Le passage au stade 3 de la pandémie au coronavirus joue sur ces élections. Ce dimanche 15 mars, la capitale alsacienne, 280.966 habitants, s'apprête à élire son nouveau - ou sa nouvelle - maire. En 2014, au premier tour, le taux d'abstention dépassait les 50%.
La participation à Strasbourg pour ce premier tour des municipales a été marquée par un chiffre des plus faibles : 28,93% à 17heures, soit pas moins 26 points de moins que lors des dernières municpales en 2014.
Ailleurs dans le département , la participation est fortement en baisse : 32,63 %, soit plus de 20% d'écart avec le taux à la même heure aux municipales de 2014 (52,63 %).
La participation dans le Bas-Rhin à midi est à la baisse comme partout en France : 16,93%. Une baisse à relativiser par rapport au reste du pays -la participation ayant chuté au niveau national de 5 points, le département perd 2,5 par rapport aux dernières municpales à la même heure en 2014.
Dans un bureau de vote de la Musau pourtant, dès l'ouverture, les assesseurs enregistraient un pic de fréquentation.
Un candidat, Alain Fontanel (LREM), "poulain" du maire sortant Roland Ries (PS) mais d'un parti différent du sien. Une ancienne maire de Strasbourg, Catherine Trautmann (PS), soudain redevenue tête de liste. Une candidate écologiste peu connue (Jeanne Barseghian - EELV) mais représentante d'un parti qui a le vent en poupe. Un candidat LR, Jean-Philippe Vetter, qui pourrait "créer la surprise". Dans la capitale alsacienne tout semble possible comme son contraire, et malgré le coronavirus, l'importance des enjeux pourraient même réduire le nombre des abstentionnistes.
Les élections municipales de 2014
En 2014, lors du premier tour, plus de la moitié des inscrits (50,32%) ne sont pas allés voter. Fabienne Keller (UMP) a remporté la manche avec 32,93% des voix, contre le maire sortant Roland Ries (PS), 31,24%, et à sa propre surprise, le frontiste Jean-Luc Schaffhauser a pu rester en lice avec 10,94%.Strasbourg vue du ciel :
Au second tour, le taux d'abstentionnisme s'est réduit de 5 points pour passer à 45,28%. Roland Ries a été réélu avec 46,96% des voix, contre 45,02 pour Fabienne Keller et 8% pour le Front National.
Cette année, la pandémie de Covid-19 pourrait jouer un grand rôle. Selon un récent sondage IFOP, 16% des français envisageraient de ne pas voter pour les municipales de 2020 à cause du virus. Une situation inédite qui pourrait, logiquement, profiter aux conservateurs et aux partis extrêmes.
Les candidats en présence au 1er tour en 2020
- Alain Fontanel (LREM - 100 % Strasbourg)
- Jeanne Barseghian (EELV - Strasbourg écologiste et citoyenne)
- Catherine Trautmann (PS - Faire ensemble)
- Jean-Philippe Vetter (LR - Un nouveau souffle pour Strasbourg)
- Hombeline du Parc (RN - Rassemblement pour Strasbourg)
- Kevin Loquais (LFI - Strasbourg en commun)
- Chantal Cutajar (SE - Citoyens engagés)
- Mathieu Le Tallec (POID - Strasbourg 100 % services publics)
- Louise Fève (LO - Faire entendre le camp des travailleurs)
- Patrick Arbogast (SE - Égalité active)
- Clément Soubise (NPA - Strasbourg anticapitaliste et révolutionnaire)
L'analyse de Richard Kleinschmager
A Strasbourg, "on entre dans une imprévisibilité croissante", estime le politologue Richard Kleinschmager, qui n'exclut pas "l'hypothèse d'une quadrangulaire voire d'une pentagulaire au second tour." Ce qui ne serait pas une première : "une quadrangulaire, on l'a déjà eue, puisqu'en 1989, Catherine Trautmann est élue avec une quadrangulaire parce qu'à l'époque, les Verts n'avaient pas voulu fusionner leur liste" avec celle du PS.
Richard Kleinschmager est politologue, géographe, professeur émérite de l'Université Louis Pasteur de Strasbourg.
Peut-être une nouvelle quadrangulaire ?
Au second tour de ces municipales de 1989, les quatre candidats en présence étaient : le maire sortant, Marcel Rudloff (la droite alsacienne classique), l'opposition socialiste montante Catherine Trautmann, le Front national montant et les Verts. Catherine Trautmann l'avait emporté avec 42,69% des voix contre 36,32% pour le maire sortant Marcel Rudloff.
Aujourd'hui, "on est un peu dans une situation qui ressemble à ce cas de figure" estime le politologue. Le maire sortant, Roland Ries (PS) ne se représente pas, mais son soutien de la candidature de son premier adjoint Alain Fontanel pourrait bien peser dans la balance. Du côté d'EELV, la candidate Jeanne Barseghian, en revanche, "est une surprise". Mais même si elle a moins d'expérience que son prédécesseur Alain Jund, qui n'a pas souhaité se représenter, "la montée de l'écologie, sur toutes sortes de facteurs et d'éléments" pourrait lui être favorable dans cette ville où la sensibilité écologique est assez forte. Choix du renouveau, également, pour Les Républicains, avec un candidat jeune et peu connu du grand public.Et en face, "l'événement Trautmann" selon les termes de Richard Kleinschmager. Catherine Trautmann, maire de la capitale alsacienne de 1989 à 1997, première femme à diriger une grande ville en France, moins connue des jeunes électeurs, mais véritable "point de repère pour les générations vieillissantes."
Pour le politologue, Strasbourg est l'une des villes françaises à observer de près car elle va "faire la surprise. Dans un sens ou dans un autre."
Quel rôle jouera l'abstention ?
Généralement assez forte, l'abstention pourrait aussi jouer un rôle important. "Elle est socialement déterminée, variable selon les quartiers", rappelle Richard Kleinschmager. "Les quartiers (périphériques) sont des zones où on votait beaucoup socialiste, et où on s'abstenait beaucoup aussi." Mais il est difficile de prédire de quelle manière l'abstention pourrait faire pencher la balance : "l'abstention est un sac dans lequel il y a plein d'opinions diverses. Est-ce que, cette fois, les quartiers vont voter écolo ?" s'interroge le politologue, sachant que, traditionnellement, "le vote écolo était plutôt la tasse de thé du centre-ville."Coronavirus ou pas, il est aussi fort possible que ce scrutin très ouvert fasse, cette fois, baisser le nombre des abstentionnistes. "Si (parfois) on se dit : 'de toute façon, l'ancien maire va être élu, ça ne vaut pas la peine que je me déplace', là, au contraire, il y a un enjeu qui peut mobiliser les électeurs. C'est une élection où, comme en 1989, il y a un véritable enjeu, un débat" estime Richard Kleinschmager. 143.582 personnes sont inscrites sur les listes électorales. Reste à voir combien parmi elles se rendront dans l'isoloir ce dimanche 15 mars.
Carte d'identité
Vue du centre administratif de Strasbourg :nombre d'habitants : 280.966
densité : 3568 hab. / km2
taux de pauvreté : 25% (13,1% dans le Bas-Rhin)