"Il faisait partie des pionniers" : le vigneron bio Jean-Pierre Fleury est mort

Jean-Pierre Fleury est mort à l'âge de 77 ans le 21 juillet 2023. Le vigneron aubois était l'un des premiers à s'être lancé dans l'aventure du champagne biodynamique. Il s'était également longuement battu pour obtenir l'interdiction des herbicides sur toute l'aire d'appellation champagne.

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Jean-Pierre Fleury, vigneron de Courteron (Aube), est mort à l'âge de 77 ans, le 21 juillet 2023. L'homme avait six enfants, dont trois ont pris sa suite dans la gestion du domaine. Benoît, au plus près de la vigne, Jean-Sébastien autour de la vinification et Morgane dans la commercialisation. Elle se souvient de lui comme d'"un papa visionnaire, qui regardait vers l'avenir avec beaucoup de philosophie derrière tous ses choix, ses engagements écologiques."

Car Jean-Pierre Fleury a été parmi les premiers à vouloir se passer des produits de synthèse en Champagne. "Si on veut laisser une terre saine à nos enfants et nos petits-enfants, il faut trouver une alternative", affirmait-il dans une interview diffusée en 2001 sur France 3. Cette alternative, ce sera donc la biodynamie, une méthode qu'il a mise en pratique dans ses rangs à partir de 1989 et qu'il décrivait comme "une interaction entre terre et ciel".

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Portrait de Jean-Pierre Fleury, diffusé en 2004 ©France Télévisions / INA

"Un engagement personnel, presque intérieur"

"C'est une méthode qui prend en compte toute la chaîne de vie [...] On prend en compte les microorganismes du sol jusqu'à la roche mère et puis toute l'influence subtile des particules qui nous viennent de la haute atmosphère, avec l'air, la lumière et la chaleur", expliquait-il en 2001.

"C'est vraiment un engagement personnel, presque un engagement intérieur, parce qu'il faut vraiment se lier à cette méthode de production qu'il faut faire de façon rigoureuse si on veut réussir", confiait-il dans un reportage diffusé en 2006 sur France 3.

L'efficacité de cette méthode de culture, inspirée notamment par les rythmes lunaires et planétaires, est remise en cause par des études scientifiques. Mais lui ne tentait pas d'imposer sa vision d'autorité. "Tout était dans l'expérimentation. Il y avait quelque chose de très ouvert dans cette nouvelle façon de travailler la terre", raconte sa fille, Morgane Fleury.

En 1993, il sera distingué par Gault et Millau comme vigneron de l'année. Cinq ans plus tard, il deviendra le premier président de l'association des champagnes biologiques. "Je me souviens avoir fait un salon à l'étranger. Je n'étais pas encore en bio et lui en fait faisait goûter ses vins déjà en biodynamie. Ça avait été une révélation et ça m'avait bien montré que c'était la voie à suivre quoi pour faire des vins de qualités. Il faisait partie des pionniers", se remémore Jérôme Bourgeois, actuel président de l'association et vigneron à Crouttes-sur-Marne, dans l'Aisne.

Mais il est loin d'être le seul à avoir pris exemple sur Jean-Pierre Fleury. Depuis l'annonce de sa disparition, ses enfants ont reçu de nombreux témoignages émus. "Il a une grande famille de gens qui ont bien voulu croire sa philosophie et ce qu'il avait envie de prôner", indique Morgane Fleury. "Il n'avait pas que ses six enfants. Il avait beaucoup d'autres enfants de cœur."

C'est une grande figure de la Champagne qui s'en va.

Jérôme Bourgeois, président de l'association des champagnes biologiques

Jean-Pierre Fleury a milité pendant des dizaines d'années pour que les produits de synthèse quittent les vignes de Champagne. En 2004, il nous disait déjà :  "On est quand même dans une problématique énorme vis-à-vis de l'environnement, de l'eau, de la pollution. En Champagne, il faut qu'on fasse un virage à 180 degrés".

En 2013, il signe une tribune dans la Revue du vin de France. "Osons être le premier vignoble AOC de France sans désherbage chimique", dit-il alors. Une demande réitérée à plusieurs reprises dans les années qui suivent.

En 2022, ce sont ses fils Jean-Sébastien et Benoît Fleury que l'on retrouve parmi les signataires d'un texte dans le journal Le Monde dénonçant une volte-face de l'interprofession sur la question des herbicides. Pour ce combat aussi, la relève semble bien assurée.

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