La sécheresse et les mesures de restriction des usages de l'eau asphyxient les pelouses du foot amateur et les golfs alsaciens. Limitation, voire interdiction de l'arrosage, jardiniers et collectivités voient leur gazon jaunir, alors que le retour des compétitions se profile.
En cette période de sécheresse, il est important de boire suffisamment d'eau. Lui aimerait pouvoir le faire car il a soif, mais compte tenu des restrictions des usages de l'eau en vigueur en Alsace, il jaunit petit à petit. Lui, c'est le gazon, soumis à des règles d'arrosage très strictes, édictées par les préfectures du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
Dans la région, mises à part les associations sportives situées sur la bande rhénane, regroupées au sein d'une zone dite de vigilance, aucun club de football n'a le droit d'arroser sa pelouse entre 8h et 20h. Il en va de même pour les greens des terrains de golf. Depuis début août, cette limitation s'est même transformée en interdiction pure et simple dans des secteurs comme la vallée de la Bruche et le bassin de la Fecht ou de la Thur.
Ça va devenir compliqué de jouer si rien ne tombe dans les 15 jours
Marc Nadelhoffer, président du club de foot de Ribeauvillé
Ribeauvillé fait, par exemple, partie de ces communes comprises dans une zone d'alerte rouge, quatrième et dernier stade établi par les autorités concernant les restrictions. La municipalité et le club de foot ne peuvent plus "donner à boire" à la pelouse du stade Pierre de Coubertin, pas même le soir venu, ce qui rend l'entretien impossible. "Il a fallu tout arrêter, confirme Marc Nadelhoffer, président de l'AS Ribeauvillé et horticulteur de profession. C'est en train de griller et il n'y a qu'une chose à faire, c'est espérer qu'il pleuve."
Pelouse sèche et risque de blessures
S'il jure "n'avoir jamais connu cela", le bénévole, à la tête de 250 licenciés, s'interroge déjà sur le début du championnat de l'équipe première, qui évolue en R2, censé reprendre le 28 août. "Jusque-là, c'était gérable mais là ça va devenir compliqué si rien ne tombe dans les 15 jours", affirme-t-il encore, alors que l'arrosage des espaces publics est strictement interdit depuis le 4 août dernier par la préfecture, comme indiqué ci-dessous:
Le sujet est brûlant, disons-le, à l'heure où la plupart des équipes amateures reprennent du service après la pause estivale. Ce responsable du service des sports d'une commune bas-rhinoise, qui préfère rester anonyme, l'atteste: le bon sens des mesures prises en cas de sécheresse sont de nature, si la situation perdure, à mettre en danger la sécurité des pratiquants. "Quand on joue sur de la paille et qu'il y a des trous, c'est plus dur, moins souple, et gare alors aux blessures."
Du côté des organisations professionnelles, la donne est différente: même en cas de tension maximale, ces derniers pourront jouir, de par leur statut, d'une dérogation pour arroser leur pelouse la nuit. Sur les bords du Rhin, les terrains du Racing club de Strasbourg Alsace ne se trouvent pour l'heure pas placés en zone de vigilance. La Meinau et les terrains d'entraînement annexes pourraient donc, en théorie, être aspergés y compris en journée.
Le Racing pour l'instant épargné
Le club a toutefois pris des dispositions. "Il y a les règles et il y a la responsabilité citoyenne. Le gazon de la Meinau est arrosée en partie la nuit. En journée, nous procédons uniquement à des arrosages flashs très courts avant les entraînements par exemple. On essaye de réguler nos besoins au maximum comme le club l'a toujours fait", assure la direction, qui est en contact permanent avec la préfecture et "s'adaptera" en cas de durcissement.
Un peu plus au nord, autre terrain, même problématique. Le golf de la Wantzenau fait également face à "une période de sécheresse qui n'a jamais été aussi longue, avec très peu d'eau tombée depuis le printemps" , selon le directeur de la structure Laurent Trescarte.
Actuellement, seuls les aires de départ et les greens, espace autour des trous où l'herbe ne fait que quelques millimètres, sont irrigués la nuit. Les fairways en revanche, qui constituent la majorité du gazon des différents parcours avec 14 hectares sur 17, ne reçoivent pas une goutte. Résultat, la qualité de jeu s'en trouve dégradée. Et ce n'est pas tout.
Jusqu'à 50.000 euros pour réengazonner un hectare
"Il peut y avoir des trous, et si des parcelles sont trop asséchées, il faudra réengazonner. A raison de 3 à 5 euros le mètres carré, la facture pourrait s'élever à 50.000 euros pour un hectare", ajoute le directeur qui a pourtant multiplié les efforts ces dernières années pour pomper le moins possible dans la nappe phréatique.
"Même hors canicule, ça fait longtemps qu'on essaye d'optimiser l'arrosage qui n'a jamais lieu en journée, explique encore Laurent Trescarte. On a la chance aussi d'avoir un système informatisé qui permet d'adapter la quantité d'eau à donner en fonction de la météo. En clair, s'il pleut suffisamment, ça ne se déclenche pas. On utilise environ 80.000 mètres cubes d'eau par an, ce qui reste raisonnable au vu de notre surface."
Des précipitations attendues d'autant plus que le golf de la Wantzenau accueille ces 10 et 11 septembre un Grand prix, une compétition de niveau régional. Les gazons alsaciens auront peut-être d'ici-là l'occasion d'étancher en partie leur soif. Des orages accompagnés de pluie sont prévus par Météo-France à partir de ce lundi 15 août en Alsace.