Les médecins généralistes ne sont pas les seuls à réclamer une hausse du tarif de la consultation. Les kinésithérapeutes en font de même. Nombre d'entre eux se sont regroupés au sein d'un groupe Facebook pour espérer peser sur les négociations en cours avec l'Assurance maladie.
Edwige Agneus est kinésithérapeute à Poix-Terron, dans les Ardennes. Elle travaille 60 heures par semaine, quasi-exclusivement au domicile de ses patients, situés dans un rayon de quinze kilomètres autour de son cabinet. "Je ne peux pas faire plus. Et malgré tout, on voit notre pouvoir d'achat qui chute", confie-t-elle.
La professionnelle de santé estime ainsi avoir perdu en dix ans "15 % de pouvoir d'achat en comptant l'inflation". Avec l'augmentation de l'électricité, de l'essence, avec un emprunt à rembourser, elle dit ne plus s'y retrouver. C'est ce ras-le-bol qui l'a amenée à rejoindre un groupe Facebook baptisé "Négociations kinés : tous concernés" qui rassemble près de 10 000 kinés de toute la France.
On est la profession paramédicale qui a vraiment le plus décroché en termes de pouvoir d'achat.
Edwige Agneus, kinésithérapeute
La consultation d'une demi-heure de kinésithérapie est fixée à 16,13 euros. Un montant que les kinés doivent respecter s'ils ne veulent pas pratiquer de dépassement d'honoraires. "Les gens ne savent pas toutes les charges qui nous incombent, et ils ne savent pas non plus, à cause du tiers payant, combien coûte la séance de kinésithérapie […] Sur 16,13 euros, à la fin, il nous reste 7 euros nets", assure-t-elle.
Pour les rendez-vous à domicile, il faut y ajouter 2,5 euros forfaitaires et 36 centimes par kilomètre. "Autant dire que c'est complètement dérisoire", souffle la professionnelle.
Négociations en cours
Des négociations sont en cours avec la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) pour revaloriser le tarif de certains actes. Cette dernière a proposé aux organisations syndicales une hausse progressive de la consultation de 30 minutes pour atteindre, à horizon 2025, 1,90 euro supplémentaire. Une hausse qui ne changerait rien pour les patients qui continueraient à être remboursés de la même manière.
Mais cette proposition divise pour l'instant les trois syndicats FFMKR, la SNMKR et Alizé. Un nouveau rendez-vous est prévu le lundi 16 janvier. En attendant, les professionnels maintiennent la pression pour espérer obtenir des avancées.
Pour Edwige Agneus, le compte n'y est pas. "On nous propose une revalorisation théorique de 8,5 %. Et ce serait mis en place seulement en totalité en 2025. Mais on ne sait pas où sera l'inflation en 2025. Donc c'est comme s'il ne se passait rien. Pour nous, c'est vraiment catastrophique."
Mon dernier vrai jour de repos, où je n'ai pas travaillé du tout, c'était le 1er novembre.
Edwige Agneus, kinésithérapeute
Pour elle, il faudrait que la consultation soit portée à 20 euros. "Notre métier, c'est une passion. On passe notre temps à soigner les gens et on fait beaucoup de sacrifices […] Même si le salaire ne fait pas tout, ça fait partie de la reconnaissance de notre travail", explique-t-elle.
Lucas Vignon, kiné à Rethel dans les Ardennes, défend la même ligne. "Si on passait de 16,13 la consultation à 20 euros, ça serait je pense déjà une belle avancée et une vraie bouffée d'oxygène pour la profession".
Lui qui exerce depuis 2016 a rejoint dès le mois d'octobre le groupe Facebook, dont il est rapidement devenu l'un des responsables. "Le but du groupe, c'est de faire un maximum de démarches pour alerter, pour faire bouger les choses, que les syndicats se sentent beaucoup plus soutenus qu'auparavant", indique-t-il.
Si on fait tout ça, c'est pour nos conditions d'exercice, mais aussi indirectement et avant tout pour le patient.
Lucas Vignon, kinésithérapeute
Si les négociations en cours ne permettent pas d'obtenir d'avancées, des grèves pourraient avoir lieu. Mais ce type d'action n'est selon lui "pas très efficace parce qu'on n'a pas de pouvoir de nuisance comme les médecins".
"Ce qui est envisagé, ce serait une manifestation sur Paris", ajoute-t-il. Les kinés pourraient aussi arrêter de télétransmettre à la Sécurité sociale leurs consultations, et revenir aux bonnes vieilles feuilles de soins. Un moyen de faire pression sur la Cnam, sans pour autant léser les patients.