"On n’a pas le même maillot mais tous la même passion." L'expression prend tout son sens quand on entre dans la boutique éphémère, à Troyes (Aube). Un repère pour tous les passionnés de football. Le temps d'un week-end 300 maillots de foot, modernes ou plus vintages, ont été mis en vente. Rencontre avec Antoine Martin, le propriétaire de cette collection.
Quand il est question de football, les souvenirs émergent si facilement. Pour tout passionné de ballon rond, les buts mythiques sont bien gravés au fond de la mémoire. Les grands matches de Coupe du monde laissent une trace indélébile, les équipes de légende, un écho du passé impérissable.
S’il y a bien un élément témoin de l’histoire de ce sport, c’est le maillot. Ce maillot que tous ces joueurs ont porté, représentant l’identité de tout un club, toute une ville ou toute une nation. Certains devenus plus mythiques que d’autres.
Le charismatique Eric Cantona et son col roulé relevé. L’injouable Thierry Henry d’Arsenal, floqué du numéro 14, les manches longues. Les rayures verticales rouges et noires, rendues célèbres par le Milan AC des saisons 1989-1990, porté vers les sommets par la triplette Van Basten – Gullit – Rijkaard. Le maillot de la sélection argentine de Maradona en 1986, à la fois témoin d’un des plus beaux buts de l’histoire et du plus controversé (la Main de Dieu).
Des exemples plus chauvins existent, comme le maillot du Paris-Saint-Germain sponsorisée par RTL de 1981. Ou encore celui de l’Olympique de Marseille du 26 mai 1993, gagnant la Coupe d’Europe.
Bref, il existe des milliers d’histoires que chaque maillot est en mesure de raconter. Il n’est donc pas surprenant que quelques passionnés en font la collection.
Une collection de plus de 500 maillots
"Un maillot, c’est toujours une petite madeleine de Proust." Antoine Martin fait partie de ces collectionneurs invétérés. "De nombreux critères entrent en compte quand on parle d’un maillot de foot. C’est l’histoire d’où on l’a eu, d’où on l’a chiné, du joueur qui nous l’a donné. Parfois, on en cherche un en particulier, celui qui nous a procuré des émotions."
Il se souvient de son premier maillot. Celui de l’Association Sportive Saint-Etienne (ASSE) floqué du nom de Lilian Compan, offert par ses parents, en 2003. Ce maillot vert transporte avec lui un héritage particulier du club. Il représente la remontée en Ligue 1 après l’affaire des faux passeports. L’ASSE s’était vu pénaliser d’un retrait de sept points condamnant le club à la relégation.
Vingt ans plus tard, ce Troyen originaire de Nancy possède plus de 500 maillots, glanés au fil des chinages, des brocantes et de recherches sur internet. Mais Antoine Martin ne compte pas s’arrêter là. Il y a toujours de la place dans sa garde-robe pour d’autres maillots du monde entier, d’autres histoires, d’autres époques. Même si cela demande de se séparer d’une partie de sa collection.
Une vente éphémère unique à Troyes
Pour mieux acheter, il faut savoir revendre. Le jeune collectionneur l’a bien compris et a organisé samedi 27 et dimanche 28 avril une vente éphémère de 300 de ces maillots. "J’avais envie d’organiser un événement de partage autour du football, se donner l’occasion d’échanger avec plein d’autres passionnés. Quand ils achètent un maillot, ils m’expliquent qu’ils le prennent pour ceci ou pour cela. En fait, je voulais partager ma passion du foot", explique Antoine Martin.
"Un maillot, c’est toujours une petite madeleine de Proust."
Antoine Martin, collectionneur de maillots de football
Pour l’ouverture exceptionnelle de cette boutique, il a fait le choix de porter un maillot dont il est particulièrement fier de posséder, qu’il ne met pas en vente : le maillot anniversaire des 120 ans du club de Palerme, son club de cœur. Historiquement, les couleurs étaient le bleu et le blanc, et depuis 100 ans, le rose prédomine.
Dès 10 h, ce samedi 27 avril, des centaines de personnes se sont rendues dans cette boutique. On chine, on fouille, on cherche, on se laisse happer par la curiosité. Pour certains, ce n’est pas l’acheteur qui choisit le maillot, mais le maillot qui choisit son porteur…
Comme Alban par exemple. Il n’était pas en quête de quelque chose en particulier. Mais le coup de cœur a eu lieu. Le maillot de la sélection nigériane de la Coupe du monde de 1994, avec le célèbre Okocha. À ses côtés dans ce chinage, Rodrigo a trouvé un maillot rappelant sa ville natale : celui du FC Porto de la saison 1993/1994.
Mathis Ermini est également un collectionneur. Hors de question de manquer ce rendez-vous. Sa motivation : trouver uniquement des maillots de l’Olympique de Marseille. "J’en ai déjà plus de 130. On est toujours en recherche. Dès qu’on en reçoit un, on en recherche aussitôt un autre. C’était l’opportunité de venir et de se rencontrer entre collectionneurs et passionnés. On n’a pas souvent l’occasion de se voir." Manque de chance pour lui, quelqu’un d’autre a déniché une tunique de l’OM quelques minutes avant son arrivée.
Quand il est question de passion, il n'est pas nécessairement question de prix. Des maillots se vendent dès 50 euros. Mais certains ont déboursé jusqu'à 150 euros, voire plus. D'autant que la mode s'empare de plus en plus de ces maillots vintages. Mais ces acheteurs ont compris une chose : l'authenticité qui transpire de ces maillots se ressent. Une preuve, une fois encore, que le football est bien plus qu'un sport.