Les viticulteurs alsaciens tirent la sonnette d’alarme samedi 4 avril 2020. Depuis le début de l'épidémie de covid19, certains accusent des pertes de chiffre d'affaires allant jusqu’à 90%. Ils évoquent une situation "catastrophique".
Ils ont la tête sous l’eau et le moral en berne. Face aux ventes de vins qui accusent un net recul, les viticulteurs alsaciens sont à la peine depuis le début de la crise sanitaire. Certains enregistrent jusqu’à 90% de perte de chiffre d’affaires. "Début mars, j’avais bien commencé, mais après ça a été la dégringolade", raconte Etienne Dreyer, du domaine Sick-Dreyer. Ce vigneron d’Ammerschwihr (Haut-Rhin), a fait ses comptes. Le mois dernier, il a perdu près de 10.000 euros de chiffre d’affaires, comparé à la même période, en 2019.
"Nous pourrions encore livrer, mais les commandes ne tombent pas. Les ventes au caveau sont autorisées, mais personne ne vient", reprend-t-il.
Les gens n’ont pas le cœur à acheter du vin, ils pensent à l’essentiel. On ne peut pas leur en vouloir
- Etienne Dreyer, vigneron -
Des particuliers aux abonnés absents, des restaurants fermés, des salons et des fêtes de villages annulés. Difficile, dans ce contexte, de remplir les carnets de commandes, d'autant que le confinement ne touche pas encore à sa fin. "Pour l’instant, je suis encore dans le vert. Mais pour le moment en avril, je n’ai qu’une seule facture d’un peu plus de 1000 euros".
Une situation loin d’être isolée dans la région. "C'est catastrophique ce qui se passe, c'est hyper inquiétant, les répercussions sont importantes", explique Jérôme Bauer, président de l'Association des viticulteurs d'Alsace (AVA), qui regroupe près de 4.000 adhérents. Après un début d'année "plutôt bon", avec notamment une "bonne dynamique dans les flux export" début mars, l'épidémie et le confinement ont tout coupé, analyse-t-il. Son propre domaine, situé près de Colmar, essuie lui 85% de perte.
En avril, ça risque de devenir du 100% pour certaines entreprises
- Jérôme Bauer, président de l'AVA -
Fragilisés, certains domaines pourraient-ils mettre la clé sous la porte ? Même s'il rappelle que l’Alsace a déjà perdu 25% de vignerons en dix ans, Alain Renou, directeur du Synvira, le Syndicat des vignerons indépendants d’Alsace se veut rassurant. "On se démène pour trouver des solutions. Les trésoreries sont impactées mais on espère que peu d’entreprises arrêteront définitivement leur activité", d’autant que les dispositifs d'aide des pouvoirs publics et les coups de pouce des banques devraient "limiter les dégâts". Le 19 mars 2020, le syndicat avait soumis à l'Etat des propositions de mesures d'accompagnement "adaptées" aux TPE, dont la mise en place de prêts de trésorerie garantis à taux zéro.
Pour l'ensemble des professionnels de la filière, il reste désormais à tenir, le regard tourné vers les prochaines semaine. En tablant sur un déconfinement "début mai ou mi-mai, il nous faudrait quelques mois pour remettre la machine en route", prévient Jérôme Bauer, qui ne revoit pas un départ de l'activité "avant septembre, sauf peut-être pour ceux qui font de la vente directe", en fonction de la reprise de tourisme.