Gestes barrière et distanciation sociale ont eu raison de toutes les ardeurs. La plupart des mariages programmés cette année entre avril et septembre sont reportés. Mais c'est parfois très compliqué de trouver une nouvelle date. A Strasbourg, 200 mariages civils étaient prévus en mai et juin.
Pauline Bender avait prévu de dire oui, officiellement, à Jacques, son amoureux, le 27 juin prochain. Cela faisait deux ans qu'ils préparaient cet évènement, et quatre mois qu'elle attend la livraison de sa robe de mariée. Une superbe tenue d'été pour laquelle elle a eu un vrai coup de coeur. Mais voilà.... Il faudra penser à assortir un petit gilet ou un boléro à la robe estivale, car le mariage est repoussé au 21 novembre, en croisant les doigts pour que le ciel, cette fois, leur soit clément.
Malgré cette déconvenue, Pauline et Jacques ont eu de la chance car pour beaucoup d'autres couples, difficile de trouver une nouvelle date.
Jusqu'à dix prestataires pour un mariage
Un mariage, ça ne s'improvise pas, cela se construit longuement et patiemment avec l'aide d'une multitude d'intervenants. Traiteur, photographe, fleuriste, couturière, maquilleuse, DJ.... Il faut reprendre l'emploi du temps de tous ces interloculteurs et faire à nouveau coincider les agendas.Et puis, il y a le lieu de la réception. Pour ceux qui avaient misé sur une tonnelle dans un cadre bucolique, ils devront revoir leurs plans. "Hors, beaucoup de salles affichent déjà complet" explique Emilie Gschwind, à la tête de l'agence de wedding planner Chic Alors!
Par ailleurs, aujourd'hui, "la tendance est aux mariages dans des fermes ou des granges, pour le côté bohême et champêtre. Mais ce genre de site n'est pas si fréquent en Alsace. La plupart sont déjà réservés pour le printemps et l'été 2021".
Reste à accepter l'idée d'un évènement en automne ou en hiver. Et Emilie Gschwind espère que les habitudes vont évoluer. "Ces mariages hors saison peuvent avoir beaucoup de cachet", affirme-t-elle. Cela permettrait aussi de lisser son activité sur l'année. En attendant, les 14 mariages qu'elle devait organiser pour 2020 sont tous reportés, et l'année se soldera par un chiffre d'affaire proche du néant.
Heureusement, elle n'a pas de local, et donc pas de loyer à payer. Mais plutôt qu'un report des charges de l'URSSAF, elle souhaiterait une exonération.
2020 aurait dû être une année exceptionnelle
"Là, c'est la grosse claque", renchérit Babouch, photographe au sein d'un collectif qui réalise 80% de son activité avec les mariages. "On vient de traverser deux mois très compliqués. Pourtant 2020 s'annonçait exceptionnelle. D'abord, parce qu'il y a toujours plus de mariages les années paires, ensuite parce qu'il y avait de nombreux week-ends prolongés" .Babouch table sur une timide reprise de l'activité avec le déconfinement. "Nous pourrons au moins réaliser une partie de nos prestations avec les couples qui maintiennent la date de l'union civile" dit-elle.
Mais à la mairie de Strasbourg, on n'est pas vraiment sur la même longueur d'onde. Pour l'instant, les consignes sont sans appel: aucun mariage avant le 2 juin. Et après? "Il faut savoir que cette date n'est qu'une date théorique" assène Alexandre Fritz, du service de l'état civil à la ville de Strasbourg. "Tout ce qu'on sait, c'est qu'on ne sait rien" répète-t-il. "Le classement en zone rouge fait peser un sérieux aléas sur ce calendrier. Tous les mariages sont reportés sine die, et l'on ne sait pas sous quelle forme ils pourraient reprendre : à huis clos, avec 10 ou 20 personnes? On ne sait pas. J'ai deux agents qui passent leur journée à répondre au téléphone sur ce thème dit-il. Pour nous, après les décès surabondants de ces dernieres semaines, c'est un nouvel afffux de demandes à gérer". Car les mois de mai et juin sont ceux de la haute saison avec pas moins de 200 mariages célébrés en temps normal.Tout ce qu'on sait, c'est qu'on ne sait rien
Alexandre Fritz, service de l'état civil à Strasbourg
Chômage partiel pour les traiteurs
Pour les traiteurs également, la visibilité est quasi nulle. Chez Effervescence, les 70 salariés sont au chômage technique, le laboratoire est fermé. Du jour au lendemain, l'activité a cessé. "Alors, pour écouler les stocks au début du confinement, le personnel est venu bénévolement , pour confectionner des plats à offrir aux soignants et aux pompiers" raconte Johanna Diochet, responsable commerciale. Ca a duré 3 semaines. Depuis, plus rien.De la patience....
La plupart des prestataires d'évenements ont réussi à s'entendre pour ne pas envenimer une situation déjà complexe. Les projets différés seront payés ultérieurement, même si les trésoreries des uns et des autres sont mises à mal par la crise sanitaire.Il faut apprendre la patience, et Pauline, future mariée, l'a bien compris. "Au début, on a eu un peu de mal à l'accepter" avoue-t-elle "mais c'est plus raisonnable de reporter. Nous avons des grands-parents qui sont des personnes à risque, nous ne pouvons pas les exposer"
Il est vrai que le contexte est inédit : comment imaginer un mariage où s'embrasser serait strictement interdit? Le covid-19, décidément, fait vaciller bien des habitudes.