Dans la soirée du 5 juin 2023, le syndicat Force ouvrière des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) a déposé un droit d'alerte auprès de la direction. La journée a été marquée par un engorgement des urgences où les ambulances ont dû patienter sur le parking.
Les secouristes se disent désabusés, eux qui ont passé leur lundi 5 juin à patienter des heures sur le parking des urgences de Strasbourg avec, à l'intérieur des ambulances, des patients qui attendent d'être pris en charge. En cause, une surcharge des services. Le syndicat Force ouvrière a déposé un droit d'alerte, le 55e en un an et demi.
Toute l'après-midi, le parking des urgences de Strasbourg était plein. L'une à côté de l'autre, des ambulances, moteur éteint. Avec à l'intérieur, des patients, pour la plupart sous oxygène. À noter aussi la présence de véhicules de pompiers, de l'administration pénitentiaire, mais aussi des personnes venues par leurs propres moyens.
Une situation qui se répète semaine après semaine et qui a poussé les syndicats à agir. À 20h45, les délégués syndicaux Force ouvrière (FO) Gilles Thiam et Eve Donas se sont rendus sur place. "Le taux d'occupation du Nouvel hôpital civil (NHC) était de 217 %, explique le premier. Concrètement, il y avait 65 patients pour 30 places disponibles. Résultat, la plupart ont dû être placés sur des brancards de manière un peu sauvage."
Il y avait du monde pour gérer 30 patients, pas le double.
Gilles ThiamDélégué syndical FO aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg
L'impossibilité pour le personnel soignant de gérer ce flux à amener FO à faire un droit d'alerte auprès de la direction. "On l'utilise quand le personnel nous appelle au secours et qu'il y a un danger grave et imminent. Hier soir c'était le cas. Il y avait du monde pour gérer 30 patients, pas le double. Parce que même s'ils courent partout et qu'ils font tout pour s'occuper au mieux des personnes à soigner, des défauts de surveillance ne sont pas à exclure. C'est là que peuvent survenir des morts inattendues."
Faire recours au droit d'alerte est de moins en moins exceptionnel. "Rien que la semaine dernière, on en a utilisé deux. On fait ça pour protéger les salariés, pour dire que s'il se passe quelque chose, on l'avait signalé, on l'avait prévenu", explique Gilles Thiam. Ce dernier ajoute que depuis janvier 2022, 55 droits d'alerte ont été déposés auprès de la direction.
Une personne âgée tombe de son fauteuil au milieu du couloir
"On a demandé des renforts paramédicaux et des médecins. En face, on entend une écoute de la direction. Mais ça ne va pas plus loin. Le directeur de garde a prévenu l'ARS, mais on n'a eu aucune réponse et aucun renfort n'est venu. Parce que si on pense d'abord à la protection du personnel, on veut aussi défendre un accueil digne pour les patients. Donc on sort un petit peu de notre champ d'action", continue le délégué syndical.
La soirée du 5 juin a été particulièrement mouvementée dans les couloirs du NHC. D'après un membre du personnel soignant, une personne âgée qui se trouvait sur un fauteuil roulant se serait fortement agitée, au point de tomber par terre. Les infirmiers auraient hésité entre l'allonger à même le sol ou l'envoyer dans un autre hôpital. La deuxième option aurait finalement été choisie.
On n'a aucune visibilité sur l'été qui arrive.
Gilles ThiamDélégué syndical FO aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg
Gilles Thiam s'inquiète surtout de la suite des choses. "On n'a aucune visibilité sur l'été qui arrive, que ce soit sur les lits disponibles ou sur les congés que prendront les soignants. Dans des services en difficulté, on a déjà demandé à certaines personnes de ne prendre que deux semaines de vacances au lieu de trois."
La direction de l'hôpital et l'ARS répondent
Contactée par France 3 Alsace, la direction des hôpitaux de Strasbourg assure que "les équipes font leur maximum pour la prise en charge des patients". Elle ajoute que "la disponibilité des lits reste limitée sur l'ensemble du territoire" et que "tous les leviers sont actuellement actionnés pour favoriser la fluidité des prises en charge".
De son côté, l'Agence régionale de santé indique qu'un plan d'actions a été défini "pour apporter les réponses appropriées". Et de préciser : "Lorsque cela est possible, il s'agit de limiter le recours aux services d'urgences, en s'appuyant notamment sur la médecine de ville, et de fluidifier l'aval des prises en charge. L'ARS est pleinement en accompagnement de ces actions."