Santé : les symptômes méconnus de l’infarctus chez la femme

Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité chez les femmes, et pourtant, leurs symptômes sont encore méconnus. Contrairement aux hommes, les femmes ressentent un essoufflement à l'effort, des nausées ou encore une sensation d'épuisement. (article publié initialement en 2019).

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"Il est urgent de bousculer nos idées reçues, qui nous font considérer les femmes comme protégées des maladies cardio-vasculaires jusqu’à leur ménopause, grâce à leurs hormones, écrit dans un communiqué la professeure Claire Mounier-Vehier. Depuis quelques années, nous faisons face à une épidémiologie préoccupante, notamment chez les femmes de moins de 60 ans, qui ont adopté les mêmes comportements à risque que les hommes."

Quand on parle des inégalités entre hommes et femmes, on pense rarement à l'approche médicale de l'infarctus. Et pourtant.

Autant les symptômes chez l'homme sont largement connus et médiatisés (douleur intense dans la poitrine, sensation d'écrasement, douleur dans le bras gauche…), autant les symptômes féminins le sont beaucoup moins. L'association française de cardiologie met en garde les femmes concernant les symptômes d'un infarctus, différents de ceux des hommes, notamment à travers ce clip vidéo.

durée de la vidéo : 00h01mn25s

Des symptômes méconnus

Les femmes ressentent un essoufflement à l'effort, des nausées ou encore une sensation d'épuisement. C'est ce qui est arrivé à Agnès Ployé, retraitée à Bouilly (Aube). Depuis son infarctus fin 2017, elle prend son cœur très au sérieux. Trois fois par semaine, pendant une demi-heure, elle enfile son legging de sport et pédale à son rythme.

Sa pratique est modérée mais indispensable 16 mois après un arrêt cardiaque. Auparavant peu sportive, la retraitée de 63 ans a eu du mal à décoder les signes avant-coureurs moins typiques que chez les hommes. Son père et son frère avant elle ont pourtant fait des infarctus.

Il faut consulter dès qu'on est ménopausée.

Agnès Ployé, rescapée d'un infarctus

"J'étais en très bonne forme quand c'est arrivé. La seule chose, c'est que quand je faisais des efforts, j'étais très essoufflée et j'avais des nausées, se souvient-elle. Avec le recul, elle affirme, il faut consulter dès qu'on est ménopausée."

Les femmes largement sous-représentées lors des essais cliniques

Des symptômes atypiques qu'il est indispensable de partager au plus grand nombre, selon Claire Mounier-Vehier, cardiologue au CHRU de Lille et présidente à la Fédération française de cardiologie.

C’est une véritable perte de chance, car les femmes se remettent moins facilement.

Claire Mounier-Vehier, cardiologue

"C'est une véritable perte de chance, car les femmes se remettent moins facilement. nous dit Claire Mounier-Vehier, cardiologue. Leurs artères sont plus difficiles à revasculariser, plus fines et plus fragiles que celles des hommes", précise la praticienne.

Cette mauvaise prise en charge est dénoncée par l'association française de cardiologie, qui révèle des statistiques inquiétantes : une étude de 2006 montre que sur 46 essais cliniques analysés qui ont eu lieu en 2004, les femmes représentaient moins d'un quart des patients enrôlés. "La recherche scientifique et la médecine ne peuvent plus ignorer les différences biologiques entre les sexes", s'indigne l'association.

Il existe de nombreuses spécificités biologiques chez la femme en dehors des organes reproducteurs.

Claudine Junien, professeure émérite de génétique

Claudine Junien, professeure émérite de génétique à l'UVSQ et chercheuse en épigénétique à l'INRA, relève des pratiques inégalitaires dans le milieu de la recherche. "Pendant longtemps, la recherche concernant les femmes s’est concentrée sur la "médecine bikini", celle qui touche à la reproduction : utérus, vagin, ovaires et seins. Or, il existe de nombreuses spécificités biologiques chez la femme en dehors des organes reproducteurs."

Ces symptômes sont méconnus du grand public, alors que les maladies cardio-vasculaires représentent la première cause de mortalité chez femmes, et de plus en plus jeunes – 25 % des accidents cardiaques surviennent avant 65 ans contre 15 % en 2002, souligne l'association française de cardiologie.

Pilule et tabac, un cocktail qui multiplie par 13 le risque d'infarctus

Lorsque l'une des artères liées au cœur se rétrécit ou se bouche empêchant le sang de passer, c'est l'infarctus. Dans de nombreux cas comme celui d'Agnès, on pose alors un stent, ou ressort, pour redonner vie à l'artère. L'Auboise est désormais suivie au service de cardiologie de l'Hôpital de Troyes (Aube). Agnès avait une prédisposition génétique, mais l'hygiène de vie a eu des conséquences décisives chez ses cadettes. Ces dernières années, l'infarctus du myocarde a progressé de 4% par an chez les femmes de 45 à 54 ans. En cause : la sédentarité, l'alimentation déséquilibrée et une combinaison à proscrire :

La pilule oestroprogestative […] ne doit pas être prescrit à des femmes de plus de 35 ans.

Aurélie Marchais, praticienne hospitalier au service cardiologie de l'hôpital de Troyes

Aurélie Marchais, praticienne hospitalier au service cardiologique de l'hôpital de Troyes (Aube) met en garde. "On dit que l'association tabac et pilule oestroprogestative multiplie par 13 le risque de faire un événement. Donc ce type de pilule ne doit pas être prescrit à des femmes de plus de 35 ans."

Certains malades suivent une rééducation cardiologique de sept semaines au centre Pasteur de Troyes. Agnès y revient un an après son infarctus et comme elle, les stagiaires ont compris que le sport est le meilleur médicament.

"J'ai pris de bonnes résolutions, je marche, je pédale et je me suis inscrite dans un club local, énumère consciencieusement l'une d'elles. Mais il faut que j'arrive à tenir 30 ans !" Si les récidives ne sont pas rares dans l'année qui suit un infarctus, l'association Cœur et Santé peut aussi accompagner les convalescents troyens et troyennes.

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