Après cinq semaines de voyage, Jean-Yves Bart est de retour à Strasbourg. Il part régulièrement à la découverte d'autres Strasbourg de la planète. Pourquoi ces voyages? Leurs habitants connaissent-ils notre Strasbourg, capitale de l’Europe ? Rencontre.
Il en a recensé 16 en tout. Aux Etat-Unis, au Canada, en Algérie, en Pologne, en Russie... Seize villes ou villages qui portent le nom de Strasbourg (ou "Strasburg") que Jean-Yves Bart, strasbourgeois d'adoption voudrait visiter. Qui est ce "conquistador de l'inutile" comme il s'est lui-même baptisé ?
Né il y a une trentaine d’année à Aix-en-Provence, Jean-Yves Bart a grandi à Bordeaux. Et c’est presque par hasard qu’il est arrivé à Strasbourg il y a douze ans. Mais il est resté et considère désormais Strasbourg comme "sa ville". Pas marié et sans enfant, son temps lui appartient… ou presque. Traducteur de métier, il travaille en free-lance, mais depuis plusieurs années, il se passionne pour la photographie. C’est en cherchant une thématique qu'il tombe par hasard sur une ville nommée Strasbourg, dans le Colorado. En voyage un jour à Denver - dans le Colorado justement - il décide de faire le détour. Trois quarts d'heure, et c'est le début de l'aventure pour lui.
"Strasbourg-Colorado, mon ballon d'essai"
Avec le nom "Strasbourg" comme sézame, il découvre son premier Strasburg américain. Y fait la connaissance d'un vieux monsieur qui construit des trains, se retrouve dans un concours de bétail et découvre un petit musée local où il est fait mention d'autres Strasbourg aux Etats-Unis. "Strasbourg-Colorado était mon ballon d'essai et comme c'était intéressant, j'ai décidé de continuer à découvrir les autres Strasbourg aux Etats-Unis."
Les Strasbourg dans le monde comptent entre 100 et 7.000 habitants
Certains Strasbourg sont de tous petits villages de 140 habitants, tandis que les villes les plus grandes en comptent jusqu’à 7.000. "Les habitants savent rarement d’où vient le nom de leur commune, nous explique Jean-Yves Bart, sauf quand elle est en rapport avec une présence alsacienne ou allemande, quelques générations plus tôt. Ou lorqu'il vient d’un patronyme, comme c’est le cas pour Strasburg-Colorado qui tient son nom d’un des contremaîtres qui travaillait à la pose des premiers rails de chemins de fer à cet endroit."
Pour le jeune traducteur et ceux qui le suivent (ils sont un gros millier à s'être abonné à sa page Facebook), ces voyages sont aussi l'occasion de photographier des personnages et des territoires hors des sentiers touristiques. L'Amérique des Strasbourg n'est pas celle de Las Vegas et Jean-Yves Bart est aussi un raconteur d'histoires.
Parfois des liens avec l'Alsace. "Il existe une sorte de lien entre ces villes, à cause de leur nom, mais je suis surpris qu'il n'y ait pas de jumelage entre-elles, s'étonne Jean-Yves. Il existe parfois des fils historiques, liés aux migrations d'Alsaciens ou d'Allemands au XIXe siècle. En Biélorussie par exemple, l'actuelle Ukraine, des Alsaciens ont bénéficié de conditions privilégiées pour venir cultiver les terres de la tsarine..." Dans le Strasbourg du Dakota du Nord, le maire sortant serait un descendant d'immigrants venus de Seltz, dans le Bas-Rhin.
Ces autres Strasbourgeois connaissent-ils "notre Strasbourg" -?
Quand Jean-Yves annonce "Je viens de Strasbourg en France", cela n'évoque pas grand-chose à ses interlocuteurs, sauf aux Américains aisés qui avaient déjà fait des croisières sur le Rhin. Pour situer la ville, il parlait de sa proximité avec l'Allemagne, de ses spécialités culinaires et de sa cathédrale notammment. Devant la photo de l'édifice qui faisait sensation auprès de tous ses interlocuteurs, un enfant du Dakota, lui a demandé s'il l'avait construite lui-même... Pour autant, ces voyages restent une source de curiosité et d'amusement, y compris pour les médias locaux qui ne manquent pas de relayer son périple.
Sept autres Strasbourg au programme de Jean-Yves Bart. Mais pas tout de suite, car le budget de ces voyages est conséquent. De toute façon, il vient de décrocher un contrat de traduction auquel il va se consacrer. Mais dès 2019, il pourrait bien reprendre quelques billets d'avions ou de trains. Cette fois il ira en Allemagne, en Autriche, en Pologne, en Roumanie ou encore en Russie, en Ukraine et en Algérie.
Quand il aura fait le tour des 16 Strasbourg, Jean-Yves Bart aimerait bien faire un livre avec ses photos et le récit de ses découvertes. Pour l'instant, il a visité neuf Strasbourg, y compris sa ville d'adoption, il lui en reste sept autres à explorer. "Je ne suis pas historien, mais j'aborderai aussi ces questions dans mon livre. D'ailleurs mes interrogations ont permis à plusieurs de mes interlocuteurs de se replonger dans leur histoire locale."