Après une vague de faux avis négatifs sur Google, un commerçant porte plainte

Un commerçant de l'Aube a décidé de porter plainte après avoir subi une vague de faux avis négatifs sur la page de son magasin sur Google. Il craint que cette campagne fasse chuter son chiffre d'affaires.

Arnaud Piffre est à la tête d'une droguerie qui compte une petite dizaine d'employés. La société baptisée Mon Droguiste compte deux boutiques à Troyes (Aube) et à Reims (Marne). Elle vend également sur internet depuis plus de dix ans. Une activité qui représente la plus grande part de son chiffre d'affaires.

Le professionnel est confronté depuis une dizaine de jours à une vague de faux avis qui plombent sa note de satisfaction sur les moteurs de recherche. Tout est parti, selon lui, d'une commande de produits passée sur son site. Elle comportait des produits qui, associés ensemble, peuvent permettre de confectionner des explosifs.

Il s'agit de produits parfaitement légaux, mais plusieurs éléments, dont la quantité achetée de plusieurs kilogrammes, ont alerté le commerçant. "On a décidé d'avertir les services de police que la commande nous paraissait suspecte. On est juste là pour avertir, pas pour juger", explique Arnaud Piffre.

Car, conformément à la loi, un professionnel doit signaler aux autorités les transactions qui lui semblent suspectes. En France, l'interlocuteur des professionnels est un service du pôle judiciaire de la gendarmerie nationale, le plateau d'investigation sur les explosifs et les armes à feu (PIXAF)

Mais suite à cette alerte, Arnaud Piffre a vu se multiplier des avis négatifs sur la page Google de son entreprise. Et pour lui, le lien avec l'alerte transmise aux autorités est indéniable. "On est une petite boutique. En dix ans, on a eu 57 avis, pour la plupart positifs, avec une note de 4,9 sur 5 pour Troyes et de 5 pour Reims". Au lendemain de l'audition du client suspect par la police, il a reçu "une cinquantaine d'avis en quatre à cinq jours".

L'entrepreneur est certain qu'il s'agit d'une vengeance. À chaque fois, on lui attribue la note minimale d'une étoile. Les prétendus clients déplorent notamment l'attitude du personnel en lui attribuant des propos ou des réactions racistes. La note de l'entreprise chute rapidement à 3,5 sur 5.

Une différence qui peut sembler mineure, mais qui a un impact important, selon Arnaud Piffre. "Pour un produit équivalent, Google aura plus d'intérêt à proposer en premier résultat de recherche la boutique qui a la meilleure note."

En quelques jours, il dit avoir vu son classement sur les moteurs de recherche baisser. Il craint donc que rapidement son chiffre d'affaires en pâtisse. "Je pense que ça va se voir à moyen terme, parce qu'on voit déjà que la fréquentation de notre fiche établissement a dégringolé."

On est impactés directement économiquement et moralement

Arnaud Piffre, gérant

La vague de faux avis s'est concentrée entre le 31 janvier et le 4 février. Mais il craint qu'elle ne reprenne de plus belle suite à la plainte qu'il a déposée.

Pour espérer obtenir la suppression de tous les faux avis, il a déposé une plainte vendredi 10 février. Car Google demande une plainte et un jugement d'un tribunal pour agir. Un processus qui, s'il aboutit, prendra encore longtemps.

"Internet peut donner à une entreprise la capacité de se développer de manière exponentielle, mais à l'inverse, les risques liés à Internet peuvent aussi faire s'effondrer votre société en quelques jours ou semaines", regrette-t-il.

Comment réagir en cas de faux avis ?

Nous avons interrogé Éric de Barry, fondateur de l'agence d'e-réputation Alterbuzz, sur la bonne conduite à tenir lorsqu'on est confronté à des avis négatifs. "La première règle est de ne jamais laisser un avis sans réponse. Dans l'esprit des internautes, si vous ne cherchez pas à répondre, c'est que c'est vrai", explique-t-il.

Ce travail est chronophage, mais il est essentiel, selon lui. "Il faut le faire sérieusement, ça prend un peu de temps, mais ça rapporte aussi beaucoup puisque ça permet d'avoir de la visibilité."

En dehors de ce travail de veille et de réponse, les poursuites judiciaires doivent être menées à leur terme. "Ma recommandation est de poursuivre et de ne pas lâcher, pour punir les tricheurs. Ça vaut le coup parce que plus on obtiendra de condamnations des tricheurs, moins il y en aura. Il y en aurait beaucoup moins s'il n'y avait pas d'anonymat."

La justice a récemment condamné Google à réagir. En juillet 2022, la cour d'appel de Dijon a ainsi réclamé au moteur de recherche de dévoiler l'identité de deux personnes accusées d'avoir écrit de faux avis sur une maison d'hôtes de Saône-et-Loire.

En cas d'avis négatifs liés à une expérience réelle, il faut également réagir en répondant honnêtement aux clients. "Il n'y a pas grand monde qui ne fait pas d'erreur, mais quand on est responsable et qu'on la reconnaît, il y a toujours un moyen de réduire la portée nuisible d'une attaque", affirme Éric de Barry.

Et ne pas attendre d'être dos au mur pour se pencher sur sa e-réputation. "C'est bien de se préoccuper de sa réputation quand elle est attaquée, mais les plus forts s'en préoccupent avant d'avoir un problème."

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