Ils déposent du sable coloré dans un cercle pendant des jours. Cinq moines tibétains réalisent un Mandala à l'église du Temple-Neuf de Strasbourg. Objectif: symboliser la recherche d'équilibre entre terre, eau, feu, vent et espace et collecter des fonds pour des écoles au Tibet.
Ça a toujours l'air complètement "dingue". Construire pour défaire ensuite. Pourquoi se donner tant de mal pendant des heures et des jours, à faire des gestes aussi minutieux, garder un esprit tellement concentré, une attention de chaque seconde, si c'est pour tout effacer d'un revers de manche à la fin du travail ?
A l’occasion de leur séjour à Strasbourg, cinq moines réalisent un mandala de sable, une oeuvre éphémère qui sera détruite dimanche après-midi avec un objet symbole de l'éveil. Le "mandala" tiré du sanskrit signifiant "cercle", traduit un concept cosmologique énoncé dans les textes anciens de l’Inde.
Du sable de marbre pour dire "l'impermanence de toute chose"
"Le sable est du marbre finement broyé, plus fin que de la farine fine, et doux comme de la soie" précise Michel Jermann, président de l'association Club Tibet Strasbourg. Il est coloré avec des pigments naturels tirés de végétaux comme les fleurs ou de minéraux. Les visiteurs qui viennent assister à la composition de ce mandala sont de plus en plus nombreux. Ils viennent découvrir une autre culture, en savoir plus sur ces constructions éphémères, dont ils ont déjà entendu parler. Un des moines tibétains, Lobsang, à gauche dans l'image, vient pour la deuxième fois à Strasbourg. Il nous explique le message du mandala.Les mandalas peuvent servir de support visuel à la méditation, d'outil pédagogique ou d'objet rituel. "Mais la construction d’un mandala s’effectue essentiellement en vue de rééquilibrer les cinq éléments : la terre, l’eau, le feu, le vent et l’espace" apprend-t-on sur le site de l'association Club Tibet de Strasbourg. Au Tibet, le mandala de poudre colorée est un art connu sous le nom de dull tson kyll khor. Les moines disposent le mandala sur une table après avoir dessiné le tracé du dessin de base. Le sable est déposé sur la table en se servant du bout d’un entonnoir de métal connu sous le nom de chang-bu. Chaque mandala est destiné a une divinité, une vertu ou une expression du bouddha (Etre éveillé). Cette année, le mandala est dédié à la compassion et la libération des poids de la vie.
Michel Jermann, président de l'association Club Tibet Strasbourg: "Nous sommes très surpris ! C'est la quatrième année qu'ils viennent, c'était confidentiel en 2009 et maintenant on a une trentaine de personnes en permanence. On est obligé d'installer un grand écran dans l'église pour permettre à un maximum de personnes de suivre la dissolution, dimanche à 16 heures".
Le Club Tibet a été créé à Strasbourg en 1989 pour mieux faire connaître la culture tibétaine. Ses objectifs : la sauvegarde de cette civilisation par l’aide à l’éducation, par des actions solidaires et éducatives en Inde, au Népal et dans la région du Tibet. Et des manifestations culturelles francotibétaines, comme celle-ci. Geneviève Diss, membre de l'association Club Tibet de Strasbourg est elle même déjà allée au Tibet. Enseignant à la retraite, la démarche compte beaucoup pour elle : aider à scolariser les enfants. Le travail de ces moines sert donc aussi à cela. Sensibiliser d'autres cultures et religions à la leur et à leur condition. Alors rien n'est à négliger. ils sont venus avec des objets à vendre, fabriqués en Inde, au Népal et au Tibet. Leur vente permet d'augmenter les sommes qu'ils pourront injecter dans la création d'écoles, de bibliothèques, mais aussi de centre de soins leur dernière réalisation. Particularité : tous ces sites sont aussi ouverts à la population locale, bien que elle aussi imprégnée par le bouddhisme.
Infos pratiques pour suivre la dissolution dimanche 4 novembre
Pour venir voir la destruction du mandala au Temple Neuf, dimanche, il faudra passer par la place Kléber ou Broglie, car visite présidentielle oblige, l'accès côté cathédrale sera coupé. Mini mémo : le chef spirituel des Boudhistes est le Dalaï Lama, Tenzin Gyatso, 14ème de la lignée. Il est né le 6 juillet 1935 dans un petit village du nord-est du Tibet, où il est reconnu, alors qu’il n’a pas trois ans, comme la réincarnation de ses treize prédécesseurs. Il réside actuellement à Dharamsala au nord de l’Inde, où se sont installées les institutions démocratiques de la communauté tibétaine en exil depuis 1949. (En 1949, la Chine a envahit le Tibet obligeant le chef politique et spirituel du Tibet à fuir en Inde, où Nehru lui offre l'asile politique.) Mais serait-ce bientôt la fin de cette lignée? Nos collègues d'Arte abordent la question dans un article de décryptage du rôle du Dalaï Lama :
Le dernier des dalaï-lamas ?
Dalaï-lama le XIVème a mis fin à la fonction temporelle de l’institution en 2011. Il avait à cette occasion surpris beaucoup de bouddhistes et déclaré qu’il remettait également en cause l’institution même, qu’il souhaiterait la moderniser et qu’un conseil se réunira le jour de ses 90 ans (2025) pour discuter de sa raison d’être. Il avait auparavant déjà évoqué la question de sa succession en déclarant qu’il aurait aimé qu’il se réincarne en une femme, car "elle ont plus d’influence sur la société".