cantons qui votent plutôt à gauche ou écologiste ont vu un petit repli de la participation. Ce sont surtout les quartiers populaires, les cités avec beaucoup de Français issus de l'immigration qui avaient, inhabituellement d'ailleurs, beaucoup voté au premier tour qui se sont cette fois-ci abstenus. Ce sont eux qui fournissent le gros bataillon des abstentionnistes à Strasbourg et qui expliquent aussi le gap de l'abstention entre Strasbourg et le reste du Bas-Rhin" poursuit Philippe Breton.
Il est clair que l'absence de monsieur Mélenchon au deuxième tour a fait que ces électeurs, qui s'étaient beaucoup reconnus dans sa candidature, cette fois-ci ne sont pas allés voter.
Philippe Breton
"Les classes populaires avaient voté monsieur Mélenchon pour faire barrage à Le Pen et pour soutenir ce dernier dans un accord politique sans être forcément de gauche. Il est clair que l'absence de monsieur Mélenchon au deuxième tour a fait que ces électeurs, qui s'étaient beaucoup reconnus dans sa candidature, cette fois-ci ne sont pas allés voter. Il ne se sont reconnus ni dans Emmanuel Macron ni dans Marine Le Pen évidemment. La proposition politique ne leur convenait pas."
Les prochaines échéances électorales, législatives, les 12 et 19 juin, ne devraient pas infléchir ce phénomène, bien au contraire. En 2017,à Strasbourg, le taux d'abstention était de 50,20% au premier tour et de 59,72% au second.