C'est un sujet bien connu des Ardennais, mais que certains médias nationaux semblent découvrir en ce mois d'octobre 2024. Celui d'un pont construit au-dessus d'une route et d'une voie ferrée à Warcq, dans les Ardennes, qui n'est relié à aucune route, et présenté comme un symbole de gaspillage d'argent public.
"Dans les Ardennes, l’absurde pont à 3 millions d'euros… qui ne mène nulle part", "Relié à aucune route, ce pont à trois millions d'euros dans les Ardennes ne mène à rien", "Argent public : une petite commune des Ardennes injecte 3 millions d’euros pour un pont… qui ne 'mène nulle part'". Voici quelques titres d'articles publiés ces derniers jours dans des médias nationaux concernant un dossier bien connu des Ardennais. Celui du pont construit au-dessus d'une route et d'une voie ferrée à Warcq, près de Charleville-Mézières, dans les Ardennes.
Celui qui a remis une pièce dans la machine en premier en ce mois d'octobre 2024, c'est le journal Le Figaro. L'article publié sur son site le 19 octobre s'inscrit dans le cadre d'une série de reportages dans lesquels le quotidien "se lance à la recherche de millions perdus, gaspillés dans des projets inutiles ou mal dimensionnés, alors même que les finances publiques sont exsangues."
Le tout alors que l'examen du projet de loi de finances pour 2025 est en cours à l'Assemblée nationale, et que le gouvernement affiche sa volonté de faire 60 milliards d'euros d'économies. Le papier a déclenché en cascade de nombreux articles et commentaires. RMC, Le Journal du Dimanche, BFMTV, Capital, Sud Radio, La Dépêche, CNEWS… Certains se sont rendus sur place, quand d'autres se contentent de commenter le sujet depuis les studios parisiens.
Il faut dire que l'image du pont relié à aucune route est parlante. Cet ouvrage d'art apparaît comme une illustration parfaitement visuelle du gaspillage d'argent public. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois que Warcq a l'honneur des médias nationaux. TF1 avait déjà consacré un reportage en novembre 2022 dans son 13H à ce pont inutile. L'occasion déjà pour certains titres d'emboîter le pas de la chaîne de télévision. TF1 était revenue sur place en février 2024. Les autres médias n'avaient alors pas décliné à leur tour le sujet, mais ils se sont rattrapés en cette fin d'année. Le contexte budgétaire et la chasse aux milliards lancée par le gouvernement offrent semble-t-il un terrain propice.
Décisions de justice
On ne peut pas nier que ce pont interroge. Mais pour les Ardennais, il fait désormais presque partie du paysage. Car l'ouvrage d'art a été bâti en 2017. Il était bien prévu qu'il soit raccordé à une route, un axe qui devait relier l'autoroute A304 à la nationale 43, et ainsi apaiser le trafic dans le cœur de Warcq. L'inauguration de l'axe était annoncée pour 2018.
Le pont a été construit avant le reste de la route. Puis le conseil départemental, à la manœuvre dans ce dossier, doit décaler le reste du chantier pour des raisons budgétaires. En parallèle, des associations de défense de l'environnement et des propriétaires expropriés saisissent la justice. Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, la cour d'appel de Nancy puis le conseil d'État statuent sur ce dossier.
C'est une véritable épine dans le pied du département.
Noël Bourgeois, président du conseil départemental des Ardennesà France 3 Champagne-Ardenne en 2022
"Le Conseil d’État a considéré que l’utilité même du barreau n’était pas justifiée, notamment qu’il n’y avait pas assez d’arguments pour exproprier des personnes de leur terrain afin de construire une nouvelle route", rappelait en 2022 Igor Dupin, directeur général des services du conseil départemental des Ardennes, interrogé par France 3 Champagne-Ardenne. Le projet routier est stoppé pour de bon.
"C’est toujours compliqué, car c’est de l’argent public engagé : trois millions d’euros ont été investis. Mais aussi des indemnités d’expropriation, des terrains achetés par le conseil départemental", pointait le président LR du Conseil départemental des Ardennes, Noël Bourgeois, dans nos colonnes en 2022. À ce jour, l'ouvrage d'art trône toujours à quelques centaines de mètres des premières habitations du bourg de Warcq.