Dans la soirée du mercredi 20 novembre, les gendarmes mobiles ont délogé les agriculteurs en colère massés devant la préfecture des Ardennes de Charleville-Mézières depuis la veille.
Les bonnets jaunes des paysans face aux casques des gendarmes mobiles. Les tracteurs face aux cars bleus des forces de l'ordre. Dans un concert assourdissant de klaxons et à la lumière des phares et des gyrophares, le déblocage des agriculteurs devant la préfecture des Ardennes à Charleville-Mézières a débuté vers 20h30. Il a pris fin vers 22h, le mercredi 20 novembre, a constaté Alexandre Blanc, journaliste à France 3 Champagne-Ardenne.
Une dizaine de cars de CRS sont arrivés en début de soirée à la demande de la préfecture. Leur mission : redonner l'accès à la voie publique, bloquée par les agriculteurs de la Coordination rurale depuis le début de la semaine, juste devant la préfecture. Du fumier, des pneus et de la paille obstruaient l'accès au bâtiment public.
Exaspérés, ces agriculteurs ardennais qui dénonçaient, entre autres, le traité du Mercosur, ont été contraints de déplacer leurs tracteurs, une trentaine au total, stationnés devant les grilles de la représentation de l'État. Avec leurs bonnets jaunes siglés "CR (coordination rurale) bien visibles, les membres de ce syndicat agricole de plus en plus puissant dans les Ardennes, n'ont pas caché leur colère teintée de désarroi. Au terme d'un affrontement sans heurts physiques, mais à grands renforts de cris de désespoir, leur porte-parole, Jean-Baptiste Bourin, a dénoncé la situation avec vigueur.
"Nous reviendrons très certainement"
"Voilà voilà..... merci à ceux qui ont compris et soutenu, nous reviendrons très certainement car les problèmes ne sont pas réglés ! Nous sommes bien éduqués et nous avions prévu de nettoyer notre déballage ! Mais Monsieur le Préfet ne nous en a pas laissé le temps. Monsieur le Prefet, merci pour l'accueil, mais ne nous en tenez pas rigueur, nous ne vous inviterons pas a manger la dinde à Noël !" écrit la Coordination rurale sur sa page Facebook.
"Certains ont fait la révolution avec des fourches en bois, nous on n'est pas des racailles, crie l'un des agriculteurs sur place. Ici, on a les mains dans les poches. L'Assemblée nationale, c'est une mascarade. Aujourd'hui, ils sortent d'on ne sait où. Ils ne font rien, il faut se bouger et trouver des solutions, on fait des JO qui coûtent un fric de dingue. On nous prend pour des cons, pas seulement dans le monde agricole. On veut nous faire bouffer de la merde. La PAC, ça permet aussi de faire en sorte que les gens ne payent pas leur baguette de pain à 4 euros !"
Au bord des larmes, en hurlant, d'autres agriculteurs ont affronté les CRS avec colère. "N'emmerdez pas ceux qui bossent…On en a plein le c..., lance un agriculteur. Il faut lui dire comment au petit prince là haut"...Visant sans se cacher le président de la République. Aujourd'hui, on n'est pas violent, on ne casse rien. On voit comment on nous accueille. Pour les cités, on ne met pas ces moyens là".
"Calme et dialogue", selon la préfecture
La préfecture des Ardennes a publié un communiqué pour préciser l'opération. En rappelant qu'à l'appel de la coordination rurale des Ardennes, un rassemblement d'agriculteurs se tenait devant la préfecture depuis le mardi 19 novembre au matin. Les forces de l'ordre ont sécurisé cette manifestation. Pointant le fait que ce rassemblement a donné lieu au dépôt de fumier et de pneus devant les grilles du bâtiment, ainsi qu'au cadenassage des portails principaux, obstruant l'accès aux usagers.
"Malgré des échanges constants et sereins avec les manifestants, précise le texte du préfet Alain Bucquet, la levée du blocage n'a pu être obtenue. Aussi, et afin de rétablir le libre accès à l'édifice public, le préfet des Ardennes a sollicité le cabinet du Ministre de l'Intérieur pour le concours d'un escadron de gendarmerie mobile. En complément des forces locales de la police nationale et du groupement de gendarmerie départementale. Dans le calme et le dialogue, l'intervention des forces de l'ordre a permis la levée du rassemblement, la réouverture des accès et l'escorte en toute sécurité des agriculteurs vers leurs exploitations".
La remise en état du site était en cours, dans la soirée du 20 novembre, en lien avec les services de la ville de Charleville-Mézières. Les tracteurs sont partis, la colère certainement pas. Le mouvement se poursuit. La coordination rurale a prévu d'autres actions en Champagne-Ardenne et ailleurs dès le 21 novembre. ndar