Alors que 50 millions de poules pondeuses sont éliminées chaque année en France parce qu'elles ne sont plus assez "productives", des associations s'organisent pour placer les gallinacés dans des familles d'accueil.
Elles s'appellent Lucienne, Jacqueline, et Henriette. Elles entrent en maison de retraite... et elles sont âgées d'un an et demi. Précisons que Lucienne et ses comparses sont des poules. Plus précisément des poules pondeuses, issues d'un élevage alsacien. Au-delà de 18 mois, ces poules continuent de pondre. Mais elles mettent plus de temps à le faire, et leurs oeufs sont plus fragiles. Les élevages les envoient donc à l'abattoir...
Un sort que refuse l'association Happy Earth Now. Elle est parvenue à sauver 250 gallinacés (sur 2.500) qui ont ensuite été distribués à des familles d'accueil. Elles sont venues de toute l'Alsace jusqu'à Schiltigheim (Bas-Rhin) pour récupérer leur(s) nouvelle(s) volaille(e)s, le samedi 11 janvier 2020. Ainsi, Lucienne et ses copines ont été accueillies dans un poulailler flambant neuf chez Alise Bacholle, une particulière : "Comme elles risquaient l'abattoir et que c'est un peu une maison de retraites pour elles, ici, même si elles sont jeunes, on leur a donné des prénoms de mamies !"
Une action solidaire qui permet, au choix, de bénéficier d'oeufs frais, de se débarrasser de ses épluchures - on estime que chaque poule pourrait ingurgiter environ 150 kg de détritus par an -, d'avoir un peu de compagnie, ou même de sensibiliser les enfants (et pas qu'eux) au sort des animaux. Une idée développée par Hélène Almassri, bénévole de l'association : "C'est pour que les gens fassent un lien entre leur consommation et les animaux qui vont à l'abattoir."
En France, le sauvetage des poules pondeuses s'organise
Chaque année en France, près de 50 millions de poules pondeuses sont ainsi éliminées, parce que trop "vieilles", pas assez "productives" après deux ans de bons et loyaux services. Et cela, quelque soit le type d'élevage. Comme Happy Earth Now, des associations qui luttent pour la défense des animaux organisent le placement de quelques poules dans des familles d'accueil.Dans les Pyrénées-Atlantiques, Animal Cross et CEPPAF ont réussi à sauver 700 poules destinées à l'abattoir "grâce à la coopération de l’aviculteur, Monsieur Boue. Ces poules ne devront pas être mangées mais bien finir leurs jours tranquillement. Elles donnent des œufs" précisent les associations sur leurs sites. Elles devront être livrées à leur nouveaux propriétaires les vendredi 31 janvier et 7 février. Ardèche, Somme, Le Loiret,... les initiatives se multiplient à travers toute la France.
Poules en cages : que dit la loi ?
Sur les 50 millions de poules pondeuses qui voient le jour chaque année en France, 58% sont élevées en batterie, deux fois moins qu’il y a dix ans. Mais cette proportion reste supérieure à la moyenne européenne (56 %), quand certains pays, comme l’Allemagne, se sont engagés à l’abandon total des cages d’ici 2025.Sous la pression des consommateurs et des associations, plusieurs enseignes de la grande distribution (Les Mousquetaires, Carrefour, Aldi, Lidl, Monoprix, etc.) ont lancé une marche accélérée vers le hors cage. En 2018, les ventes d’œufs standards ont reculé de 3,4% par rapport à 2017, passant pour la première fois sous les 50% de part de marché dans les hyper et supermarchés.
En octobre 2018, les députés français ont voté l’interdiction des nouvelles constructions et réaménagements de cages pour les poules pondeuses. Un an après, le décret d’application de cette mesure n’est toujours pas paru et plusieurs associations de défense des animaux s’inquiètent d’une « marche arrière » du gouvernement.
En novembre 2019, elles ont rendu public un courrier qui leur avait été envoyé par le ministère de l’Agriculture, indiquant que la notion de « bâtiment réaménagé » serait circonscrite aux élevages augmentant leur surface de production. Autrement dit, il serait possible pour des exploitants de réaliser des investissements de rénovation de cages existantes, tant que la capacité de production ne grimpe pas. La fin de l'élevage en batterie ce n'est pas pour maintenant, alors que le président de la République Emmanuel Macron s'était engagé en 2017 à y mettre un terme d'ici 2022.