Inondations: comment contenir les crues liées au réchauffement climatique ? Ces communes se renvoient la balle

Le maire de Muttersholtz, dans le Bas-Rhin, craint des inondations dévastatrices dans le secteur du Ried dans le centre Alsace en raison du changement climatique. Il exhorte tous les acteurs du bassin versant de l'Ill à se réunir, alors que la ville de Colmar estime avoir déjà fait sa part.

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1910, 1919, 1947, 1955, 1983 et 1990. Voici les dates des dernières crues d’ampleur de l'Ill, rivière qui traverse l'Alsace, qui ont causé des dégâts importants dans le secteur du Ried, dans le centre de la région. Entre les destructions de ponts, ou les inondations de zones industrielles ou d’habitations, les communes sont-elles parées lorsque le cours d’eau sortira à nouveau de son lit ?

Le maire de Muttersholtz, à l’est de Sélestat dans le Bas-Rhin, se pose la question de façon prégnante depuis plusieurs années. Et il connaît la réponse, c’est non, très certainement. L’intensification des phénomènes météorologiques en raison du dérèglement climatique fait poindre de gros nuages à l’horizon.

La prochaine crue d'ampleur ? Dans un mois, dans un an, certainement pas dans 100 ans

Patrick Barbier, maire de Muttersholz

"Le risque est avéré, confirme Patrick Barbier. Cela nous tourne autour et il faut qu’on se bouge parce que la prochaine ne sera pas dans un mois, dans un an, mais pas dans 100 ans. Il faut prendre conscience que les risques menacent les biens mais aussi les personnes", ajoute-t-il, alors qu’une exposition "Mémoire d’inondation" s’est tenue du 12 au 18 octobre dans sa ville.

Le souvenir des inondations meurtrières en Allemagne en 2021

Et si les habitants sont habitués aux crues décennales, d’intensité moyenne, une crue centennale, dont le débit serait bien supérieur, pourrait faire sauter la digue déjà en place aux abords de la commune. "Elle pourrait peut-être tenir mais en cas d’épisode très marqué, l’eau la contournerait par l’amont et par l’aval. Les habitants auraient les pieds dans l’eau, voire plus…"

En Europe, ce genre de phénomène extrême ne relève plus d’une chimère. Les tragiques inondations en Allemagne de l’ouest, les 14 et 15 juillet 2021, le rappellent. Elles ont causé la mort de 136 personnes, sans compter les innombrables dégâts matériels. Des voitures et des maisons entières avaient été englouties voire emportées par les flots.

Dans le Ried, près 8 000 personnes et 200 entreprises sont directement concernées par cet enjeu de crues, ce qui rend l’édile "inquiet". "Ce qu’il faut réussir à créer, c’est une solidarité amont-aval, à l’échelle de tout le bassin versant de l’Ill, c’est-à-dire des Vosges au Rhin", plaide Patrick Barbier.

Créer une solidarité sur l'ensemble du bassin versant de l'Ill

"Traditionnellement, le réflexe, partout dans le monde, c’est d’envoyer l’eau vers l’aval. Mais on ne peut pas se satisfaire d’un tel raisonnement aujourd’hui puisque cela ne ferait qu’amplifier les dégâts dans les communes qui ont le malheur de se trouver plus bas sur le cours d’eau", explique-t-il.

Alors que faire ? Le maire de Muttersholtz, sensible à l’écologie et engagé par ailleurs sur d’autres dossiers comme la lutte contre l’artificialisation des sols ou les mobilités douces, a une solution : "Il faut acheminer l’eau vers un endroit où elle ne pose pas de problème. Il y a la forêt de Colmar par exemple. C’est une hypothèse parmi d’autres."

Une sorte de polder où une partie de l’eau de la crue serait stockée, faisant ainsi baisser le niveau global des eaux et atténuant les dommages. Seulement en amont, le bât blesse. "Sur le territoire du sud de la collectivité européenne d’Alsace, beaucoup de travaux ont été menés depuis plus d’un siècle pour retenir l’eau dans les vallées. Plus en aval, dans le Bas-Rhin, ce n’est pas le cas", estime Eric Straumann.

Sacrifier sa forêt protégée ? La ville de Colmar dit non

Le maire de Colmar se refuse à déterrer la hache de guerre entre Haut-Rhin et Bas-Rhin mais il justifie sa position : "La forêt du Niederwald est déjà un déversoir. Ce qu’on nous demande, c’est d’installer une bassine. Or c’est un espace au biotope très particulier qui fait l’objet d’une convention signée avec l’ONF et l’Union européenne."

L’ancien député ne veut pas sacrifier ce refuge de biodiversité et le voir devenir une zone fermée entourée d’un "merlon de 4 ou 5 mètres de haut", autrement dit une levée de terre, à même de contenir le trop-plein d’eau.

"Ce projet nuirait aussi aux communes environnantes comme Guémar, Ostheim, ou Illhaeusern. Je sais qu’il y a déjà eu un projet de polder dans le Bas-Rhin. Là, on veut nous le faire construire chez nous, où les retenues d’eau sont en place depuis des décennies", conclut-il.

L’affaire montre qu’il n’est jamais simple de concilier des divergences de points de vue au niveau local, même lorsqu’il s’agit d’un enjeu aussi majeur que celui du bouleversement climatique. Une expertise neutre pourrait malgré tout faire aboutir un projet afin de protéger les communes les plus exposées aux inondations.  

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