Depuis le lundi 2 janvier 2023, la production est à l'arrêt sur le site Heineken de Schiltigheim, au nord de Strasbourg (Bas-Rhin). Les grévistes s'opposent à la fermeture de la brasserie et comptent faire revenir la direction sur sa décision.
Mi-novembre 2022, les salariés de la brasserie Heineken de Schiltigheim (Bas-Rhin) ont été informés que le site fermerait ses portes d'ici trois ans. Depuis le lundi 2 janvier 2023 au matin, une trentaine de salariés font grève, et n'ont pas redémarré la production du site après quinze jours d'arrêt pendant les fêtes de fin d'année.
"Cette fermeture, elle ne passe pas." Voilà un mois et demi que les salariés du site Heineken de l'Espérance de Schiltigheim cogitent, et se demandent pourquoi leur brasserie va devoir fermer, sans avoir de réponses plus précises : "Ce n'est pas notre façon de souhaiter les vœux, mais la décision de fermer le site est tellement inacceptable que nous nous exprimons ainsi pour que la direction change d'avis", explique Vania Brouillard, pilote de gestion de production sur le site bas-rhinois.
Par cette nouvelle action, l'intersyndicale CGT-FO-CFDT espère toujours faire revenir la direction sur sa décision de fermer le site schilikois. Vania Brouillard estime que les arguments avancés par la direction ne sont pas bons. Il pointe comme principal enjeu le captage de l'eau, essentielle pour la fabrication de la bière.
Ce dernier explique : "Ici, nous avons une immense nappe phréatique. Si Heineken veut fermer Schiltigheim pour regrouper la production sur les deux autres sites de Mons-en-Barœul (Nord) et Marseille, ces deux sites devront pomper encore plus dans leurs nappes. Mais avec le changement climatique, on se doute qu'il y aura de plus en plus de restrictions à l'avenir. Ça ne sera pas tenable. À court terme, des économies d'échelle seront faites et ça peut se comprendre. Mais à long terme, c'est une erreur énorme."
Un site pourtant novateur
"Je suis dégoûté. Plein de gens se sont investis, et ces investissements sont réduits à néant", explique Flavien, qui travaille sur le site depuis cinq ans, en particulier sur l'innovation. Schiltigheim, c'était la seule usine Heineken de France à faire de la désalcoolisation. Et là, vous fermez le site qui est à l'initiative de la bière 0% en France. C'est une vraie injustice !"
"Aujourd'hui, je suis triste de cette fermeture. On s'attache à ses collègues, et se dire que votre carrière s'arrête du jour au lendemain, c'est très dur, témoigne Jimmy, un technicien de production qui travaille sur le site depuis peu. Je pense aussi à mes collègues qui ont passé la cinquantaine... Se former pour un poste qui peut-être ne leur plaira pas, c'est loin d'être évident pour eux."
Un jeune me disait qu'il se verrait bien faire sa carrière ici. Deux semaines après, ils annoncent le plan.
Laurent ErbsSalarié de Heineken Schiltigheim depuis 22 ans
Laurent Erbs travaille sur le site de l'Espérance depuis 22 ans en tant que technicien de fabrication : "Cette fermeture, c'est du gâchis. Il y a beaucoup de jeunes qui ont commencé il y a un ou deux mois. Encore un me disait qu'il se verrait bien faire sa carrière ici. Deux semaines après, ils annoncent le plan."
Mais l'homme veut rester motivé. Devant les locaux, il lance : "On ne lâchera pas le morceau ! Ici, c'est Schilik. Il faut que la direction se mette ça en tête. On a déjà eu des coups durs, on a déjà été à genoux, et ce n'est pas aujourd'hui que ça va changer."
Une troisième réunion entre les salariés et la direction doit se tenir le jeudi 12 janvier.